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À La Une - Ces jeunes Libanais de la diaspora qui font parler d'eux

Philippe Massoud, un ambassadeur de la cuisine libanaise à New York

Que de chemin parcouru du Coral Beach sous les bombes au rêve ressuscité aux États-Unis.

Le chef libanais Philippe Massoud.

Philippe Massoud a la cuisine dans le sang et dans les gènes. Avoir passé le plus clair de son enfance au Coral Beach, le prestigieux hôtel beyrouthin dirigé par sa famille, y est probablement pour beaucoup.

 

"L'aventure (du Coral Beach) a commencé avec mon grand-père, Alexandre. Ensuite, c'est mon père Georges qui a pris la relève, se rappelle le chef libanais aujourd'hui âgé de 42 ans. Ayant perdu notre maison à Kantari au début de la guerre civile, nous avons vécu plusieurs années au Coral Beach. Plus qu'une entreprise familiale, l'hôtel était alors notre refuge. C'est à ce moment-là que j'ai su que j'allais faire carrière dans le secteur hôtelier".

 

Philippe Massoud estime que si sa famille a dû surmonter de nombreuses difficultés, elle a eu énormément de chance d'avoir géré le Coral Beach. "Nous formions avec tous nos invités et employés une grande famille, raconte-t-il. Nous avions fait de l'hôtel notre siège de résistance et dit non à la guerre en privilégiant la vie alors que le feu embrasait tout autour de nous".

 

L'adolescent a quitté le Liban en 1985, à l'âge de 14 ans. La guerre faisait rage et ses parents voulaient à tout prix l'en éloigner. "Je ne savais pas que je quittais le pays définitivement. J'étais très attaché au Liban, à ma famille et à mes amis, assure-t-il. Mais la partie-ouest de Beyrouth, où nous vivions, devenait de plus en plus dangereuse. Rester n'était plus une option".

 

En dépit des années écoulées, les souvenirs de cette époque sombre le hantent toujours. "Voitures piégées, enlèvements, massacres... J'étais horrifié par la cruauté de la guerre et par le niveau de monstruosité qu'un être humain peut atteindre. Mais en même temps, je ne pouvais que respecter la volonté des Libanais de survivre et de lutter contre l'obscurité qui assombrissait le ciel de Beyrouth", assure-t-il.

 


Ilili, un rêve ressuscité

A des milliers de kilomètres de là, aux États-Unis, un avenir plus lumineux attendait Philippe Massoud. Un parcours toutefois parsemé d'obstacles.

Après deux ans de cours pratiques à la prestigieuse École hôtelière de l'Université Cornell, dans l’État de New York, le jeune homme se trouve contraint d'interrompre ses études et de rentrer à Beyrouth suite au brusque décès de son père. Ce jour-là, ce n'est pas seulement son père que Philippe perd, mais aussi le Coral Beach que la famille doit mettre en vente.

Le jeune Libanais ne tarde pas néanmoins à reprendre sa vie en main. Il repart aux États-Unis où il obtient une licence en gestion hôtelière et restauration du Rochester Institute of Technology.

 

Doté de plusieurs années d'expérience dans le domaine, Philippe est aujourd'hui copropriétaire (avec son frère Alexandre), directeur et chef d'un restaurant qui remporte un franc succès à New York : le Ilili.

 

 

Ilili, le restaurant de Philippe Massoud à New York. Photo Chris Goodney


Ilili propose une carte à base de plats traditionnels libanais, mais présentés de manière contemporaine. "Près de 60% de notre menu est composé de plats traditionnels libanais. Le reste des plats proposés représentent notre vision et notre interprétation d'une cuisine en perpétuelle évolution", explique Philippe Massoud.

 

Pourquoi Ilili ? C'est un nom qui m'a été proposé par deux amis alors que nous discutions tous les trois sur Internet. "J'ai trouvé que Ilili, ou dis-moi en Libanais, me convenait parfaitement surtout que je cherchais un nom qui sorte de l'ordinaire compte tenu du style moderne du restaurant", explique le chef. "Cerise sur la gâteau, Ilili répondait au faible que j'ai toujours eu pour les palindromes (mots que l'on peut lire dans les deux sens), qu'ils soient de lettres ou de chiffres", poursuit-il, ajoutant que le code Zip du restaurant est 10001.

 

 

Le Liban, cet adolescent

Si le Liban est à l'honneur sur la carte d'Ilili, le pays lui inspire des émotions contradictoires. "C'est un pays où il fait beau temps, où la terre est fertile, où l'eau est abondante. C'est un pays habité par des gens dotés d'un potentiel hors-pair, capables de surmonter les étapes les plus sombres de leur vie, déclare le chef libanais. Mais le Liban est aussi pour moi synonyme d'opportunités perdues et de problèmes infinis...".

Pour lui, le pays est comme "un adolescent qui a un long chemin de réformes à faire pour devenir adulte". "Il faudrait une révolution pour que le Liban matérialise son énorme potentiel", estime-t-il.

 

 

 

L'incontournable et traditionnel mezzé libanais.

Photo Evan Sung.

Pour finir en douceur, la fameuse knéfé.

Photo Evan Sung.


 

Philippe Massoud admet en revanche ne pas venir très souvent au Liban. "J'y vais une fois par an, parfois une fois tous les deux ans, principalement pour rendre visite à des membres de ma famille. Mais j'évite le pays quand la situation sécuritaire est instable", indique-t-il.  "Si je dois prendre des vacances, pourquoi choisir un pays qui peut du jour au lendemain basculer dans la guerre ?", s'interroge le chef libanais avant d'assurer que "dès que la situation se stabilisera, beaucoup d'entre nous, Libanais de la diaspora, visiteront le pays plus souvent".

 

Philippe Massoud ne rêve pas uniquement de pouvoir passer plus de temps dans son pays natal. Il rêve surtout d'y établir son propre business. "Le jour où le Liban retrouvera paix et stabilité, j'y lancerai un projet en honneur et à la mémoire de mon père, ainsi qu'à mes souvenirs d'enfance au Coral Beach".

 

 

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Philippe Massoud en qualifiant le Liban d'opportunités perdues et de problèmes infinis a tout à fait raison et la preuve la jeunesse ne trouve aucun travail dans ce pays tribal ou sans piston personne ne peut décrocher un poste . Antoine Sabbagha

Sabbagha Antoine

16 h 20, le 14 mai 2013

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Commentaires (1)

  • Philippe Massoud en qualifiant le Liban d'opportunités perdues et de problèmes infinis a tout à fait raison et la preuve la jeunesse ne trouve aucun travail dans ce pays tribal ou sans piston personne ne peut décrocher un poste . Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    16 h 20, le 14 mai 2013

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