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Économie - Liban - Enquête

Festivals : contre mauvaise fortune bon cœur

Un contexte politico-sécuritaire local et régional délétère, des subventions publiques à l’efficacité douteuse, une rentabilité minime : organiser un festival est un véritable parcours du combattant.

Les festivals attirent chaque année des milliers de spectateurs et se chiffrent à des millions de dollars.

« Notre ambition n’est pas de gagner de l’argent – c’est de ne pas en perdre », annonce d’emblée l’organisateur du Festival de Byblos, Naji Baz.
Interrogés par L’Orient-Le Jour, les responsables de certains des plus grands festivals du pays sont unanimes : organiser ces événements n’est pas rentable. Tout au plus parviennent-ils à finir dans le vert, jonglant entre sponsors et subventions publiques. Et encore.
« Le festival serait rentable si la subvention de l’État, supposée représenter 33 % du budget global, était payée à temps (la même année). Or, cette subvention nous parvient deux ans en retard, et elle est à un taux de 17 % au lieu de 33 %. Ce qui nous oblige à contracter un prêt bancaire à un taux prohibitif pour pouvoir tenir le coup, en attendant le versement de la subvention », souligne la présidente du Festival de Beiteddine, Nora Joumblatt.
« Nous n’avons toujours pas reçu les subventions pour les années 2011 et 2012 », renchérit la présidente du Festival de Zouk Mikaël, Zalfa Boueiz. « Des documents ont été perdus par l’administration publique, etc. Heureusement, nous avons pu être soutenus par les sponsors, qui ont permis d’amortir les frais... », ajoute-t-elle.

Coûts énormes + rentabilité minime = pari risqué ?
Les festivals attirent chaque année des milliers de spectateurs et se chiffrent à des millions de dollars. Ainsi, le budget total du Festival de Byblos s’élève pour cette année à environ « 3,5 à 4 millions de dollars », précise M. Baz. Celui de Beiteddine s’élève « à peu près à 2 millions de dollars », selon Mme Joumblatt, tandis que Zouk Mikaël dispose d’un budget de 1 million, selon Mme Boueiz. Des budgets colossaux, qui comprennent le transport aérien, l’hébergement, l’alimentation, le per diem et le cachet des artistes, la logistique (éclairage, électricité, son, etc.), le transport de matériel, le budget publicitaire, etc.


Sans oublier les taxes... « Normalement, nous payons 24,7 % de taxes. Avec la nouvelle loi 56 qui vient d’être promulguée, nous atteindrons 36,7 % de taxes sur le prix du billet + 3,5 % de Sacem, ce qui est impensable pour le festival et pour le spectateur ; ces taxes ne peuvent se refléter que sur les prix des billets », déplore Mme Joumblatt.
Des dépenses qui, clairement, représentent un pari risqué, financièrement parlant. D’autant plus que les grands artistes et ensembles internationaux – dont les salaires peuvent monter jusqu’à « 750 000 dollars pour une comédie musicale ou 450 000 dollars pour un artiste en solo » (selon Mme Joumblatt), voire à 800 000 dollars (!) pour le cachet de Placido Domingo au Festival de Zouk Mikaël – peuvent se montrer frileux en cas de turbulences. « Les assurances nous couvrent en cas d’annulation », note M. Baz. « Cela étant, nous ne sommes jamais à l’abri d’un imprévu qui ne rentrerait pas dans l’une des clauses dont les assureurs ont le secret », ironise-t-il.

« Nous y croyons »
D’énormes efforts et moyens déployés, pour organiser des événements dont la rentabilité n’est même pas garantie en cas de conflit majeur. Qu’est-ce qui pousse donc les organisateurs à persévérer ? La passion, de toute évidence. « Nous y croyons, résume Naji Baz. Nous voulons nous faire plaisir (...) L’on ne peut pas faire ce métier en étant pessimiste. Les années nous ont endurcis, recouverts d’une carapace ; nous sommes parés à toutes les éventualités et nous continuons à croire au Liban. » Même son de cloche du côté de Zalfa Boueiz, qui insiste sur le fait de « rester positifs, malgré les événements. Tous les festivals prennent des risques ».


« Nous sommes certainement inquiets pour le pays, pour le festival et pour les artistes, mais nous faisons contre mauvaise fortune bon cœur. Il est certain que nous continuerons, tant que faire se peut », conclut, pour sa part, Nora Joumblatt.

 

 

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