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Liban - Droits de l’homme

Au Liban, les employées de maison étrangères dans la rue pour réclamer leurs droits

C'est sous forme de « parade » que les travailleuses domestiques migrantes ont invité hier les autorités libanaises à mettre en place une loi pour protéger leurs droits.

Elles manifestent pour une meilleure protection juridique. Photo Anne-Marie el-Hage

« Nous revendiquons une meilleure protection juridique. » Derrière ce slogan s'ébranle la manifestation des employées de maison étrangères du Liban, depuis le rond-point de Dora jusqu'à la gare ferroviaire de Mar Mikhaël via Bourj Hammoud, clôturant quatre jours de festivités à l'occasion de la fête du Travail. Une parade toute en couleurs, en youyous et en danses improvisées, qui a vu la participation de plusieurs centaines de personnes de 19 nationalités, répondant en masse à l'appel du Consortium de coordination des travailleuses migrantes domestiques.

« Tuez le système du garant avant qu'il ne tue davantage de personnes. » À l'image de ce slogan, les revendications des manifestantes sont claires, directes et percutantes, brandies sur des pancartes ou banderoles, dans les trois langues pratiquées au Liban. Les participantes, arborant les couleurs de leurs pays, n'hésitent pas à interpeller pêle-mêle les autorités libanaises et les employeurs : « Un dimanche passé sur le lieu de travail est-il vraiment un jour de congé ? » ou « Avez-vous jamais été traité d'âne au travail? » ou encore « Avez-vous déjà été emprisonné sur votre lieu de travail ? ». Déterminées à se faire entendre, elles invitent le Liban à « mettre fin à l'esclavage moderne », à « englober les travailleuses domestiques dans le code du travail » et « à réglementer les horaires de travail ». « Nous avons droit à un salaire minimum, nous aussi », lancent-elles, mais également, « moi aussi, j'ai le droit de changer de travail », ou mieux : « Je veux manger à ma faim et je refuse qu'on retienne mon salaire », comme le crie une jeune Malgache.

(Pour mémoire : Le responsable d'un bureau de recrutement au Koura arrêté pour le viol d'une Ethiopienne)


« Non à la confiscation du passeport »
L'ambiance est à la fête, aux chants et au rire, malgré la chaleur accablante, en ce premier dimanche de mai. Le Tout-Bourj Hammoud libanais et étranger est aux portes des commerces, aux balcons des appartements ou dans la rue pour regarder passer le cortège coloré et bruyant, encadré par la police. Chacun veut immortaliser l'instant. Les manifestantes, menées par les militantes et par la présidente de la Fédération internationale des travailleurs migrants domestiques, Myrtle Witbooi, affichent et crient leurs revendications dans un joyeux brouhaha, accompagnées de proches, de compatriotes de sexe masculin et parfois de jeunes enfants. « Non à la confiscation du passeport », lancent-elles en cœur, « Nous sommes des travailleuses, pas des esclaves », ou encore : « Je travaille à votre domicile, ne croyez pas que je vous appartiens ! ». Un homme brandit bien haut une pancarte sur base de l'article 1 de la déclaration onusienne des droits de l'homme : « Nous sommes tous nés libres et égaux en droits... »

Seul bémol de l'événement, un nombre de participants inférieur à l'année précédente, pour cette 4e édition de la parade. « C'est dommage », observe Charles Nasrallah, directeur de l'association Insan qui soutient l'initiative, au même titre que les ONG Kafa, Caritas Liban centre des migrants, Amel et Anti-racism Movement, ainsi que le Danish refugee council, l'Agence suisse pour le développement, l'Organisation internationale du travail et l'Union européenne. « La grande majorité des employées de maison n'ont pas pu venir, car elles ne sont pas autorisées à sortir le dimanche », explique Etafer, une manifestante de nationalité éthiopienne. « Elles ne savent même pas qu'une manifestation se déroule en ce moment, car elles sont privées de contact avec les ressortissantes de leur pays », assure-t-elle. Etafer et ses consœurs Tesfar et Meskir sont heureuses au Liban, mais elles constatent amèrement que les choses « n'évoluent pas vraiment » pour la main-d'œuvre domestique migrante.

(Lire aussi : Employées de maison : les tromperies commencent dans le pays d'origine)


La coordinatrice au Liban de la Fédération internationale des travailleuses domestiques, Gemma Justo, renchérit : « Nombre de travailleuses domestiques sont enfermées le dimanche par leur patronne qui les fait travailler. » C'est donc pour elles et en leur nom que se déroule la parade, mais les employées de maison « doivent apprendre à réclamer leurs droits par le dialogue avec leur patronne », conseille-t-elle.

Ne pas baisser les bras
Pour d'autres qui participent à cette manifestation pour la quatrième année consécutive, les choses ne peuvent qu'évoluer positivement. « Notre voix est de plus en plus forte et nous réussissons à sensibiliser les employeurs. C'est là que réside le changement », assure Bendaline, de nationalité philippine. De son côté, Suzanna Rana, du Népal, salue le travail des associations grâce auquel la situation des employées de maison s'améliore. « Une amélioration perceptible d'au moins 25 % », souligne Ana Fernando, de nationalité sri-lankaise.

Quoi qu'il en soit, les travailleuses domestiques migrantes n'ont pas l'intention de baisser les bras. C'est la promesse faite par le consortium aux employées de maison du Liban et lue en français au terme de la marche par Eugénie Ahouandedja, de nationalité béninoise. « Nous sommes suffisamment confiantes pour continuer à combattre l'injustice du système, à nous battre pour nos droits... » affirme-t-elle, déplorant l'absence de loi protégeant les droits de ces travailleuses. « En l'absence de loi, il est très facile, même pour de bons employeurs, de violer ces droits, sans même le savoir », souligne-t-elle.

Malgré des autorités frileuses, les ONG ne chôment pas. « Un avant-projet de loi est prêt, mis en place par toutes les associations qui luttent pour les droits des employées de maison. Nous attendons le moment propice pour le lancer », assure Zeina Mohanna, représentant l'association Amel.

Dans l'attente, les travailleuses domestiques migrantes du Liban ont tenu à rappeler aux citoyens, hier, qu'elles sont d'abord des êtres humains et des travailleuses, comme tout autre travailleur.


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commentaires (1)

Pour prendre conscience de ce qu'est réellement ce Pays aujourd'hui, ce n'est pas seulement du Késchék prédominant dans les menus xénophobes libanais qu'il s'agit, mais de la souillure que la société libanaise Malsaine inflige aux travailleuses Saines et qu'il tente malgré toutes ces patronnes à lourds "chignons" et ses patrons à grosses vibrisses de nier au prix d'un effort colossal et surdimensionné. Cette société, précisément, il faut la décrypter, la déplier et la cisailler avec lucidité, performante perversité et dévastatrice mélancolie même comme des grenades dégoupillées, avec des compliments se retournant comme des gants et des critiques piégées. De tout ceci immanquablement sourdra une énergie incompressible, des forces antagonistes qui façonnent des Bonnes femmes "bonnes" et un Pays, et tout un appareil emberlificoté idéologico-légendaire fantasmagorique campagnard et sectaire qui exalte et qui broie. Et, surtout, une spécificité libanaiiise qui est un perpétuel statuquo hypocrite sans trêve, imbu de fatuité et si perturbateur ; un statisme à l'échelle et à la vitesse de ce patelin : autant dire une -p e r m a n e n c e- absolue comme tradition indigène malheureusement typiquement engourdie, replète et repue, "durable!", raciste et sexiste soi-disant développée et donc évoluée.

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

12 h 22, le 05 mai 2014

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Commentaires (1)

  • Pour prendre conscience de ce qu'est réellement ce Pays aujourd'hui, ce n'est pas seulement du Késchék prédominant dans les menus xénophobes libanais qu'il s'agit, mais de la souillure que la société libanaise Malsaine inflige aux travailleuses Saines et qu'il tente malgré toutes ces patronnes à lourds "chignons" et ses patrons à grosses vibrisses de nier au prix d'un effort colossal et surdimensionné. Cette société, précisément, il faut la décrypter, la déplier et la cisailler avec lucidité, performante perversité et dévastatrice mélancolie même comme des grenades dégoupillées, avec des compliments se retournant comme des gants et des critiques piégées. De tout ceci immanquablement sourdra une énergie incompressible, des forces antagonistes qui façonnent des Bonnes femmes "bonnes" et un Pays, et tout un appareil emberlificoté idéologico-légendaire fantasmagorique campagnard et sectaire qui exalte et qui broie. Et, surtout, une spécificité libanaiiise qui est un perpétuel statuquo hypocrite sans trêve, imbu de fatuité et si perturbateur ; un statisme à l'échelle et à la vitesse de ce patelin : autant dire une -p e r m a n e n c e- absolue comme tradition indigène malheureusement typiquement engourdie, replète et repue, "durable!", raciste et sexiste soi-disant développée et donc évoluée.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    12 h 22, le 05 mai 2014

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