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Nos Lecteurs ont la Parole - Hala ABINADER

Dans un pays en perdition...

L'inutilité d'écrire est avérée, puisque aucune réponse ne vient. Cela n'exclut cependant pas la valeur de l'écriture, cathartique, sans doute, mais plus encore, puisqu'elle participe à la recherche de la vérité, la nôtre, celle de notre pays en perdition. Cette vieille pulsion de mort semble s'être réveillée, l'autodestruction est cyclique au Liban, le mythe du phénix n'est pas volé, nous renaîtrons sans doute avec la même violence que celle qui nous consume actuellement. Mais force est de constater qu'une renaissance cyclique empêche d'arriver à maturité.
La question qui se pose au-delà du moment est celle de l'opportunité pour nous, libanais, de vivre sur ces sables mouvants, de construire sur du mou, de bâtir pour voir détruire puis refaire encore le chemin à l'envers, dans un labyrinthe politique vil, vénal, assassin et qui annihile à chaque fois nos efforts et notre volonté d'être heureux ici, heureux simplement, sur cette si belle terre qui est la nôtre.
Toute recherche de solution doit remonter aux causes de notre échec. L'une d'elle est essentielle, structurelle : la composante même de notre pays est tronquée. Ce mélange communautaire est fragile, explosif même, il ne s'endort qu'en période de grâce économique et régionale, ce n'est pas suffisant. Nul besoin de nier que les clashs culturels, religieux, idéologiques, ainsi que le clash des alliances contractées aux moments cruciaux n'ont fait que creuser un fossé profond où coule trop de sang, trop d'amertume et de méfiance.
S'il fallait regarder la vérité en face, il semble bien qu'à moins d'un miracle – et ils sont rares en politique –, le Liban continuera à vivoter à l'ombre de son destin réel qui pourrait être grand et prospère. Il ne connaîtra pas l'étendue de sa force, qui jaillit pourtant dès qu'il bénéficie d'une année calme. Je parle du miracle du changement qui demeure possible et du travail accompli par une équipe compétente, une équipe qui a fait ses preuves, l'impulsion d'un homme porteur d'espoir et surtout d'une vision claire, d'un savoir-faire. Je parle de Riad Salamé, dont les succès sont d'humbles miracles humains, ceux du travail, du respect, de la persévérance. Dans un monde de bons ou mauvais parleurs, il se détache du paysage libanais depuis plus de vingt ans, notamment à l'heure de la paralysie de l'exécutif comme du législatif, un îlot porteur de possibilités, d'espoir, facteur de stabilité : la Banque du Liban.
Un compromis naîtra tôt ou tard lorsque les États-Unis auront trouvé leur compte avec l'Iran. Alors une nouvelle trêve sera accordée au Liban. Deux ans ? Dix ans ? Mais si rien n'est fait au niveau structurel, l'évolution démographique couplée à la crise des réfugiés syriens effectuera toute seule le travail de sape lent et pernicieux qui fera basculer toutes les balances. Si rien n'est fait, de compromis en compromis, un beau jour le Liban, ce si beau pays, se perdra définitivement à lui-même.
À quelques semaines, tout au plus quelques mois de l'élection d'un nouveau président, sachons simplement que ce président, quel qu'il soit, présidera un pays usé jusqu'a la moelle, un bateau sans barre ni gouvernail. Si les États qui bénéficient d'un droit de regard sur les élections à venir ne réalisent pas qu'ils organiseront purement et simplement une banqueroute, si et seulement si pour une des rares fois nous n'élisons pas the right man in the right place (at the last moment !).

 

L'inutilité d'écrire est avérée, puisque aucune réponse ne vient. Cela n'exclut cependant pas la valeur de l'écriture, cathartique, sans doute, mais plus encore, puisqu'elle participe à la recherche de la vérité, la nôtre, celle de notre pays en perdition. Cette vieille pulsion de mort semble s'être réveillée, l'autodestruction est cyclique au Liban, le mythe du phénix n'est pas...

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