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À La Une - Technologie

Fabriquer un pistolet avec une imprimante 3D? C'est possible

Une innovation qui suscite de lourdes inquiétudes.

Cody Wilson et son pistolet Liberator (Capture d'écran Youtube/DefDist)

Un nouveau monde vient de s'ouvrir aux adeptes du fait maison : celui des armes.

Pour se fabriquer un pistolet, il faut commencer par se munir d'une imprimante 3D. Les modèles d'occasion sont à moins de 1.500 euros sur eBay et livrables en une petite semaine. Puis, il s'agira de dessiner un plan détaillé et en relief de l'engin, d'entrer les données dans un ordinateur, de remplir l'imprimante de plastique, et de patienter quatre petites heures pour l’impression 3D de l'arme.

 

L'affaire ne relève pas de la science fiction -peut-être du film d'horreur-, puisqu'un étudiant américain de 25 ans, Cody Wilson, vient de produire un pistolet grâce à une imprimante 3D. L'objet, baptisé Liberator en hommage aux soldats américains de la Deuxième guerre mondiale, était annoncé depuis plusieurs mois déjà sur le net. Le premier test a été rendu public lundi. Et selon le témoignage d'un journaliste de Forbes qui a pu filmer le premier tir, « ça a marché ! ».

 

 

La vidéo du tir sur YouTube

 

 

L’impression 3D est présentée par certains comme la prochaine révolution en matière de production. Selon 3Dprinter Hub, un site internet spécialisé dans le domaine, il s’agit d’une technologie permettant de créer un élément en trois dimensions, en « superposant plusieurs couches d’un même matériel ». Bref d’imprimer de véritables objets en volume et en pièces détachées. « Presque tout peut être produit », affirme le site, sculptures, machines, bijoux, meubles, snowboard, et donc armes à feu.

 

Il aura fallu peu de temps à Cody Wilson pour produire la première arme à feu par impression 3D. En août dernier, le jeune homme qui se présente lors d'une interview avec la BBC comme un crypto-anarchiste, crée Defense Distributed, une petite organisation à but non lucratif basée à Austin, au Texas. Il publie ensuite sur son site un catalogue des pièces pouvant être fabriquées par imprimante et lève des fonds via une opération de "crowd funding", ou financement participatif, une méthode de transaction financière qui s'est développée sur internet et les médias sociaux. En quelques semaines, son projet récolte plus de 75.000 dollars. Mi-mars, la justice américaine lui accorde une licence l’autorisant à fabriquer des armes à feu. Cody Wilson publie une photo du document sur son mur Facebook. « Que le travail commence ! », jubile-t-il alors.

 

Le premier tir aura lieu quinze jours plus tard. Mais pour se conformer à la législation américaine en matière d’armes à feu, Cody Wilson a du équiper son pistolet en plastique d’une petite pièce en acier d’à peine 200 grammes. Comme le rappelle US News, la loi américaine interdit les armes pouvant échapper aux détecteurs de métaux. Mais qui peut dire qu’un autre imprimeur amateur se pliera à ces règles ?

 

 

Imprimante3d/AFP

Une imprimante 3D, dans un salon d'exposition à New York (AFP/EMMANUEL DUNAND)

 

 

L'affaire est d'autant plus inquiétante que Cody Wilson ne garde pas pour lui son secret de fabrication. Sur le site de Defense Distributed, on peut trouver des instructions indiquant comment construire son propre pistolet, en anglais et en chinois.

La production du pistolet intervient en outre alors que la question de l'accès aux armes est omniprésente, ces derniers temps, aux Etats-unis, à la suite de la tuerie de Newtown (14 décembre 2012, 28 morts dont 20 enfants) et du rejet par les Sénateurs de la réforme, pourtant a minima, des lois sur les armes, sans compter le Congrès de la NRA à Houston.

 

Dans ce contexte, le magazine Wired classe l'étudiant parmi les quinze personnalités les plus dangereuses au monde.

Mais celui-ci n’en a cure, et continue de poser sur sa page Facebook, l’air assuré, un fusil à la main, le doigt sur la gâchette. Etudiant en droit à l’Université du Texas, il met en avant son respect du deuxième article de la Constitution des Etats-Unis, qui autorise tout citoyen à détenir une arme à feu. Sur son site internet, il publie en guise de manifeste un texte de l’écrivain anglais du XVIIe siècle John Milton, partisan d’une liberté totale… d’imprimer.

 

 

Cody Wilson/CC/Wikipedia

Cody Wilson (Wikipedia/CC)

 

 

Face à Cody Wilson et son Liberator, les réactions ont été vives. « Cela retourne l’estomac », a commenté le sénateur démocrate de New York Charles Schumer, cité par Newsday. « Maintenant, n’importe qui, un terroriste, un malade mental, un conjoint violent peut ouvrir une fabrique d’arme dans son jardin. Il faut que cela cesse », a ajouté ce partisan de l’interdiction des armes aux Etats-Unis. Même crainte sur côté du président d'Europol Victoria Baines, qui s'inquiète des nouvelles possibilités offertes aux criminels pour se procurer des armes à feu.

 

Steve Israel, représentant démocrate de New York, propose, de son côté, de renforcer la législation américaine concernant les armes à feu dites « indétectables ». Le rejet de la réforme sur les armes, un « jour de honte » selon le président Obama, ne pousse toutefois pas à l'optimisme. La bataille risque d'être d'autant plus difficile que l'on compte 90 armes pour 100 habitants aux Etats-Unis selon les chiffres officiels, cités par Le Monde.

 

Cody Wilson, quant à lui, affiche une grande sérénité. Dans des propos rapportés par Forbes, le jeune homme reconnaît « que ces objets pourraient être utilisés pour blesser » des gens. « Mais c’est à ça que sert un pistolet, ajoute-t-il. Et je ne crois pas que cela soit une raison pour ne pas le faire. Je pense que la liberté, en fin de compte, est le meilleur des choix ».

 

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