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Nos Lecteurs ont la Parole - Jean-Pierre Nicolas KHOURI

I. - Réflexions sur le communautarisme

Selon l'historien et économiste Georges Corm, ancien ministre des Finances, il semble que le Moyen-Orient soit parmi les régions les plus « communautarisées » du monde. Devant l'image transparente de la démocratie libanaise qui abrite dix-huit communautés, des pays arabes, tels que l'Égypte, la Syrie, l'Irak, la Jordanie et j'en passe, sont tributaires de communautarismes omniprésents masqués toutefois par les régimes musclés qui les gouvernent et les idéologies sommaires dont ils se réclament.
Cet héritage, issu de la gestion ottomane et de l'influence des puissances mandataires, laisse la porte ouverte à de nombreuses combinaisons territoriales et étatiques. Ne vit-on pas, en ce moment, l'effritement ultime de l'ordre colonial dans un monde qui se transforme, et ce dans la globalité ? Les mondialistes doivent en être enchantés !
Si l'on désirait entrevoir un peu, à travers la crise libanaise, comment se situent politique et communautés, il faudrait introduire la notion de tempérament politique. On peut alors comprendre les attitudes des différentes parties vis-à-vis du pouvoir et de l'État.
À mon avis, considérer la bipolarité religieuse (islam et chrétienté) comme la composante essentielle de l'espace politique libanais donne une description biaisée, rigide et pauvre de l'État, de ses prérogatives et de son pouvoir. Le graphique ci-dessous, qui s'inspire des travaux de l'éminent psychologue britannique H. Eysenck (1), montre bien que l'approche devient plus exacte et plus nuancée lorsqu'on introduit une nouvelle dimension : la dualité rurale-urbaine, comme une autre facette de l'espace politique, qui se trouve alors enrichi et plus souple. On remarquera dans ce graphique que l'espace politique prend en compte les antagonismes, mais aussi les similitudes.
Évidemment, les travaux d'Eysenck se basaient sur des statistiques alors que notre approche ne l'est malheureusement pas. Nous n'avons procédé à aucun sondage d'opinion. Cependant, leur aspect qualitatif se base sur une approche empirique où l'appréciation présumée des majorités donne à chacune des parties sa spécificité propre. Suivant cette représentation, la chrétienté rurale serait représentée par les maronites, l'islam rural par les chiites et les druzes, la chrétienté urbaine par les Byzantins, l'islam urbain par les sunnites. C'est alors qu'intervient la notion de tempéraments politiques générateurs de la lutte et de l'évolution politique, l'axe rural étant un tempérament dur (agriculteurs, fermiers,villageois), l'axe urbain un tempérament doux (commerçants, hommes d'affaires, bourgeois). L'espace politique ainsi structuré est plus compréhensible et traite de façon plus judicieuse les sensibilités culturelles et identitaires. Du reste, l'essence même de ces tempéraments a une connotation sociologique davantage que psychologique et s'adapte facilement au contexte participatif des régimes démocratiques.
Il est important de noter que la communauté druze a une certaine tendance au repli sur soi, faisant coïncider sa limite géographique avec ses limites sociales. C'est cette attitude qui a suivi les conflits entre druzes et sunnites en Syrie où leur territoire prit le nom de Djebel druze.

(à suivre)

Jean-Pierre Nicolas KHOURI

(1) Le principe de notre graphique est issu de l'ouvrage de M. Duverger : « Introduction à la politique ».

Selon l'historien et économiste Georges Corm, ancien ministre des Finances, il semble que le Moyen-Orient soit parmi les régions les plus « communautarisées » du monde. Devant l'image transparente de la démocratie libanaise qui abrite dix-huit communautés, des pays arabes, tels que l'Égypte, la Syrie, l'Irak, la Jordanie et j'en passe, sont tributaires de communautarismes omniprésents...

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