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À La Une - L’éditorial de Issa GORAIEB

La guerre dans la guerre

Sans doute donnera-t-on un jour, à l’actuelle tranche d’histoire que vivent les Arabes, le nom d’ère de l’éparpillement, de la fragmentation. Ou pire encore, de la désintégration.

Car il ne s’agit plus seulement des sempiternelles divisions entre Libanais. Nous étions supposés initier nos voisins à la liberté et au respect des droits de l’homme, à la tolérance et la démocratie, à l’ouverture sur le monde extérieur. Ce sont au contraire nos empoignades qui ont trouvé à s’exporter ; querelles de clocher sont alors devenues féroces conflits de mosquées...

Plus sidérant que ce processus de cloisonnement est cependant l’atomisation au sein même de l’atomisation : phénomène qui couve, ou fait même déjà rage, en plus d’un pays arabe. Ainsi, la surenchère aux millions (de manifestants) que se livrent, sur les places du Caire, les foules égyptiennes ne doit pas faire illusion : il n’y a pas, en Égypte, que des islamistes, d’un côté, et une sainte alliance de démocrates, de l’autre. Tout islamistes qu’ils soient, les salafistes ont renié leurs Ikhwan de frères ; et si en ce moment libéraux, gauchistes et minorités religieuses chantent à l’unisson des louanges à l’armée, dont l’intervention fut décisive dans l’éviction du président Mohammad Morsi, les fausses notes ne tarderaient pas à fuser si les généraux, théoriques garants de la transition démocratique, laissaient traîner le processus et gardaient le pouvoir pour eux-mêmes.

C’est en Syrie cependant que la folle course des électrons libres est le plus frappante. Si Bachar el-Assad a tant besoin du Hezbollah et des pasdaran iraniens pour réprimer la rébellion, c’est parce que son armée n’est pléthorique que sur le papier et qu’une substantielle partie des effectifs, jugée infiable, est assignée à caserne et privée de munitions. Mais les choses ne sont guère moins complexes désormais dans le camp d’en face où l’on a trouvé moyen, en effet, d’instaurer une guerre civile dans la guerre civile, avec la volonté de l’Armée syrienne libre d’en finir avec les groupes radicaux liés à el-Qaëda.

Cette décision n’est guère dénuée d’aléas, puisqu’elle aura pour effet d’entamer, pour un temps du moins, la force de frappe hostile au régime. Elle était néanmoins devenue nécessaire, et pas seulement en raison des exactions commises par ces bandes fanatisées, et qui leur ont valu d’ailleurs la désaffection croissante de la population. En éliminant ces alliés à la réputation sulfureuse, c’est une respectabilité internationale nouvelle que se gagnerait en vérité l’ASL, en même temps que l’accès à un armement plus consistant.

Dans la guerre comme dans les blocs opératoires, un bras gangrené, ça s’ampute.

Issa GORAIEB
igor@lorient-lejour.com.lb

Sans doute donnera-t-on un jour, à l’actuelle tranche d’histoire que vivent les Arabes, le nom d’ère de l’éparpillement, de la fragmentation. Ou pire encore, de la désintégration. Car il ne s’agit plus seulement des sempiternelles divisions entre Libanais. Nous étions supposés initier nos voisins à la liberté et au respect des droits de l’homme, à la tolérance et la...

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