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Moyen Orient et Monde - Grèce

Le racisme a quartier libre dans les rues d’Athènes

« Quatre personnes m’ont rattrapé dans la rue, l’une d’entre elles m’a tapé avec quelque chose au niveau de la tête. Je suis tombé, elles m’ont donné des coups. Quand elles ont fini, elles sont parties », raconte Omar, 28 ans.                Aris Messinis/AFP

Omar Diallo montre avec hésitation son crâne tuméfié. Le jeune homme est pourtant habitué à la violence. Il a fui son pays natal, la Guinée, après avoir connu la prison pour ses idées. Mais le racisme violent et décomplexé qui s’exprime dans les rues de la Grèce en crise, ça, il ne connaissait pas. Dans le quartier d’Athènes où il habite, où s’alignent des devantures de magasins vides, à louer ou à vendre, couvertes de graffitis, « il y a des zones, où nous n’avons plus le droit d’aller, ou alors seulement en groupe », car « nous subissons des intimidations » venues de groupes qu’il désigne sous le terme générique de « racistes », assure-t-il.
Son récit corrobore celui de beaucoup des 154 victimes d’attaques physiques violentes recensées dans des lieux publics en 2012 en Grèce, dont 107 à Athènes, par un réseau d’organisations non gouvernementales, soit plus d’un incident tous les trois jours. Il était seul : « Quatre personnes m’ont rattrapé dans la rue, l’une d’entre elles m’a tapé avec quelque chose au niveau de la tête. Je suis tombé, elles m’ont donné des coups. Quand elles ont fini, elles sont parties. » Pas de slogan raciste, pas de revendication, pas de traces. La police a fait transporter Omar à l’hôpital, où on lui a fait des points de suture sur le crâne. « Dans la vaste majorité des cas, les victimes sont étrangères et considèrent qu’elles ont été ciblées en raison de la couleur de leur peau », indique le rapport des ONG. Dans huit cas, les victimes affirment avoir reconnu des membres du parti néonazi Aube dorée, en raison des insignes qu’ils portaient sur eux, précise le rapport. Cette violence, parfois assortie d’insultes racistes, tétanise les témoins. « J’ai vu un jeune Pakistanais se faire battre sous mes yeux par deux colosses, qui ont remonté tout le couloir de bus pour l’aborder, avant de le jeter violemment dans la rue. Je ne suis pas intervenu, car j’ai eu peur », confesse mortifié un retraité français qui vit à Athènes depuis un an. Selon le rapport, seulement 24 victimes en 2012 sont allées déposer plainte à la police. Pour Omar, 28 ans, qui était étudiant en relations internationales à Conakry, pas de doute, l’augmentation des violences racistes « a commencé lorsque Antonis Samaras est arrivé au pouvoir », en juin 2012 : le parti néonazi Aube dorée « est entré au Parlement » avec 18 députés. « Ils se sont sentis forts politiquement. »
« Pratiquement chaque jour dans différents endroits du pays, particulièrement à Athènes, des attaques racistes ont lieu », résume Giorgos Tsabropoulos, qui dirige le Haut Comité aux réfugiés de l’ONU en Grèce. Les agresseurs « essaient de ne pas tuer, mais de provoquer des blessures visibles, pour répandre la peur dans les communautés », explique le Dr Nikitas Kanakis, secrétaire général de Médecins du monde en Grèce. Des photos d’un homme au dos lardé de coups de couteau ont fait le tour du monde. Il a aussi dénoncé le cas d’un enfant afghan de 14 ans, qui a eu le visage tailladé à coups de tessons de bouteilles dans un quartier bastion des néonazis à Athènes.
Le pouvoir exécutif condamne les agissements « inacceptables » du parti Aube dorée, qui est « clairement un parti néonazi », selon le ministre de l’Ordre public et de la Protection du citoyen, Nikos Dendias. Mais, alors que le pays peine à muscler son arsenal antiraciste et à se mettre d’accord sur un texte de loi pourtant souhaité par le conseil de l’Europe, le ministre, dans une interview récente à la BBC, affirme que son pays « n’a pas besoin de loi antiraciste ». Selon lui, l’influence d’Aube dorée et l’émergence de son discours xénophobe et raciste sont directement liées aux arrivées d’immigrants illégaux en Grèce « qui représentent un énorme poids » pour la société. Il demande une aide supplémentaire de l’UE pour gérer cet afflux. « Nous avons créé une brigade spéciale dans la police (pour lutter contre le racisme), (...) des enquêtes sont ouvertes pour crimes racistes et je pense que les gens qui agissent illégalement devraient aller en prison », dit-il.
Depuis l’hiver dernier, l’ambassade des États-Unis en Grèce met en garde sur son site Internet les touristes américains contre des « attaques violentes » visant « ceux qui, en raison de leur couleur de peau, sont perçus comme des migrants » en Grèce, et appelle à la prudence ses ressortissants à risque, « ayant des origines africaines, asiatiques, hispaniques ou moyen-orientales ».
(Source : AFP)
Omar Diallo montre avec hésitation son crâne tuméfié. Le jeune homme est pourtant habitué à la violence. Il a fui son pays natal, la Guinée, après avoir connu la prison pour ses idées. Mais le racisme violent et décomplexé qui s’exprime dans les rues de la Grèce en crise, ça, il ne connaissait pas. Dans le quartier d’Athènes où il habite, où s’alignent des devantures de...

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