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Moyen Orient et Monde - Le point

Cherche allié désespérément

Connaissez-vous Edward Aloysius Murphy Jr. ? Cet ingénieur aéronautique disparu il y un quart de siècle est le père d'une formule qui s'énonce comme suit : « Tout ce qui peut mal tourner va mal tourner. » On sait comme il est aisé de le vérifier tous les jours que Dieu a fait. Il existe un autre adage, de Jacques Chirac celui-là : « Les emmerdes, ça vole toujours en escadrille. » Combinez les deux, agitez, servez : et vous avez la situation dans laquelle se débat présentement Recep Tayyip Erdogan, un homme sur qui s'acharne le sort.


Après les ennuis avec l'Union européenne, la crise dans les rapports avec Israël, les procès faits à l'armée, le tumulte autour du parc Gezi appelé à être transformé en centre commercial, les affaires de corruption qui ont failli emporter le gouvernement, l'heure est au combat contre YouTube et Facebook, en attendant d'autres moulins à vent. Pour l'heure, l'épreuve bruxelloise ne fait que commencer ; la tension avec Tel-Aviv est en passe d'être réglée, la discussion tournant désormais sur le montant de l'addition à régler ; l'affaire de l'agitation de l'été dernier, place Taksim, mise en veilleuse pour cause de priorités, il restait le contentieux avec les héritiers galonnés d'Atatürk à propos d'un fumeux putsch manqué – l'Opération Marteau-Pilon – qu'il convient à présent de coupler avec cette véritable bombe à fragmentation qui porte le nom délicieusement mythologique d'Ergenekon.


Il faut croire que la mayonnaise antimilitariste n'a pas pris puisque le gouvernement vient de s'engager résolument dans un tournant qu'à la vérité on voyait venir depuis cinq semaines. Au début de janvier dernier, le haut commandement de l'armée, qui se tenait coi depuis la mise au pas de l'institution, se fait entendre et réclame le réexamen du procès intenté à des officiers accusés de vouloir renverser le gouvernement. Dans une déclaration publiée par le quotidien Hurriyet, la Grande Muette dénonce la collusion entre la police, les procureurs généraux et les juges qui ont refusé d'entendre les prévenus et leurs avocats et fait disparaître des preuves. Surprise ! Un conseiller du Premier ministre, Yalcin Akdogan, va plus loin et parle d'un complot visant l'armée mais aussi d'autres institutions. Erdogan prend la relève quatre jours plus tard et se prononce en faveur de la révision du procès.


Nul n'est dupe de ce retournement. S'il a été opéré, dit-on à Ankara, c'est parce que le pouvoir a perdu depuis quelque temps son principal allié, Fethullah Gülen, avec lequel il ferraille depuis décembre, date à laquelle les forces de sécurité et la justice – notoirement acquis, soutient l'entourage du chef du gouvernement, au prédicateur retranché depuis une quinzaine d'années dans les montagne des Poconos (Pennsylvanie) – ont opéré une série de rafles qui ont coûté leurs postes à des ministres. En réaction, des têtes sont tombées dans les rangs de la maréchaussée et de la magistrature, ce qui a accru le malaise ambiant et affaibli encore plus le leader du Parti de la justice et du développement (AKP), que ses adversaires attendent au tournant lors des élections municipales du 30 mars puis de la présidentielle du 10 août.


Toujours soucieuse de devancer les desiderata des autorités, la justice s'est dépêchée de libérer en week-end l'ancien chef d'état-major Ilker Başbuğ, détenu depuis vingt-six mois dans le pénitencier de Silivri, une mesure dont devraient bénéficier bientôt d'autres hauts gradés. Stratège de la politique à la hussarde, Erdogan croit pouvoir s'appuyer sur les généraux dans l'impitoyable duel qui l'oppose à Gülen et qui ne peut se conclure que par un vainqueur et un vaincu. Or, arbitre – et même partie – malgré elle, l'armée a déjà fait savoir qu'elle refuserait de sortir de ses casernes, après l'avoir fait à quatre reprises entre 1960 et1997. « Le peuple turc a très vite compris que nous n'avions aucun intérêt à tenter un coup d'État », a dit le général Başbuğ à sa sortie de prison. Un rappel qui vaut pour le passé mais qui semble aussi s'adresser à ceux qui voudraient se tourner vers ceux qu'ils combattaient hier.


Bien sûr, la tentation est toujours là et l'armée pourrait y succomber. Mais elle en fixerait, à n'en pas douter, le prix. Elle prendra aussi son temps, un élément qui joue en sa faveur puisque chaque jour qui passe apporte son lot de scandales et de problèmes. Dimanche, les Turcs ont eu droit à une nouvelle rafale d'ennuis : un enregistrement mettant en cause un ex-ministre soudoyé par un homme d'affaires connu et un non catégorique du chef de l'État Abdullah Gül à toute limitation des réseaux sociaux.
Quelqu'un aurait-il une parade miracle aux escadrilles ?

 

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commentaires (3)

Tous sont comme ça ! Ils commencent "démocrate", puisse par un stade Autocrate pour terminer enfin à la Porte !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

16 h 02, le 11 mars 2014

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Commentaires (3)

  • Tous sont comme ça ! Ils commencent "démocrate", puisse par un stade Autocrate pour terminer enfin à la Porte !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    16 h 02, le 11 mars 2014

  • PRIS DANS SES PROPRES FILETS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 39, le 11 mars 2014

  • "Quelqu'un aurait-il une parade miracle aux escadrilles?" ! Oui, de nouvelles élections législatives générales et anticipées.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    07 h 57, le 11 mars 2014

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