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À La Une - Ukraine

Folle journée en Ukraine: Ianoukovitch destitué, Timochenko libérée

Le président dénonce un "coup d'Etat".

Ioulia Timochenko s'adressant à la foule dans le centre de Kiev. David Mdzinarishvili/Reuters

Le sort de l'Ukraine a basculé samedi au cours d'une folle journée qui a vu quasi-simultanément la destitution de facto du président Viktor Ianoukovitch et la libération-surprise de l'opposante Ioulia Timochenko, qui est immédiatement revenue à Kiev.

"Vous êtes des héros, vous êtes les meilleurs d'Ukraine !", a lancé en larmes l'opposante, coiffée de sa typique tresse blonde enroulée et assise sur un fauteuil roulant devant quelque 50.000 personnes serrées sur le Maïdan, la place de l'Indépendance, haut lieu de la contestation.

L'ex-Premier ministre, égérie de la Révolution orange en 2004, qui était emprisonnée depuis 2011 pour abus de pouvoir, leur a demandé de poursuivre le combat. "Si quelqu'un vous dit que c'est terminé et que vous pouvez rentrer chez vous, n'en croyez pas un mot, vous devez finir le travail", leur a-t-elle demandé.

Les violences qui ont culminé cette semaine ont fait 80 morts après trois mois de crise aigüe, un niveau de violence inédit pour ce jeune pays issu de l'ex-Union soviétique.

(Portrait : Ioulia Timochenko, la dame de fer ukrainienne retrouve la liberté

Au cours d'une journée échevelée, les députés du Parlement ont décidé de la "libération immédiate" de l'opposante. Peu après, ils votaient ce qu'ils ont présenté comme une vacance du pouvoir justifiant une destitution de facto du chef d'Etat et l'organisation d'une présidentielle anticipée le 25 mai. "Le président Ianoukovitch s'est écarté du pouvoir et ne remplit plus ses fonctions", selon la résolution adoptée par le Parlement.

Mais, de Kharkiv (est), l'intéressé, élu en 2010 et dont le mandat court jusqu'en mars 2015, a assuré qu'il n'avait nullement l'intention de démissionner. "Le pays assiste à un coup d'Etat (...). Je suis un président élu de manière légitime", a-t-il souligné dans une allocution télévisée enregistrée à une date inconnue et diffusée par une chaîne régionale.

Alors que l'accord qu'il a conclu vendredi prévoit qu'il entérine rapidement des mesures adoptées par le parlement en vue de la formation d'un gouvernement d'union nationale, Viktor Ianoukovitch a souligné qu'il n'allait "rien signer avec les bandits qui terrorisent le pays".

On ignorait cependant samedi soir où se trouvait M. Ianoukovitch. Selon le nouveau président du Parlement, Olexandre Tourtchinov, l'ex-chef d'Etat se cacherait dans la région de Donetsk (est), dont il est originaire. "Il a essayé de prendre un avion à destination de la Russie, mais il en a été empêché par des gardes-frontières", a-t-il déclaré.

 

"Extrémistes et pillards"

Les réactions ont aussitôt fusé. "Ianoukovitch a été mis KO", s'est réjoui l'un des principaux responsables de l'opposition ukrainienne, le champion du monde de boxe poids-lourds, Vitali Klitschko, qui pourrait être amené à jouer un rôle politique important dans les prochains mois.

La Russie a accusé l'opposition de ne pas avoir "rempli une seule des obligations" figurant dans l'accord signé vendredi avec le président et dénoncé "les extrémistes armés et les pillards dont les actes constituent une menace directe (pesant) sur la souveraineté de l'Ukraine".

Côté européen, le ton était radicalement différent. "Il n'y a pas de coup d'Etat à Kiev. Les bâtiments officiels ont été abandonnés. Le président du Parlement a été légitimement élu", a twitté le ministre polonais des Affaires étrangères Radoslaw Sikorski, qui a participé cette semaine aux négociations entre opposition et pouvoir.

(Reportage : Les Ukrainiens découvrent, bouche bée, le train de vie luxueux de leur ex-président)

La Maison Blanche a pour sa part salué samedi la libération de Ioulia Timochenko et rappelé qu'il revenait aux Ukrainiens de "déterminer leur propre avenir".

A Kiev, si les manifestants se sont bien gardés de démonter les barricades qui hérissent plusieurs rues du centre-ville, l'ambiance était plus légère après le ralliement de la police à la cause des manifestants et la "neutralité" annoncée de l'armée.

 

Menace sur l'intégrité territoriale

Mais l'Ukraine, de l'avis général, est loin d'être tirée d'affaire.

A Kharkiv, ville de l'est du pays, des responsables locaux des régions pro-russes de l'est ont remis en cause la "légitimité" du Parlement ukrainien, qui selon eux travaille actuellement "sous la menace des armes". "L'intégrité territoriale et la sécurité de l'Ukraine se trouvent menacées", ont-ils estimé. L'Ukraine, 46 millions d'habitants, est divisée entre l'est russophone et russophile, majoritaire, et l'ouest nationaliste et ukrainophone.

Le Premier ministre polonais Donald Tusk a estimé samedi soir qu'il existait des forces menaçant l'intégrité territoriale de l'Ukraine, sans préciser leur nature. "Je ne le dis pas pour faire peur à qui que se soit, mais on voit clairement qu'il existe des forces souhaitant remettre en question l'intégrité de l'Ukraine", a-t-il déclaré. "Il faut que l'on dise de façon ferme et claire que ce scénario n'est pas envisageable, mais les menaces sont réelles", a-t-il dit.

Même s'il retrouve le calme et un semblant de stabilité politique, le pays se trouve en outre dans une situation économique qualifiée cette semaine d'"épouvantable" par le chef de la diplomatie française Laurent Fabius.

Les bouleversements de la journée risquent fort de remettre en cause la promesse par la Russie d'un crédit de 15 milliards de dollars, dont seuls 3 mds ont été versés et d'un important rabais du prix du gaz. Les Européens ont promis une assistance financière beaucoup plus modeste, d'environ 610 millions d'euros.

Le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague a indiqué s'être entendu avec son homologue allemand pour faire pression pour le déblocage d'une "aide financière vitale du Fonds monétaire international".

 

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Le sort de l'Ukraine a basculé samedi au cours d'une folle journée qui a vu quasi-simultanément la destitution de facto du président Viktor Ianoukovitch et la libération-surprise de l'opposante Ioulia Timochenko, qui est immédiatement revenue à Kiev."Vous êtes des héros, vous êtes les meilleurs d'Ukraine !", a lancé en larmes l'opposante, coiffée de sa typique tresse blonde enroulée...

commentaires (6)

Une gifle tonitruante a Poutine. Un avant gout de ce qui attend son "protege", qui largue des barils sur des civils. Mais on est loin d'être sortis de l'auberge en Ukraine. Conflit latent entre Russes et Americains. Guerre froide qui revient au galop. L'Histoire se repete.

Tabet Karim

09 h 50, le 23 février 2014

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Commentaires (6)

  • Une gifle tonitruante a Poutine. Un avant gout de ce qui attend son "protege", qui largue des barils sur des civils. Mais on est loin d'être sortis de l'auberge en Ukraine. Conflit latent entre Russes et Americains. Guerre froide qui revient au galop. L'Histoire se repete.

    Tabet Karim

    09 h 50, le 23 février 2014

  • Malgré certains débordements à déplorer du côté des opposants, c'est ce qu'on appelle une bataille gagnée, même si le travail n'est pas encore tout à fait terminé et en espérant qu'il n'y ait pas de retournement de situation. C'est ce qu'on appelle de la résistance. C'est ce qu'on appelle aimer et servir son pays. Tout le contraire de la répression sanglante d'un régime nazi, de l'emprisonnement politique, du massacre d'innocents, de la trahison de certains mercenaires qui vendent leur pays, bref, tout le contraire de ce que certains illuminés simples d'esprit appellent victoires en comptant les points bêtement, fous de joie, à chaque goutte de sang versé. Un dictateur qui réussit à imposer sa loi, c'est un échec pour le pays et son peuple. Un peuple qui réussit à se débarrasser de son régime totalitaire, c'est une victoire pour la nation, à condition qu'elle sache ensuite gérer son destin et vivre normalement et en toute liberté.

    Robert Malek

    03 h 38, le 23 février 2014

  • C'est c'la, oui ! Tout comme avant lui Ben Ali & conSorts et tutti-quanti ! !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    18 h 36, le 22 février 2014

  • L'OURS PAIE LES FAUTES COMMISES AILLEURS... ET POUR TOUS LES AILLEURS AUSSI : RIRA TOUJOURS BIEN QUI RIRA LE DERNIER...

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 42, le 22 février 2014

  • Enfin avec le départ de Viktor Ianoukovitch l'Ukraine pourra revivre une nouvelle aube d'indépendance .

    Sabbagha Antoine

    14 h 18, le 22 février 2014

  • C'est ce qui devrait aussi etre fait chez nous. Bravo aux opposant ukraines, a leur tenacite et courage et a leur refus de compromis vaseux.

    Tabet Karim

    14 h 15, le 22 février 2014

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