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À La Une - L’éclairage

En visite en Arabie, Sleiman veut tenter de débloquer le dossier ministériel

La visite que le président de la République Michel Sleiman devait effectuer hier en Arabie saoudite, en réponse à une invitation officielle du roi Abdallah, a été reportée à une date ultérieure, l’agenda du chef de l’État étant particulièrement chargé ces temps-ci. Des sources bien informées estiment que cette visite aura lieu au début de la semaine prochaine, plus précisément mardi, conformément à un accord définitif sur la date entre les parties concernées.


Selon des sources politiques bien informées, l’invitation du roi au président Sleiman, après le report de la visite qui était initialement prévue fin septembre, vise à réaffirmer la solidité des relations libano-saoudiennes, qui ne sont entachées d’aucune tare, en dépit du foisonnement d’interprétations qui a été avancé en vue de donner un sens quelconque à ce report. Certaines des composantes du 8 Mars ont en effet été jusqu’à considérer le report de la visite comme une réprimande de l’Arabie vis-à-vis des positions du chef de l’État sur les deux dossiers de la crise syrienne et de la formation du cabinet. Ou encore comme une gêne saoudienne d’un manquement de Sleiman à imposer au Hezbollah le retrait de ses combattants de Syrie en échange d’une participation au pouvoir, sur base du principe de la politique de distanciation prônée par Beyrouth.


Les contacts entre l’Arabie et le Liban ont mis un terme à toutes ces interprétations. Aussi les responsables saoudiens se sont-ils pressés d’inviter Michel Sleiman à Riyad dès la fin du déplacement du secrétaire d’État américain John Kerry, pour discuter avec le chef de l’État libanais des développements à venir à la lumière des entretiens effectués avec Kerry sur la crise syrienne et le dossier libanais. L’Arabie souhaite montre en effet, à travers la visite de Michel Sleiman, combien elle est préoccupée par le dossier libanais dans ces circonstances. Un ministre au sein du cabinet chargé de l’expédition des affaires courantes indique dans ce cadre que les deux parties avaient convenu de la nécessité de reporter la visite prévue en septembre, compte tenu de son incapacité à pouvoir donner les résultats escomptés à l’époque, notamment au niveau de la formation du nouveau cabinet, en raison des relations hypertendues entre Riyad et Téhéran et de l’insistance du Hezbollah à vouloir former un gouvernement selon ses conditions exclusivement. Or, dans le contexte actuel, cette visite revêt une dimension tout à fait différente, et ses résultats pourraient être fructueux, au lendemain des discussions saoudo-américaines.

 

(Lire aussi : Riyad et Washington minimisent leurs différends)


Mais que peut donc bien glaner le Liban de ses entretiens avec les dirigeants saoudiens? Selon une source diplomatique, les négociations américano-saoudiennes ont brisé le caillot de glace qui s’était formé dans les relations entre les deux pays. Le voyage de John Kerry marque donc un retour à la normale à ce niveau, c’est-à-dire aux rapports de partenariat solide et stable dans la stratégie et les objectifs. Les divergences d’ordre tactique entre les deux pays ne modifient pas la relation historique qui les unit, souligne cette source diplomatique, qui constate que le secrétaire d’État US a bien veillé à visiter Le Caire avant de se rendre en Arabie, dans ce qui constitue le premier contact à ce niveau entre l’administration US et le nouveau pouvoir égyptien après l’insurrection contre le régime Morsi. Il s’agit à n’en point douter d’une reconnaissance américaine du changement survenu en Égypte et d’un retour à une réconciliation entre l’administration et l’armée égyptienne, illustrée par la visite de John Kerry au ministre de la Défense, Abdel-Fattah al-Sissi, nouvel homme fort du régime.


Du Caire, le secrétaire d’État US a distribué un grand nombre de messages en direction de Riyad, soulignant la solidité des relations avec le royaume wahhabite en dépit des différences tactiques et de l’ouverture de Washington sur l’Iran, laquelle vise, a-t-il précisé, à trouver une solution au dossier nucléaire; tout comme le report de la frappe militaire contre la Syrie visait à créer un consensus autour de la destruction de l’arsenal chimique de Damas. L’Iran doit effectuer une démarche positive prouvant sa disposition à réintégrer le giron international, a souligné John Kerry, ajoutant que l’ouverture américaine sur Téhéran ne se ferait pas au détriment de la relation avec Riyad. Le responsable US a également exprimé certaines positions relatives au dossier libanais, notamment l’opposition de Washington à ce que ce soit le Hezbollah qui préside aux destinées du Liban. Il a appelé dans ce cadre le parti chiite à retirer ses combattants de Syrie, et Téhéran à rappeler ses pasdaran.

 

(Lire aussi : Riyad appelle Téhéran et le Hezbollah à "se retirer" de Syrie comme signe de bonne volonté)


Ces positions ont quelque peu désorienté le 8 Mars, qui avait fondé des espoirs sur les contacts américano-iraniens, perçus comme un basculement dans les équations et les alliances. Or c’est justement dans ce cadre que la visite du président Sleiman pourrait donner des résultats importants. Le chef de l’État souhaite rendre au Liban sa posture de conciliateur régional, et, partant, tenter de prôner un rapprochement saoudo-iranien, afin de désamorcer la situation au plan local et de paver la voie, ainsi, à la formation du gouvernement. Le chef de l’État devrait également prôner une séparation des volets libanais et syrien, dans le sens que le Liban puisse être épargné par les répercussions de la crise syrienne, en vertu de la déclaration de Baabda et du principe de neutralité. Dans le cas contraire, estime Baabda, le pays du Cèdre restera paralysé par le conflit irano-saoudien ; c’est d’ailleurs pourquoi le président de la Chambre Nabih Berry a appelé à une nouvelle entente « saoudo-iranienne » qui viendrait remplacer le projet d’entente « saoudo-
syrienne », aujourd’hui défunte avec l’implosion du régime Assad. Michel Sleiman pourrait même arpenter les chemins qui mènent à Téhéran à la lumière de ses entretiens de Riyad, dans le même effort visant à neutraliser le Liban des conflits régionaux et à apaiser les tensions sectaires sur la scène libanaise.


À la lumière des entretiens de Saad Hariri à Paris avec les pôles du 14 Mars, il paraît évident que le processus de formation du gouvernement est totalement bloqué. Le 14 Mars en est retourné à son antienne : un cabinet neutre, sans membres du 14 Mars ou du 8 Mars, et le transfert des dossiers politiques à la table de dialogue, du moins tant que le Hezbollah n’a pas retiré ses troupes de Syrie et n’a pas proclamé son allégeance à la déclaration de Baabda. Ce sont ces deux conditions qui devraient permettre d’ouvrir la voie à un cabinet pluriel et rassembleur qui inclurait 8 et 14-marsistes, mais formé selon les critères définis par le Premier ministre désigné Tammam Salam, loin des formules chères au Hezbollah, comme le tiers de blocage ou le triptyque peuple-armée-résistance, et loin de la stagnation au niveau des portefeuilles ministériels. Cet entêtement du 14 Mars serait la réponse aux positions incendiaires exprimées par le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, dans son dernier discours, et à ses appels lancés à la reddition du camp souverainiste...


C’est dans ce cadre que Tammam Salam sera reçu aujourd’hui à Baabda pour discuter avec le chef de l’État des derniers développements liés au processus de formation du cabinet après le dernier discours de Hassan Nasrallah et à la lumière des positions du 14 Mars. Des sources bien informées indiquent que M. Salam ne proposera pas de formule ministérielle au président Sleiman, mais se contentera d’annoncer qu’il poursuit ses efforts en tant que Premier ministre désigné et qu’il n’entend pas jeter l’éponge. Ira-t-il jusqu’à former un cabinet neutre à la lumière des développements régionaux, ou continuera-t-il à faire du surplace ? Toute la question est là, et deux hommes peuvent contribuer à y répondre plus clairement dans les heures à venir. Ils s’appellent Saad Hariri et Walid Joumblatt.

 

 

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