Rechercher
Rechercher

Lifestyle - Innovation

Une assurance halal pour protéger le bétail du nord du Kenya

Les indemnisations ne sont pas calculées en fonction du nombre de bêtes perdues, mais de la sévérité de la sécheresse, évaluée grâce à des satellites météorologiques de la NASA.

Comme dans d’autres régions d’Afrique, le bétail est dans le nord-est du Kenya la principale richesse des communautés pastorales et constitue un mode d’épargne très vulnérable aux aléas météorologiques. ILRI–Riccardo Gangale/AFP

Dans le nord aride du Kenya, la survie des communautés pastorales dépend de leurs troupeaux, vulnérables aux sécheresses chroniques. Un assureur local, fils de chamelier, a trouvé une solution originale, mêlant satellites de la NASA et assurance islamique, pour les protéger des aléas.
« Je viens de cette communauté et je comprends ses besoins », explique Hassan Bashir dans les rues de Wajir, où flânent singes et ânes, à une centaine de kilomètres de la frontière somalienne. En costume chic, il salue avec déférence des vieillards en longues tuniques traditionnelles.
L'assurance commerciale étant traditionnellement interdite par l'islam qui prohibe spéculation et paris sur le hasard, M. Bashir, 48 ans, a donc décidé d'adapter à la couverture de ces troupeaux le « takaful », système islamique de garantie coopérative où le risque est partagé entre souscripteurs qui se portent mutuellement assistance. Dans le takaful, les souscripteurs restent propriétaires des fonds, et tout surplus après versement des indemnités est redistribué équitablement ou réinvesti. Takaful Insurance of Africa, fondée il y a trois ans par M. Bashir pour assurer initialement véhicules et habitations, ne prélève que des frais de gestion.
« C'est un moyen équitable et éthique de protéger le bétail des communautés pastorales des risques naturels », explique cet ancien assureur commercial passé à l'assurance islamique après « des discussions animées » avec ses parents qui refusaient son argent « immoral ».
Il explique avoir voulu « faire quelque chose pour aider les gens d'ici à se développer », en créant « un filet de protection coopératif pour la communauté ».
Pour cela, aux connaissances des théologiens musulmans, M. Bashir a ajouté ceux d'experts de l'Institut international de recherche sur l'élevage (ILRI) de Nairobi.
Car l'innovation de son système, c'est que les indemnisations ne sont pas calculées en fonction du nombre de bêtes perdues – impossible à prouver – mais de la sévérité de la sécheresse, évaluée via un indice conçu par des experts de l'ILRI qui mesurent la couverture végétale des zones concernées grâce à des satellites météorologiques de la NASA. Plus la sécheresse est sévère dans une zone, plus l'indemnisation par bête assurée est grande, quelles que soient les pertes réelles.

Regarnir leurs troupeaux
Comme dans d'autres régions d'Afrique, le bétail est dans le nord-est du Kenya la principale richesse de ces communautés et constitue un mode d'épargne très vulnérable aux aléas météorologiques.
En 2011, la région a connu une sécheresse catastrophique qui a décimé les troupeaux, comme celui d'Abdi Aden Bulle, bouvier et chamelier de 65 ans, qui a perdu 40 de ses 50 vaches et huit de ses dix chameaux, ce qui l'a incité à souscrire cette nouvelle police d'assurance. «
Les animaux sont notre vie. Nous vendons les animaux pour acheter de la nourriture, pour payer les frais scolaires, les frais médicaux », explique-t-il.
Cette semaine à Wajir, Takaful a versé ses premières indemnités à une centaine de souscripteurs, qui ont touché entre 7$ et 720$, selon le nombre de bêtes assurées et le secteur où ils vivent, plus ou moins touché. Certains ont reçu plus qu'ils n'ont versé, d'autres moins. « C'était très très sec » cette année, la saison des pluies étant arrivée avec plusieurs semaines de retard, raconte Khalif Mohammad, qui a perdu trois de ses 15 chèvres. Tous expliquent qu'ils utiliseront l'argent pour regarnir leurs troupeaux, s'acquitter des frais scolaires et s'occuper d'autres besoins domestiques.

« Produit innovateur »
Le projet a reçu le soutien de l'Australie, du Royaume-Uni et de la Commission européenne qui ont financé à hauteur de six millions de dollars la mise en place de l'indice de l'ILRI et la promotion du système via des ONG. « C'est un produit novateur qui peut être reproduit ailleurs au Kenya, mais aussi dans d'autres pays », s'enthousiasme Dominique Davoux de la Commission européenne. Les bailleurs espèrent qu'il permettra à ces communautés vulnérables de mieux résister aux sécheresses et de réduire leur dépendance à l'aide humanitaire.
Mais le potentiel économique du système est également important. Dans les campagnes arides autour de Wajir, où presque tous les habitants vivent dans des huttes traditionnelles, le gouvernement estime la valeur du bétail à environ 550 millions de dollars et à cinq milliards au total au Kenya. Dans la Corne de l'Afrique, les communautés pastorales représentent plus de 70 millions de personnes. Ces semi-nomades possédant rarement des comptes en banque, les primes d'assurance peuvent être payées grâce au transfert d'argent par téléphonie mobile.
D'autres assureurs utilisent à leur tour le système développé par l'ILRI dans le nord du Kenya et le sud de l'Éthiopie et plus de 4 000 personnes sont désormais assurées.
Takaful Insurance cherche désormais à étendre et diversifier son territoire de couverture afin de diluer le risque de sécheresse et « créer un régime d'assurance stable », explique M. Bashir.

(Source : AFP)

Dans le nord aride du Kenya, la survie des communautés pastorales dépend de leurs troupeaux, vulnérables aux sécheresses chroniques. Un assureur local, fils de chamelier, a trouvé une solution originale, mêlant satellites de la NASA et assurance islamique, pour les protéger des aléas.« Je viens de cette communauté et je comprends ses besoins », explique Hassan Bashir dans les rues de...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut