Rechercher
Rechercher

Liban - Éclairage

Pour les milieux du Futur, la rhétorique violente du Hezbollah fait voler en éclats les perspectives de partenariat

Les observateurs assidus de la rythmique politique locale auront constaté, depuis l’annonce de l’ouverture américaine sur l’Iran, une escalade progressive dans le discours du Hezbollah contre ses adversaires locaux du 14 Mars. Fin octobre, le secrétaire général du parti, Hassan Nasrallah, annonçait ainsi, ex cathedra, sa « victoire militaire » en Syrie, appelant, partant, le 14 Mars à « bien lire les nouveaux rapports de force » et à se soumettre, partant, à ses desiderata, en l’occurrence un cabinet d’union nationale selon la formule des 6-9-9, donc accordant le tiers de blocage au parti chiite, ainsi qu’un retour au triptyque en or « peuple-armée-résistance ».
Pas plus tard que mercredi, le chef du bloc parlementaire du Hezbollah, le député Mohammad Raad, a haussé d’un cran le ton du discours, en vitupérant contre le 14 Mars, le courant du Futur, les centristes et Achraf Rifi, tous unis dans une sorte de complot international à la solde de l’alliance sionisto-takfiriste contre l’axe de la résistance, en substance. Mieux encore, par-delà le retour aux accusations de trahison, Mohammad Raad en est surtout revenu à une certaine forme de violence verbale, voire de menaces directes, dont le Hezbollah avait pourtant quelque peu raréfié l’usage au cours des derniers mois.

Guerre d’intimidation
Qu’à cela ne tienne, le 14 Mars semble bien peu impressionné par les étalages de muscles du Hezbollah qui ne sont, selon des sources proches du chef du bloc du Futur, l’ancien Premier ministre Fouad Siniora, qu’une manifestation de plus d’une guerre psychologique menée par ce parti pour intimider les acteurs politiques qui ne partagent pas ses thèses. Ces sources proches de Fouad Siniora rapportent ainsi que la lecture condescendante de Nasrallah et le vieux discours menaçant, définitivement « passé de mode », tombé en désuétude, avec lequel Raad cherche à terroriser ses adversaires, font voler en éclats toute perspective de partenariat national et de dialogue. Il est clair, pour le chef du bloc du Futur, que le Hezbollah « déroge aux règles de la bienséance » et que cela est tout bonnement « inacceptable ». Selon ces sources, pour Fouad Siniora, las des accusations de trahison, des tentatives d’intimidation et autres menaces, le seul point de départ en vue d’un partenariat, c’est « la reconnaissance de l’autre en égal ». Partant, ajoutent ces sources, toute la rhétorique violente utilisée actuellement par le Hezbollah « ne mènera nulle part, et certainement pas à son objectif, en l’occurrence pousser le 14 Mars à une quelconque reddition ». Si le Hezbollah s’imagine réellement en position de force, comme le prétend Nasrallah, à l’ombre de sa prétendue victoire en Syrie, et puisqu’il considère que le chef du Front de lutte nationale, Walid Joumblatt, lui est totalement acquis, qu’il aille donc former le nouveau cabinet sans le 14 Mars, avec l’aide de M. Joumblatt.

Joumblatt au centre
Or c’est justement là que, selon les sources proches de M. Siniora, le Hezbollah se livre à de faux calculs et « a crié victoire trop tôt, au Liban comme en Syrie ». D’abord, ni le courant du Futur ni le 14 Mars ne sont intimidés par le discours va-t-en guerre du parti. Ensuite, Walid Joumblatt est loin d’être dans l’escarcelle du 8 Mars, comme le souhaiterait le Hezbollah. Au contraire, soulignent ces sources, M. Joumblatt a « prouvé, tout au long de son dernier entretien télévisé, qu’il était réellement centriste » : il a ainsi indiqué qu’il nommerait de nouveau Tammam Salam, au cas où ce dernier se récuserait, entre autres signes pour prouver qu’il se trouvait bien à égale distance des deux camps. En fait, l’équation établie par le chef du PSP serait la suivante, selon les sources proches de M. Siniora : pas de gouvernement sans le Hezbollah, pas d’échéance présidentielle sans le 14 Mars. Or cette posture, couplée à sa position hostile à Assad sur le dossier syrien, aurait surpris le parti chiite, ce qui explique sans doute que Mohammad Raad ait senti la nécessité de passer à l’offensive.

Dialogue sur un contentieux
Que faire ? Pour les sources proches du chef du bloc du Futur, s’il y a une incapacité à s’entendre sur les points suivants : le retrait du Hezbollah de Syrie, son retour à la déclaration de Baabda et le débat sur la question de l’arsenal du Hezb – qui sont des conditions sine qua non pour
former un cabinet d’union nationale avec le parti chiite –, il ne reste plus qu’à « reconnaître l’existence d’un contentieux » sur toutes ces questions. « Nous ne voulons ni nous insulter, ni nous disputer, ni faire parler les armes, ni avoir recours à une quelconque forme de violence, de quelque manière que ce soit », notent ces sources. C’est pourquoi toutes ces questions, qui découlent du problème originel de l’arsenal du Hezbollah, devraient être transférées à la table de dialogue, même si ce dialogue ne donnera peut-être pas de solution, et même si le processus doit prendre du temps. Tout au moins un dialogue national permettra aux différentes parties de s’asseoir à la même table et de discuter, de tenter de rechercher des points communs et d’essayer d’absorber la tension latente qui existe au niveau de la rue. Parallèlement, soulignent ces sources, un gouvernement – qui ne traiterait donc pas de tout ce contentieux – serait formé pour s’occuper des soucis des Libanais et stopper le processus d’effondrement de l’État et des institutions. Les sources proches de M. Siniora soulignent d’ailleurs que ce dernier est « attaché à la tenue de l’élection présidentielle dans les délais constitutionnels ».

Le Hezb vs Berry
Ces sources signalent enfin que « la partie acceptable de la dernière proposition Berry de dialogue a été torpillée par les derniers discours » de Nasrallah et Raad – en l’occurrence la partie qui ne portait pas sur les conditions formelles de formation du gouvernement, mais sur le dialogue au sujet de « l’interpénétration des dossiers libanais et syrien » (autre nom de l’ingérence du Hezbollah dans les batailles en Syrie), de la « stratégie de défense » et des « armes du Hezb ». « Nabih Berry travaille ces jours-ci comme juge chérié, et s’occupe d’affaires de mariage et de divorce. Surtout de divorce », ironisent ces sources, en allusion aux derniers coups d’épingles lancés par ce dernier contre le courant du Futur et Fouad Siniora. « Mais qu’il se rassure, le divorce n’aura pas lieu. Malgré les diversions que le 8 Mars tente de créer au sujet de l’espionnage israélien aux frontières, comme si ce dernier avait vu le jour hier alors que ces violations sont là depuis toujours, et comme si l’espionnage, avec toutes les technologies d’aujourd’hui, s’arrête encore à une question de frontières... », notent ces sources. Toute cette affaire suscitée par Nabih Berry et les pôles du Hezbollah vise en fait à occulter les problématiques essentielles : le contentieux sur le gouvernement et l’ingérence en Syrie, mais aussi toute l’affaire de la collusion du Parti arabe démocratique de Tripoli dans l’affaire du double attentat à la voiture piégée de Tripoli. « Assez de faire des tests de patriotisme aux Libanais en se servant du paramètre israélien ! Qu’on en finisse une fois pour toutes avec ces galéjades ! » ajoutent ces sources. Sans pourtant cesser de pratiquer, inlassablement, « la politique de la main tendue à tous les partenaires en vue de construire ensemble l’avenir ».

 

Lire aussi

Le Hezbollah appelle le 14 Mars à plus de « modération »

 

Hamadé : Mikati ne sera pas chef d’un gouvernement putschiste

 

Samir Frangié et Jean-Pierre Perrin discutent sans tabous du conflit syrien

 

Pour mémoire

Le temps de l’intimidation : débat sur « l’institutionnalisation de la violence » du Hezbollah
Les observateurs assidus de la rythmique politique locale auront constaté, depuis l’annonce de l’ouverture américaine sur l’Iran, une escalade progressive dans le discours du Hezbollah contre ses adversaires locaux du 14 Mars. Fin octobre, le secrétaire général du parti, Hassan Nasrallah, annonçait ainsi, ex cathedra, sa « victoire militaire » en Syrie, appelant, partant, le 14...

commentaires (4)

La politique au Liban sera plus juste ou pas !

Jaber Kamel

13 h 32, le 09 novembre 2013

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • La politique au Liban sera plus juste ou pas !

    Jaber Kamel

    13 h 32, le 09 novembre 2013

  • Trêve de billevesées SVP : Deux Négations ne formeront jamais une Nation....

    Antoine-Serge KARAMAOUN

    09 h 19, le 09 novembre 2013

  • L'EXTRÉMISME EST UN MAUVAIS CONSEILLER. ON BLÂME L'AUTRE PARTIE DE LE PRATIQUER... ET VOILÀ QU'ON Y TOMBE, LA TÊTE DEVANT, DEDANS. SI ON PREND LES HEZBOLLAHI SÉRIEUSEMENT SUR LEURS ACTIONS ET DÉCLARATIONS FANATIQUES... ET LE FAIT EST QU'ILS LE SONT... ET LES FUTURISTES SUR LEURS RÉACTIONS FANATIQUES DE REFUS COMPLET, ET LE FAIT MONTRE QU'ILS LE SONT... LE PAYS EST FINI... L'EMBLÈME : CHACUN CHEZ SOI ET TOUS ENSEMBLE ! MAIS MÊME CELA DEMANDERAIT DU DIALOGUE ET DE L'ENTENTE... SINON LES DIVISIONS UNILATÉRALES, QUI SONT À ÉVITER, CAR ELLES ENGENDRERAIENT DES GUERRES CIVILES DESTRUCTRICES ET LAMENTABLES... LIBANAIS DE TOUS BORDS : RÉVEILLEZ-VOUS !

    SAKR LOUBNAN

    08 h 50, le 09 novembre 2013

  • Partenariat ! Partenariat ! Le courant du Futur et le 14 Mars demandent au Hezbollah de respecter le partenariat ! Ces gens-là ne savent-ils pas que "partenariat" veut dire qu'ils s'agenouillent éternellement devant le Hezb divin ? Exactement comme Bachar le chimique exige du peuple syrie qu'il accomplisse son devoir : à genoux devant Assad "pour l'éternité" (lil'abad). Au lieu d'accomplir ce devoir, que font le courant du Futur et le 14 Mars ? Comme l'a insinué d'un visage en flammes terribles le chef du bloc parlementaire du Hezblocage, Son Excellence le député Mohammad Raad, le chef de l'Etat islamique d'Irak et de Syrie (DAECH), Abou Bakr el-Baghdadi, et un délégué de Netanayahu (parfois celui-ci en personne) se réunissent toutes les nuits, sur un yacht au large de Saida, avec Fouad Siniora et Fares Souaid, coordinateur du 14 Mars, dans le cadre du "complot sionisto-takfiriste contre l'axe de la résistance". Ah si le ridicule tuait ! Je l'implore au ciel tous les soirs.

    Halim Abou Chacra

    05 h 25, le 09 novembre 2013

Retour en haut