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À La Une - La situation

Au Liban, la sécurité a pris le pas sur tout le reste

Tous les services de sécurité du pays, jusqu’aux municipalités, sont sur le qui-vive.

Les travaux de déblayage se poursuivent à Roueiss parallèlement à la progression de l’enquête. Photo Hassan Assal

On attend toujours le résultat de l’expertise ; il n’est pas indifférent de savoir si la voiture piégée qui a explosé jeudi dernier à Roueiss était conduite par un commando-suicide ou si l’explosion a été télécommandée, soulignent des experts militaires, qui relèvent que les deux options relèvent de deux degrés de détermination différents des adversaires du Hezbollah, et reflètent donc le niveau d’hostilité auquel les deux forces sont parvenues et l’état de préparation dans lequel doit se trouver le Liban pour y faire face. Des attentats-suicide refléteraient notamment un état de « guerre totale » qui ne semble pas encore atteint, mais qui pourrait l’être si la dégradation de la situation devait se poursuivre et contre lequel il n’existe pas de formule magique.


Le secrétaire général du Hezbollah s’est une fois de plus trompé de ton, vendredi dernier, en martelant à la fin de son discours, au lendemain de l’attentat, que l’explosion ne modifiera pas sa détermination à se battre aux côtés de l’armée syrienne, mais qu’au contraire elle la renforce.
L’agence al-Markaziya a publié le lendemain une condamnation par l’Armée syrienne libre de ces menaces, se promettant de lui infliger « une leçon inoubliable ».


Un surcroît d’engagement du Hezbollah en Syrie, estiment en effet les analystes, devrait nécessairement entraîner un surcroît de coups qui lui seraient portés là où il est vulnérable : c’est-à-dire sur ses bases populaires, notamment dans la banlieue sud. Ses adversaires pourraient notamment vouloir ébranler la réputation d’invulnérabilité du « périmètre de sécurité » que le Hezbollah s’y est taillé.

 

(Lire aussi : Une voiture piégée retrouvée à Naamé et des informations sur la présence d’un second véhicule)

 


État de faiblesse
A contrario, l’engagement du parti chiite en Syrie démontre, si besoin est, l’état de faiblesse de l’armée syrienne, incapable de vaincre sans un appoint significatif venu de l’étranger, et démontre aussi à sa manière la régionalisation du conflit, sinon son internationalisation, mais pour le moment « à froid ».


L’attentat de Roueiss prouve enfin combien Hassan Nasrallah avait tort, qui croyait pouvoir restreindre les combats au territoire syrien, et garder le Liban à l’écart de la crise. Il démontre avec éclat que le terrain des combats est choisi aussi bien par le Hezbollah que par ses adversaires, et que si ces derniers peuvent l’atteindre au Liban, ils n’hésiteront pas à le faire, comme cela s’est produit à Roueiss.


Le Conseil central de sécurité qui s’est réuni samedi a d’ailleurs passé en revue toutes ces données et hypothèses. Dans le sillage de l’attentat de Roueiss – et précédemment de Bir el-Abed et ceux contre des convois du Hezbollah dans la Békaa – tous les services de sécurité du pays, jusqu’aux municipalités, sont depuis vendredi dernier sur le qui-vive, et c’est probablement le trait marquant de la phase actuelle en l’absence de progrès dans la formation du gouvernement, que le Hezbollah et ses alliés prétendent toujours vouloir contrôler, en y détenant le tiers de blocage.

 

(Lire aussi : Raï : Il est honteux de garder le Liban otage de l’épilogue de la crise syrienne)

 

Depuis vendredi donc, et en attendant du nouveau sur le plan gouvernemental, c’est la sécurité qui a pris le pas sur tout le reste. Naturellement, la psychose à la voiture piégée gagne le pays avec beaucoup de fausses alertes, mais des succès aussi, comme cela est arrivé à Naamé où, comme on le sait, des groupes palestiniens prosyriens tiennent depuis les années de guerre interlibanaise des positions fortifiées. En soirée, on a même annoncé hier l’arrestation d’un nouveau suspect, Fouad Akram Ghayad.


Mais même ses succès ne peuvent être savourés tranquillement, avec le risque de morcellement des services de sécurité signalé par le chef du PSP, Walid Joumblatt, qui a mis en garde contre « les tentatives de confessionnalisation des forces régulières et des services de sécurité (...) afin d’en faire des îlots servant à protéger telle ou telle autre communauté ».

 

(Lire aussi : Attentat de Roueiss : l’enquête sur les traces de plusieurs suspects)


La seule consolation dans ce paysage de désolation étant que toutes les forces politiques locales ont ouvertement ou tacitement condamné l’attentat de Roueiss, non sans que de clairs reproches soient adressés au parti de Hassan Nasrallah, dont l’engagement en Syrie « est une invitation adressée au terrorisme à frapper au Liban », selon les députés du courant du Futur Mohammad Kabbara et Jamal Jarrah.


L’attentat, à n’en pas douter, fait mal au Hezbollah et en particulier à son chef. Mais au-delà de toutes appartenances partisanes ou communautaires, il fait mal à des Libanais vaquant à leurs activités quotidiennes et se croyant à l’abri du malheur, et en particulier de ce malheur suprême qu’est la guerre.

 

 

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