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Culture - Échos du Salon avec l’AFEG

Amin Maalouf, ou le pèlerinage au pays du Moi et de l’Autre

La route de la pensée mène vers l’Autre... Photo Michel Sayegh

L’Agora croulait sous la foule. Des centaines de personnes étaient littéralement suspendues aux lèvres d’Amin Maalouf. Celui-ci évoquait son parcours d’écrivain émérite.
Ses origines polyvalentes, ses rencontres fortuites, ses décisions hasardeuses de partir sous d’autres cieux plus cléments, de mettre sa plume de journaliste au rancart et de s’adonner entièrement à la littérature romanesque... autant de prédestinations qui ont balisé sa route en direction de... l’Académie française.
Les routes! Celles de l’exil le ramènent au pays. Celles du passé le projettent dans l’avenir. Celles de la pensée le mènent vers l’Autre, étape décisive avant de lui assurer un retour vers son Moi. Ses pérégrinations sur le papier sont d’éternelles «croisades» intellectuelles qui font passer Maalouf de l’autre côté de l’imaginaire, mais surtout d’une meilleure perception de soi et d’autrui.
Georgia Makhlouf l’interroge sur ses origines. C’est un terme qu’il préfère à celui de «racines», trop astreignant à son goût, puisqu’il contrevient à ses élans de liberté et d’émancipation. « Je suis comme tous les Libanais, né avec trois langues dans la bouche », rappelle-t-il avec un sourire amusé. Une dictée rédigée sous l’autorité de son père lui inculqua à jamais les règles de l’orthographe arabe pourtant si alambiquée. Depuis, les fautes n’ont plus eu gain de cause sur ses pages. L’anglais est une tradition immuable qui se perpétue dans la famille depuis que son grand-père était écolier dans un établissement presbytérien: toutes les générations suivantes intégreront d’office l’Université américaine au point qu’un appartement fut loué rue Jeanne d’Arc à proximité de l’institution si prisée. Le français, lui, vient en héritage de la famille de sa mère. Celle-ci vivait en Égypte où, à l’époque, la langue de Molière imposait ses lettres de noblesse. Et Amin Malouf, à son tour, prescrira «son» français aux... Français (!), puisqu’à l’Académie, il prit le taureau par les cornes, ainsi qu’il l’affirme, et soumit son éminent auditoire à un déferlement de «r», rappelant à qui voulait l’entendre que ce «roulement vous revient de vos ancêtres qui sont allés au Liban».
Au passage, une question fuse: «Pourquoi Constantinople vous est-elle si chère?» Et ceci de susciter un surplus de souvenirs: «La famille de ma grand-mère maternelle, originaire de Saïda, a émigré en Turquie. Il y a toujours eu dans notre histoire des maisons abandonnées... » ainsi que des oncles partis sans jamais revenir, remplacés par des légendes tenaces qui les faisaient élire présidents de la République ! Et leur attribuent, au passage, quelques-uns des traits de ces héros qui parcourent les livres de Maalouf. Léon l’Africain, Omar el-Khayyam,... autant de personnages qui ont fait un bout de chemin avec Maalouf au gré de son imagination, de ses souvenirs, mais aussi de son propre destin. «Je suis timide. Je ne peux parler qu’à travers un personnage, en lui prêtant un peu de mes sentiments, mais en respectant les siens. Leurs vies sont des paraboles de ce qui m’arrivait », avoue-t-il. À comprendre : ce qui arrivera à Amin Maalouf donnera lieu à un supplément d’écrits... autobiographiques !
... Le temps aurait bien pu suspendre son vol que personne n’aurait pris garde, tellement les personnes présentes était assoiffées des paroles de l’académicien. Hélas, non. La sentence est irrévocable. Ce chapitre du Salon du livre est bien terminé. Maalouf range ses mots. Seul le mot «fin» est oublié.

Nidal AYOUB
L’Agora croulait sous la foule. Des centaines de personnes étaient littéralement suspendues aux lèvres d’Amin Maalouf. Celui-ci évoquait son parcours d’écrivain émérite. Ses origines polyvalentes, ses rencontres fortuites, ses décisions hasardeuses de partir sous d’autres cieux plus cléments, de mettre sa plume de journaliste au rancart et de s’adonner entièrement à la...

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