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Liban - En toute liberté

Dans l’épaisseur de nos maquis...

Dans l'épaisseur de l'actualité politique ou militaire qui nous entoure, une guerre de maquis est livrée à notre intelligence, à notre besoin de comprendre et de maîtriser notre destin, aussi bien individuel que national, à notre droit de savoir ce qui se passe réellement.


Israël effectue un raid. Le chef de l'État perd la face aux yeux de la communauté internationale en convoquant, sans autres suites, le chef d'état-major de l'armée et son adjoint à Baabda afin d'obtenir « le maximum de renseignements » sur cette opération. On ne parle plus que de ce « mystérieux bombardement », de son « message » et de ses objectifs. Nous devons attendre deux jours pour que le Hezbollah daigne nous informer que le raid a visé une de ses bases frontalières, près de Janta. Pire, c'est par une dépêche venue d'Israël que nous apprenons que le Hezbollah possède là une sorte de plaque tournante militaire avec la Syrie et une base d'entraînement et que le raid pourrait avoir des conséquences sur la bataille en cours dans le Qalamoun. L'État hébreu doit en posséder des photos aériennes depuis longtemps et même savoir où en sont les toilettes. Mais pas l'armée libanaise, ni le chef de l'État. Cet incident à lui seul devrait permettre de comprendre l'irritation de Michel Sleiman et la cinglante répartie à Kaslik contre la « langue de bois » d'un parti « sûr de lui et dominateur » qui traite ainsi les institutions de sa patrie et le chef de l'État, symbole de son unité. Et la base de Janta n'est certainement pas le seul secret militaire – de Polichinelle – détenu par le Hezbollah et largement connu d'Israël, mais dont l'armée libanaise ne sait toujours rien. La résistance contre Israël a fait naufrage dans une résistance contre l'État. Deux armées, sinon deux États, coexistent au Liban. Pour combien de temps encore ?


Nous avons probablement tous vu à la télévision ou sur YouTube les images de la colonne de cent soixante-quinze combattants islamistes décimée sur le chemin de Yabroud dans un traquenard tendu par des forces « alliées » au régime syrien. Peut-être celles du Hezbollah. Le sentier qu'elle empruntait était miné. Mais on peut douter que tous ces combattants soient morts sur-le-champ. Une grande partie d'entre eux ont dû agoniser sans secours ou être achevés. Mais cette partie de l'opération est sans doute restée invisible pour préserver l'impression de propre de ce massacre. Mais une guerre sans prisonniers, ce n'est pas une guerre. C'est un crime de guerre. Une guerre sans prisonniers, c'est un retour à la horde. Ainsi, on comprend mieux pourquoi John Kerry accuse le régime Assad de se livrer à « une tuerie en série de son peuple » ; pourquoi il affirme que « tout le monde sait que ce qu'il fait est scandaleux, impensable, inadmissible, honteux, veule et affreux » (L'Orient-Le Jour du 28 février).


Avec la déclaration ministérielle, l'écran de fumée qui nous empêche de mesurer les enjeux n'est pas très différent. Nous avons tous les soirs un rapport de terrain du maquis linguistique où se déroule cette bataille, tandis que la patrie est abandonnée, ensanglantée et moribonde, au bord du chemin. La sortie de l'État de nature vers les institutions peut bien attendre. La loi de la jungle arrange quelques-uns, dont probablement quelques marchands d'armes.


Même abjection au Liban-Nord où quelques cyniques criminels, identifiables et identifiés, s'amusent à mutiler des Libanais de confession alaouite, sortis de leur quartier pour travailler à Tripoli, en leur fracassant les jambes d'une rafale de kalachnikov. Dans les rues de Jabal Mohsen, soixante-neuf hommes ont déjà été victimes de cette punition collective arbitraire qui les condamne aux béquilles, en représailles aux attentats à la voiture piégée devant deux mosquées de Tripoli, durant la prière du vendredi, en août dernier. Un véritable crime contre l'humanité – supposé en corriger deux autres – qui rappelle les sinistres sanctions collectives que les nazis imposaient dans leurs camps de concentration.


Tout n'est pourtant pas noir chez nous. Ainsi, le surprenant conseil donné, selon la NTV, par l'un des auteurs d'un attentat-suicide dans la banlieue sud à une conductrice qui lui demandait sa route, de ne pas prendre la rue qu'il empruntait. Dernier éclair de conscience, ultime réflexe humain de la part d'un jeune condamné qui, l'instant suivant, allait dévaster un quartier et entraîner dans sa mort celle de plusieurs inconnus.
C'est de ce clair-obscur, de cette ambiguïté entre ce qui se construit et ce qui se détruit, entre l'enjeu local et les enjeux internationaux, entre la répétition du passé et une véritable percée vers l'avenir, que sont faites nos semaines. Ce sont nos vies qui passent là.

Dans l'épaisseur de l'actualité politique ou militaire qui nous entoure, une guerre de maquis est livrée à notre intelligence, à notre besoin de comprendre et de maîtriser notre destin, aussi bien individuel que national, à notre droit de savoir ce qui se passe réellement.
Israël effectue un raid. Le chef de l'État perd la face aux yeux de la communauté internationale en convoquant,...

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LE NAVIRE Où LES MOUSSES S'EMPARENT DE LA SALLE DE COMMANDEMENT ET DE PILOTAGE EST VOUÉ AU NAUFRAGE... SI LE RESTE DE L'ÉQUIPAGE LAISSE FAIRE...

LA LIBRE EXPRESSION

09 h 19, le 04 mars 2014

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Commentaires (3)

  • LE NAVIRE Où LES MOUSSES S'EMPARENT DE LA SALLE DE COMMANDEMENT ET DE PILOTAGE EST VOUÉ AU NAUFRAGE... SI LE RESTE DE L'ÉQUIPAGE LAISSE FAIRE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 19, le 04 mars 2014

  • Sans parler des aspirations du Libanais, qu’est-ce qui a contrecarré les plans du hézébbb et de sœur-syrie ? Inutile de dire que leurs conquêtes ne cessaient de s’étendre. Et que le retrait israélien leur a livré la forteresse des monts libanais, leur assurant la maîtrise de ce Kottor-contrée et les droits sur celui-ci que l’aSSadique Père et le fakkîh avaient essayé à (ä) Israël d’arracher. De la téléphonie Per(s)cée relie dans ce pays leurs forces éparses et leurs ressources aumônées Per(s)cées. Les villes de Nabattïyéh, Laodicée et Ddâhïyéh dominent les cours du Lîttânéh et du Äâsséh ; offrant une base d’attaque vers ces Cazas libanais. Leur propagande a marché de pair avec la ruine de ce Pays, et ce qu’elle signifie, on en a eu un avant-goût en 90 quand celui-ci fut submergé, et Beyrouth dévastée par une barbarie qui luttait sous 1 loques bääSSdiote ! Ces crimes commis ont suscité un engouement puissant pour eux de l’autre côté de Kirïyét- shmônéh. Leur plan demeure inchangé, leurs moyens ont même crû, mais 1 seule chose est restée en travers de leurs trachées, et Père aSSadique a vu le défaut de sa cuirasse quand il s’exclamait que, pour conquérir ce Pays, seules des âmes manquaient à ces fakkîhdio-bääSSyriens. Eh bien, cet esprit vivifiant qui leur manque tant sera infusé à leurs carcasses, si tous les éhhh Libanais devenaient à dieu ne plaise des sbires aSSadico-fakkihistes !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    06 h 08, le 04 mars 2014

  • "La résistance contre Israel a fait naufrage dans une résistance contre l'Etat". Très bien dit. Et cette résistance contre l'Etat a fait naufrage dans une alliance avec un régime nazi en une guerre atroce contre son peuple. Et dans les guerres nazies, "il n'y a pas de prisonniers", il n'y a que des "crimes de guerre". Et c'est cette "résistance" qui va de naufrage en naufrage, et qui cause directement le naufrage du Liban, que les caciques du Hezbollah comme le député Hassan Fadlallah veulent maintenant nous imposer comme "constante essentielle du Pacte national" (sic). Oh patience où es-tu ?

    Halim Abou Chacra

    06 h 00, le 04 mars 2014

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