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À La Une - Témoignage

"A Damas, les gens ne comprennent pas : pourquoi frapper s’il ne s’agit pas de virer Assad ?

Salwa*, une jeune Syrienne résidant à Damas, revient sur l’atmosphère qui règne dans la capitale alors qu’Américains et Français poussent pour une frappe internationale contre le régime.

Damas, le 3 septembre 2013. AFP/LOUAI BESHARA

Q-Alors que la menace d'une frappe étrangère plane sur le pays, quelle est l'ambiance à Damas, les habitants continuent-ils de sortir ou limitent-ils leurs mouvements ?

"Les gens sortent, mais ils restent dans leur quartier, surtout parce que les transports à travers la ville relèvent du cauchemar total. Les check-point causent des embouteillages monstres. Parfois, des routes sont carrément fermées, et il faut contourner la ville pour pouvoir rentrer chez soi. Or certaines zones sur le pourtour de Damas sont dangereuses.

Même en tant que piéton, circuler peut être très compliqué. Il y a quelques jours, un nouveau check-point menaçant a été érigé sur tout le trottoir, et j’ai dû traverser une autoroute assez fréquentée pour marcher de l’autre côté".

 

 

-Les habitants de Damas ont-il pris des mesures particulières en prévision d’éventuelles frappes ?

"A chaque fois que Barack Obama parle, voire quand il est simplement annoncé qu’il va parler, les gens deviennent fous et commencent à stocker de la nourriture, anticipant une frappe dans la nuit à venir.

Aujourd’hui, je sais que beaucoup de familles ont acheté des provisions pour tenir un mois, de l’eau, des denrées non périssables et des piles. Certains aménagent leur cave aussi. De toutes les manières, beaucoup de familles ont déjà quitté la ville pour le Liban. Certains Syriens qui étaient partis sont revenus aussi et se plaignent qu’en l’absence d’une date pour les frappes, ils ne peuvent rien planifier".

 

 

 

Sur le mont Qassioum qui surplombe Damas, une jeune fille pro-Assad affiche son souhait de jouer les boucliers humains en cas d'attaque américaine. REUTERS/Khaled al-Hariri 

 

 

- Les Damascènes pensent-ils qu’une frappe va avoir lieu ?

"La plupart des gens pensent qu’une frappe aura bien lieu. Bien que la question soit encore sujette à débats. Les partisans du gouvernement disent qu’Obama est un lâche et qu’il ne va pas frapper, ils disent aussi qu’ils s’en fichent s’il frappe. Mais si vous observez le visage des membres des forces de sécurité et des soldats déployés dans toute la ville, vous verrez dans leurs yeux qu’ils sont convaincus qu’une frappe aura lieu, et ils ont peur.

En plus, des soldats et des membres des forces de sécurité se sont installés dans des écoles et des mosquées à travers la ville. Ils se réfugient au milieu des civils ! Ils squattent aussi des maisons vides dans plusieurs quartiers, et il va sans dire que les résidents sont consternés.

Pire encore, il y a eu un afflux à Damas de membres des forces de la sécurité de l’État qui ne connaissent pas la ville. Ils s’y perdent, dans leurs voitures toutes neuves offertes par le gouvernement. Ils conduisent comme des dingues en mettant la musique à fond, des chansons à la gloire d’Assad ou des choses du même acabit.

On a beaucoup montré ces deux Hummers qui circulent à travers la ville, parfois en fin de soirée. Ils sont peints aux couleurs du drapeau syrien, et diffusent des chants patriotiques via des baffles montées sur le toit du véhicule".

 

 

- Que pensent les habitants de la capitale une frappe ?

"C’est un des rares points sur lequel les gens sont d’accord, qu’ils croient ou non qu’une frappe va avoir lieu. La grande majorité se demandent que peut bien apporter une frappe. A Damas, les gens ne comprennent pas : pourquoi frapper s’il ne s’agit pas de virer Assad ? La plupart d’entre eux sont inquiets quant aux conséquences d’une frappe, même s’ils sont partisans d’une frappe d’ailleurs".

 

 

- Qu’en est-il de l’approvisionnement en essence, nourriture et gaz ?

"Le plus difficile est de trouver de l’essence, et ceci est probablement dû au fait que l’armée en consomme beaucoup. Tout le reste est disponible, même si les jours où les gens deviennent fous et stockent nourriture et pain, il est difficile de trouver des denrées dans les magasins. Mais le lendemain, tout est à nouveau disponible".

 

 

- Qu’en est-il de l’approvisionnement en électricité ?

"Aujourd’hui (mercredi) est le premier jour où nous avons dû subir une coupure d’électricité. (La quasi-totalité de la Syrie a été privée mercredi de courant à la suite d'un attentat contre une ligne de haute tension dans le centre du pays, a affirmé le ministre de l'Électricité, Imad Khamis, ndlr.)

Mais de manière générale, nous n’avons pas eu trop de problèmes d’électricité à Damas. Pas dans mon quartier du moins, et pas dans plusieurs quartiers en fait. En revanche, les quartiers comme Qaboun tenus par des rebelles subissent de grosses coupure".

 

 

Des fumeurs de Narguilé à Damas, le 3 septembre 2013. AFP/LOUAI BESHARA

 

 

-Que disent les Damascènes au sujet de l’attaque aux armes chimiques perpétrée le 21 août, à qui en font-ils porter la responsabilité ?

"Ca dépend de la personne à qui l’on pose la question. Les anti-régimes accusent le régime, les pro-régimes dénoncent un complot. Ils croient les histoires selon lesquelles les morts seraient en fait des gens qui ont été anesthésiés pour paraître morts, ou que les rebelles ont lancé eux-mêmes l’attaque…".

 

 

-En temps de crise, les rumeurs ont tendance à circuler intensément. Quelles rumeurs circulent à Damas ces jours-ci ?

"La rumeur qui circule le plus veut que les militaires aient fuit leurs casernes pour venir à Damas, et que des prisonniers et/ou des conscrits sunnites aient été enfermés dans les bases les plus susceptibles d’être visées par une frappe américaine. La première partie est vraie, nous savons que des militaires et des membres des forces de sécurité sont cachés parmi les civils à Damas, mais il est difficile de vérifier la seconde partie de cette rumeur".

 

 

*Le prénom a été modifié à la demande de l'interviewée.

 

 

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commentaires (6)

Mais ils n'ont RIEN compris ces "gens-là", yâ wâïyléhhh ! Il s'agit bien de le virer à cet aSSadiot-là, yâ äâïynéhhh....

Antoine-Serge KARAMAOUN

00 h 56, le 07 septembre 2013

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Commentaires (6)

  • Mais ils n'ont RIEN compris ces "gens-là", yâ wâïyléhhh ! Il s'agit bien de le virer à cet aSSadiot-là, yâ äâïynéhhh....

    Antoine-Serge KARAMAOUN

    00 h 56, le 07 septembre 2013

  • En effet, pourquoi frapper s'il ne peuvent rien changer sur le terrain?? il faut vraiment être con, non? (qui a dit comme d'hab?..). s'ils ont des tomahawk dont ils savent pas quoi faire, le hezb ou l'armée Libanaise peuvent s'enganger de les retirer pour en faire bon usage, promis (=éliminer des sionistes!!). The Président Assad, est en train à lui seul de changer le vieil ordre pourri mondiale du monopole de la force...et.. au plus bas mot, ses ennemis sont plus que jamais sur un siège éjectable claudicant... ou croupissent tel l'inglich cameron dans un profond discrédit national. Ben... Allah est grand, certes... mais il le Président Assad n'est pas petit!!

    Ali Farhat

    22 h 33, le 06 septembre 2013

  • ET SI C’ÉTAIT EN FAIT AUSSI ET ESSENTIELLEMENT POUR ÇA !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 47, le 05 septembre 2013

  • __ Le vent redouble ses efforts, __ Et fait si bien qu'il déracine __ Celui de qui la tête au ciel était voisine, __ Et dont les pieds touchaient à l'empire des morts. LA FONTAINE

    SAKR LOUBNAN

    11 h 46, le 05 septembre 2013

  • L'EXCUSE PEUT ÊTRE AUTRE... LE FOND NE CHANGE PAS !

    SAKR LOUBNAN

    11 h 27, le 05 septembre 2013

  • La façon la plus rapide de mettre fin à une guerre est de la perdre . A quel prix ?Un vrai drame . Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    11 h 07, le 05 septembre 2013

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