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Liban - Exécutif

Le Conseil des ministres annonce une « entente convenue » face à la vacance présidentielle

Réuni hier pour la première fois à l'ombre de la vacance présidentielle, le Conseil des ministres a débattu, en dehors de l'ordre du jour, et pendant près de quatre heures, du mécanisme par lequel il devra exercer les prérogatives du chef de l'État.

Le Conseil des ministres réuni hier au Grand Sérail. Photo Dalati et Nohra

À l'ouverture du Conseil, le Premier ministre Tammam Salam a rappelé que « l'article 62 de la Constitution confère au gouvernement, de manière intérimaire, les prérogatives du président de la République en cas de vacance à la magistrature suprême ». Le texte est clair certes, mais sa mise en œuvre est sujette à de multiples interprétations, échangées hier par les ministres avec un souci plus ou moins marqué de désavouer l'idée d'un organisme substitut à la présidence de la République. Le débat était néanmoins positif et l'option de la démission ou du boycottage par certains ministres des activités du gouvernement n'a nullement été évoquée.
Le débat a porté, avec un calme observé par tous, sur des questions relatives par exemple au mode d'élaboration de l'ordre du jour : les ministres doivent-ils y participer, ou se contenter de prendre connaissance du contenu de l'ordre du jour décidé par le Premier ministre ? Une autre question a porté sur la signature des décrets pris dans le domaine relevant des prérogatives présidentielles : est-il nécessaire que les décrets soient signés par tous les ministres ou uniquement par le Premier ministre et le ministre concerné ?
Aucune décision n'a été prise hier dans un sens ou dans l'autre. Le prochain Conseil des ministres, dont la date a été fixée à mardi prochain, à 16 heures, devra trancher ces points, sur la base d'avis de constitutionnalistes qu'il a été par ailleurs convenu de consulter.
L'on apprenait toutefois que la formule qui paraît la plus convaincante parmi celles avancées hier serait la suivante. La formule proposée établit une distinction entre les sujets jugés ordinaires (la santé, la grille salariale...) et les sujets importants (les finances et le budget, les nominations administratives...). Les décisions portant sur des dossiers « ordinaires » seraient prises à la majorité et cosignées par le Premier ministre et le ministre compétent. Les décisions sur des questions « importantes » nécessiteraient le vote et la signature des deux tiers des ministres, soit 17 ministres.
Cette formule, si elle est entérinée par des avis experts concordants, devrait constituer le fil conducteur de l'activité de l'exécutif, jusqu'à l'élection d'un nouveau chef de l'État.
Celle-ci demeure l'enjeu essentiel du gouvernement, comme a veillé à le signaler à l'ouverture du Conseil le Premier ministre Tammam Salam. « Le gouvernement est un gouvernement d'intérêt national, dont le principal souci au cours de la période qui suit est de préparer l'atmosphère propice à l'élection d'un nouveau chef de l'État. » « Quand bien même la présidentielle n'aurait pas eu lieu dans les délais, elle devrait désormais se tenir au plus vite », a-t-il souligné.
En réalité, les divergences sur les détails de l'exercice des prérogatives présidentielles par le cabinet auront démontré implicitement la quasi-impossibilité pour les institutions de durer sans un chef de l'État. Certes, ces divergences sont aujourd'hui contenues par « un souci commun de laisser passer, sans blocages, la période de la vacance présidentielle », selon le constat d'un ministre. Mais elles restent susceptibles de justifier certains blocages, au cas où l'entente ferait défaut. Déjà hier, et en dépit de l'ambiance positive des échanges, la compétence du Premier ministre d'élaborer l'ordre du jour et de convoquer à une réunion a été mise en doute par les ministres aounistes. Ceux-ci se seraient opposés, vers la fin du Conseil, à ce que la date de la prochaine réunion soit fixée. Ces réserves n'ont pas été suivies d'effet, mais elles trahissent une polémique latente sur l'équilibre des compétences entre le Premier ministre et les ministres réunis. D'autres points touchent directement à l'impossibilité d'agir sans un chef de l'État. Il en va ainsi de la ratification des lois, celle-ci se faisant par décret présidentiel. À l'heure où une source du Hezbollah, citée par le site d'informations Now Lebanon, évoquait hier la probabilité de la tenue des législatives avant la présidentielle, la question des compétences du Parlement sous la vacance présidentielle a meublé une part des débats en Conseil des ministres. Les ministres du Hezbollah pousseraient dans le sens du vote d'une nouvelle loi électorale, croit-on savoir de source ministérielle. Si toutes les parties s'entendent – ce qui n'est toujours pas décidé – à prendre part aux réunions parlementaires pour élaborer une nouvelle loi électorale, qui signerait le décret de ratification ? Est-il constitutionnel que le Premier ministre, cosignataire du décret présidentiel, se transforme en unique signataire ?
D'une manière générale, la polémique reste étouffée par « l'entente comme règle de travail du cabinet », réaffirmée par le compte rendu de la réunion ministérielle. Le conseiller de l'ancien Premier ministre Saad Hariri, Nader Hariri, avait d'ailleurs recommandé il y a deux jours au ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, trois modalités d'action pour la période actuelle : ne pas entraver le travail du président Salam ; ne pas boycotter le Conseil des ministres ; favoriser l'entente sur un mécanisme de travail en attendant l'élection d'un nouveau chef de l'État.
Le Conseil des ministres réuni hier aura donné le ton des prochaines semaines : trouver un moyen de sortir de la défaillance constitutionnelle et politique qu'est l'absence d'un chef de l'État (...) sans paralyser la marche du gouvernement.
Le gouvernement fait face en effet à des urgences de nature socio-économique. « Au cours des trois premiers mois de 2014, les recettes de l'État ont diminué de 18 % par rapport à 2013, qui était déjà mauvaise », a souligné par exemple le ministre d'État pour la Réforme administrative Nabil de Freige. La priorité reste au dossier des réfugiés syriens. Le ministre des Affaires sociales Rachid Derbas paraît déterminé dans le sens d'une limitation de l'afflux des Syriens, sur la base de critères stricts de qualification de statut de réfugié, qui seront mis au point par la commission restreinte chargée du dossier. Sa réunion, reportée à lundi, aura lieu la veille de la venue du président de la Banque mondiale. Les ministres accordent une importance particulière à cette visite, qui doit se répercuter positivement sur l'efficacité du prochain Conseil des ministres.

À l'ouverture du Conseil, le Premier ministre Tammam Salam a rappelé que « l'article 62 de la Constitution confère au gouvernement, de manière intérimaire, les prérogatives du président de la République en cas de vacance à la magistrature suprême ». Le texte est clair certes, mais sa mise en œuvre est sujette à de multiples interprétations, échangées hier par les ministres avec...

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