Syrie : Moaz el-Khatib propose un sauf-conduit pour Assad

Le chef démissionnaire de l'opposition syrienne, Moaz al-Khatib, a suggéré, jeudi, pour la première fois, d'accorder un sauf-conduit pour quitter le pays à Bachar el-Assad et à 500 membres du régime, si le président syrien accepte de se retirer du pouvoir.

 

Dans son "initiative" présentée jeudi sur Facebook, il propose que "20 jours après son acceptation d'une transition pacifique, Bachar el-Assad remette ses attributions au vice-président Farouk el-Chareh ou au Premier ministre Waël al-Halaqi". Farouk el-Chareh a pris ses distances vis-à-vis de la répression menée par le régime pour écraser la contestation et considère qu'il faut une solution politique et non militaire à la crise.

 

En échange de l'acceptation de cette transition, affirme Moaz al-Khatib, "Assad aura la garantie de pouvoir quitter le pays avec 500 personnes choisies par lui, accompagnées de leur famille et de leurs enfants, vers n'importe quel pays qui acceptera de les recevoir".

 

C'est la première fois qu'un dirigeant de l'opposition propose une immunité pour le président syrien et les membres de son régime. "Je fais cette proposition pour éviter la destruction de la Syrie et sa dislocation tant sur le plan humain que social. Mon initiative est d'origine syrienne, son objectif est syrien. Il s'agit d'un tout avec un calendrier précis", dit-il.

 

Le dirigeant de l'opposition appelle "le régime, tous les révolutionnaires et l'opposition à l'adopter pour sortir de la catastrophe nationale" et il demande à la communauté internationale "de la parrainer et de garantir son application".

"Une fois l'initiative acceptée par Bachar el-Assad, ce dernier disposera d'un mois pour effectuer la passation de pouvoir et l'actuel gouvernement poursuivra sa tâche durant 100 jours en attendant la formation d'un nouveau cabinet", suggère-t-il. "Durant ces 100 jours, le gouvernement procèdera à la restructuration des services de sécurité et de l'armée, à la libération des prisonniers et à l'entrée de l'aide humanitaire sous toutes ses formes", souligne M. Khatib.

 

Il propose aussi que le secrétaire général de l'ONU nomme un médiateur international pour superviser la transition.

"A l'issue des 100 jours, les compétences de l'actuel gouvernement passeront au gouvernement de transition, formé avec des garanties internationales, qui préparera la fondation de la nouvelle Syrie", conclu-t-il.

 

 

L'opposition réunie à Istanbul

Commentant la proposition de M. Khatib, le porte-parole de la Coalition de l'opposition, Khaled Saleh, a indiqué qu'"il s'agit d'une initiative personnelle, qui sera soumise à la réunion de la Coalition et sera peut-être discutée".

 

La question de l'avenir de Assad est au centre des discussion entamée jeudi par la Coalition nationale de l'opposition. Cette réunion de trois jours vise à discuter de sa participation à une éventuelle conférence de paix internationale après avoir obtenu des assurances internationales sur un départ du président syrien.

 

Les opposants doivent débuter leur rencontre par une évaluation de la situation sur le terrain et un vote sur l'entrée de nouveaux membres dans cette Coalition, a affirmé à l'AFP une de ses porte-parole. Mais les débats les plus attendus sont ceux portant sur leur participation, ou non, à des négociations avec le régime du président Assad. Ceux-ci pourraient ne se conclure que samedi, a indiqué cette source.

L'idée de cette conférence internationale dite de "Genève 2", a été lancée par les Etats-Unis et Moscou, et les soutiens occidentaux et arabes de l'opposition ont multiplié les pressions sur la Coalition pour qu'elle s'asseye à la table des négociations dans le courant de juin.

De nombreux membres de la Coalition ont cependant exprimé des réserves quant à cette initiative. Ils réclament notamment en préalable des assurances de la communauté internationale sur le départ du pouvoir du président syrien. "Pour Genève 2, la condition (d'une participation de la Coalition) est que Assad démissionne", a répété jeudi à l'AFP Salem al-Moslet, membre de la Coalition.

Les membres de la Coalition redoutent d'être lâchés par les rebelles sur le terrain s'ils adoptent une position trop conciliante à l'égard du régime de Damas. "Dans quelle mesure les révolutionnaires sur le terrain accepteraient-ils que la Coalition aille négocier sans que cette condition soit remplie ? Je pense que les révolutionnaires tourneraient totalement le dos à l'opposition politique", a expliqué à l'AFP Samir Nashar.

Onze pays soutenant l'opposition, dont les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, ont toutefois tenté de rassurer la Coalition en soulignant à l'issue d'une réunion des Amis de la Syrie à Amman mercredi que "Bachar el-Assad, son régime et ses proches qui ont du sang sur les mains ne pourront tenir aucun rôle dans le futur en Syrie". Le groupe a également annoncé qu'il continuerait d'aider les rebelles jusqu'à ce que Bachar el-Assad parte.

Lors d'un récent entretien à des médias argentins, M. Assad a martelé son refus de quitter le pouvoir avant la présidentielle de 2014. Jeudi, il a réaffirmé sa détermination à l'emporter contre la rébellion. Recevant à Damas une délégation de représentants de partis politiques tunisiens, M. Assad a déclaré selon l'agence officielle Sana: "La Syrie est déterminée à faire face au terrorisme et à ceux qui le soutiennent au niveau régional et dans le monde, et à trouver parallèlement une solution politique à la crise".

 

 

Damas fustige "les ennemis de la Syrie"

A Istanbul, d'autres sujets risquent de créer la controverse au sein d'une opposition déjà divisée.

Le Premier ministre Ghassan Hitto, élu en mars par l'opposition pour administrer les territoires aux mains de la rébellion, doit présenter samedi son cabinet de 11 ministres à la Coalition pour approbation. Mais une partie des membres de la Coalition sont hostiles à M. Hitto, et un vote de défiance pourrait entraîner sa chute, a indiqué un responsable parlant sous le couvert de l'anonymat.

La Coalition devra également élire vendredi son nouveau président et ses adjoints, après la démission en mars de Moaz al-Khatib.

 

Du côté du régime, l'agence officielle Sana estime jeudi que la réunion à Amman des Amis de la Syrie, a coupé la voie à la tenue d'une Conférence internationale. "Les participants, qui se sont autoproclamés porte-parole du peuple syrien, ont coupé la voie à la tenue de la Conférence internationale en disant qu'ils allaient renforcer leur soutien à l'opposition syrienne", indique l'agence.

 

Enfin, la Ligue arabe a indiqué jeudi qu'elle allait soumettre au Conseil de sécurité de l'ONU des idées susceptibles de contribuer à la réussite de la conférence de paix. Le comité sur la Syrie de l'organisation panarabe s'est réuni au Caire dans la journée, sous la présidence du Premier ministre qatari Hamad ben Jassem al Thani, et en présence du secrétaire général de la Ligue, Nabil el-Arabi. Le comité s'est mis d'accord sur "certains éléments contribuant à faire réussir la prochaine conférence internationale à Genève", a indiqué la Ligue dans un communiqué, sans détailler ces éléments.

 

 

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