Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Reportage

Maher, le trompettiste devenu jihadiste

Maher Soukkar a rejoint al-Nosra.  Photo AFP

Il était boy-scout et joueur de trompette à Beyrouth. Mais il y a un mois, le nom et la photo du Palestinien Maher Soukkar sont apparus sur les réseaux sociaux, le saluant comme « héros » et « martyr » d’al-Nosra, le front jihadiste qui combat en Syrie. Mohammad, son ami de dix ans, n’en revient toujours pas. « Je suis triste et choqué. Il n’a jamais été extrémiste. Alors que dans notre mouvement scout, la plupart étaient des musulmans conservateurs, lui fumait pendant le ramadan et même lançait des injures à tort et à travers », dit-il.
Sur le site islamique du réseau des Ansar al-Moujahidine, la nouvelle de la mort a été diffusée comme suit : « Nous vous annonçons l’heureuse nouvelle, celle de la mort en martyr de Maher Soukkar, un des “lions” du Front al-Nosra à Qousseir. » Sur une photo, Maher apparaît en treillis militaire, kalachnikov à la main. Une autre photo montre un corps recouvert d’un linceul blanc, avec des marques de sang sur le visage, sous l’inscription « Le martyr héros Maher Soukkar, Palestinien ». Date de la mort : le 19 mai, date du premier jour de l’assaut sur Qousseir. Le même jour, son nom apparaît sur les pages Facebook de partisans du régime du président Bachar el-Assad, le présentant comme le « dangereux terroriste Maher Soukkar ».
Mohammad, lui, n’a jamais vu son ami porter des armes. « Il était simple, serviable et généreux. » Le jeune homme, qui était âgé de 30 ans, avait grandi dans un orphelinat à Beyrouth après la mort de son père et le remariage de sa mère. À 18 ans, il quitte l’orphelinat mais ne trouve pas de foyer. « Souvent, il passait ses nuits dans la rue », dit Mohammad. Il trouve dans le scoutisme la famille qu’il recherchait. « On sentait qu’il avait besoin de tendresse et qu’il aimait être le centre d’intérêt. C’était normal, vu son passé », explique l’ami. C’est à cette époque qu’il a appris à jouer de la trompette et rejoint une troupe de 120 musiciens. « Il avait l’oreille musicale, malgré sa formation basique. J’ai su après qu’il avait appris à jouer de l’orgue. Il adorait chanter, surtout autour des feux de camp », raconte son ex-professeur Samir. Chaque année, Maher participait avec enthousiasme à un camp d’été, qui lui assurait une « résidence » gratuite de trois mois.
En hiver, Mohammad se souvient que son ami était sans emploi la plupart du temps. « Dès qu’il trouvait des petits boulots, menuisier, électricien, concierge, il dormait sur le chantier. » De guerre lasse, Maher décide en 2003 de s’installer dans le camp de réfugiés palestiniens de Chatila, dans le sud de Beyrouth. « Peu après, je l’ai rencontré dans la rue, il portait une djellaba blanche à la manière afghane, qui arrive aux genoux. Il a commencé à me parler de religion, de ce qui est halal et haram », se souvient un de ses « supérieurs » dans le mouvement scout. « Le milieu du camp l’a changé », ajoute-t-il.
Fin mars, Maher rend visite à Mohammad après des années d’absence. Il lui raconte qu’il vient de sortir de cinq ans de prison, « accusé injustement » d’appartenance à un groupe extrémiste. « C’était une soirée sympa, nous avons beaucoup rigolé. Il parlait en arabe littéraire (à la manière des fondamentalistes), c’était étrange », dit-il.
Son adhésion au Front al-Nosra, qui se revendique du réseau el-Qaëda et combattant aux côtés des rebelles, reste un mystère. Car, au cours des dernières années, il avait occupé des postes administratifs au sein du Fateh al-Intifada, un groupe palestinien proche du régime syrien, et même chez le Hezbollah. Le 16 mai, quelques jours avant la bataille de Qousseir, il écrit sur sa page Facebook la foi islamique sous la photo d’un homme masqué. « Comment a-t-il pu rejoindre al-Nosra en un mois et demi? » demande Mohammad. « Toute sa vie, il cherchait sa place... l’oppression et la pauvreté l’ont rendu extrémiste », soutient-il.
(Source : AFP)
Il était boy-scout et joueur de trompette à Beyrouth. Mais il y a un mois, le nom et la photo du Palestinien Maher Soukkar sont apparus sur les réseaux sociaux, le saluant comme « héros » et « martyr » d’al-Nosra, le front jihadiste qui combat en Syrie. Mohammad, son ami de dix ans, n’en revient toujours pas. « Je suis triste et choqué. Il n’a jamais été extrémiste. Alors...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut