Alors que le calme régnait vendredi matin à Tripoli, au Liban-Nord, à la faveur d’un déploiement massif de l’armée pour tenter de mettre un terme aux violences qui ont déjà coûté la vie à des dizaines de personnes, les combats ont repris en fin d'après-midi dans le centre de la ville, faisant un nouveau tué selon une source des services de sécurité citée par l'AFP.
Ces nouvelles violences qui ont fait également cinq blessés dans les souks de la vieille ville ont opposé un groupuscule salafiste partisan des rebelles syriens à un autre groupe sunnite mais favorable au Hezbollah chiite, allié du régime de Damas.
Jeudi soir, une personne avait été tuée et sept autres blessées dans de violents combats entre ces deux groupes dans le centre de Tripoli. Il s'agissait des premiers affrontements au cœur de la ville depuis 2008, les violences ayant jusqu'alors eu lieu dans des quartiers excentrés. Ces nouveaux accrochages font craindre un embrasement généralisé à Tripoli. Déployée en force dans le secteur, l'armée y avait rétabli le calme.
La troupe a intensifié ses patrouilles dans la ville et procédé durant la nuit de jeudi à vendredi à des perquisitions musclées. Elle a aussi riposté aux sources des tirs entre les quartiers rivaux de Bab el-Tebbaneh (à majorité sunnite et anti-Assad) et Jabal Mohsen (à majorité alaouite et pro-Assad).
La route principale reliant Tripoli au Akkar, plus au nord et cible de francs-tireurs, a été rouverte vendredi matin à la circulation.
"Une guerre absurde"
Vendredi, l'armée libanaise a mis en garde contre "un complot" visant à entraîner le Liban dans une "guerre absurde" après la multiplication des violences liées au conflit en Syrie, avertissant qu'elle recourrait à la force pour y mettre fin.
"Le commandement de l'armée (...) appelle les citoyens à se méfier des complots visant à faire revenir le Liban en arrière et à l'entraîner dans une guerre absurde", a-t-il indiqué dans un communiqué, prévenant qu'il répondrait "aux armes par les armes". "Le commandement de l'armée a tenté au cours des derniers mois d’œuvrer avec fermeté, détermination et patience pour empêcher le Liban de se transformer en un champ de bataille pour les conflits régionaux et éviter le transfert des événements syriens" dans ce pays, poursuit le communiqué.
"Mais ces derniers jours, certains groupes semblaient déterminés à créer des tensions au niveau de la sécurité (...) sur fond de divisions politiques au Liban sur les développements militaires en Syrie", ajoute le texte, sans désigner explicitement l'une ou l'autre partie. Il s'agit du communiqué le plus ferme depuis le début de la révolte en Syrie il y a plus deux ans, alors que de nombreux incidents frontaliers ont fait craindre un débordement de la crise.
Jeudi, trois attaques ont été menées contre des soldats libanais dans le nord et l'est du pays, et dans la nuit du 27 au 28 mai, trois militaires ont été tués par des hommes armés à Ersal, localité frontalière de la Békaa. L'armée a été également visée par des tirs jeudi à Tripoli, alors qu'elle saisissait des stocks d'armes dans les deux quartiers de Bab el-Tebbaneh et Jabal Mohsen.
Le président Michel Sleiman a de son côté dénoncé vendredi "toute implication libanaise dans la crise syrienne", après avoir récemment adressé des critiques sans précédent au Hezbollah. Il a par ailleurs de nouveau appelé la communauté internationale à "se rendre compte du danger que représente le fardeau de l'afflux continu de réfugiés de Syrie" au Liban, dont le nombre dépasse désormais un demi-million selon l'ONU.
(Pour mémoire : La (sérieuse) mise en garde de Sleiman)
Le Premier ministre sortant Nagib Mikati a également appelé vendredi les Libanais à ne plus s'impliquer dans la crise syrienne afin d'épargner au Liban la discorde.
Les affrontements à Tripoli, s'accompagnent aussi d'incidents sécuritaires à travers le territoire libanais, plus ou moins liés au conflit syrien.
Mercredi, ce sont au moins quinze roquettes, tirées depuis la Syrie, qui avaient frappé en soirée la ville historique de Baalbeck, fief du Hezbollah. Il s’agit d’une des attaques les plus importantes contre une place forte du parti chiite depuis que l’opposition syrienne a menacé de riposter au soutien militaire du Hezbollah au régime de Damas.
Le Liban, qui a été sous la tutelle syrienne pendant une trentaine d'années, est profondément divisé entre partisans et opposants à Bachar el-Assad. Le Hezbollah a combattu aux côtés des troupes du régime en Syrie dévastée par plus de deux ans de guerre.
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commentaires (7)
L'armée sait très bien d'où vient le mal de cette guéguerre absurde qui tantôt grossit, tantôt maigrit au gré des évènements en Syrie.. mais bon, elle est obligée de parler à tout le monde pour ne pas faire mousser les hirsutes sans discipline de Tripoli Syriaque.
Ali Farhat
18 h 09, le 07 juin 2013