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À La Une - Exode syro-palestinien

Réfugiés : Les responsables libanais divisés entre "racisme primaire" et "gestion du fait accompli"

« Les réfugiés syriens et palestiniens prennent la place des Libanais », prévient le ministre CPL de l’Énergie Gebran Bassil. « C’est du racisme confessionnel à des fins électorales », accuse le jeune député chiite du Futur, Okab Sakr.

Un enfant syrien en pleurs près de la frontière turque. Ahmed Jadallah/

La question des réfugiés, conséquence directe de la crise syrienne sur le pays, est plus que jamais au cœur des préoccupations ministérielles, aggravées par l’afflux grandissant de déplacés palestiniens fuyant les violences en Syrie,notamment dans le camps de Yarmouk à Damas. Pour le ministre des Affaires sociales Waël Bou Faour, en tournée hier à Rachaya, « le dossier des réfugiés syriens s’est imposé de facto aux Libanais. Ni les citoyens ni les forces politiques ne peuvent contourner cette réalité ». « Il n’est donc nullement besoin de pratiques vindicatives ni racistes contre les peuples syrien ou palestinien, contraints de venir se réfugier au Liban », a-t-il souligné, estimant qu’il est « du devoir de l’État d’agir tout de suite en trouvant un juste équilibre entre ses responsabilités d’aide et de protection des réfugiés d’une part, et son devoir de protéger sa souveraineté et sa sécurité d’autre part ». Il a fait remarquer que « le plan d’assistance humanitaire aux réfugiés a déjà été établi par le ministère des Affaires sociales, en collaboration avec le bureau de la présidence du Conseil, à la demande du gouvernement ». « Nous avons accompli ce qui était exigé de notre ministère », a-t-il insisté, appelant à ce que « les autres ministères remplissent un plus grand rôle, notamment les ministères de l’Intérieur, de la Défense, de l’Économie et des Finances, qui assurent, en plus des besoins humanitaires, les besoins sécuritaires et économiques qu’impose la situation des réfugiés ».

 

(Lire aussi : Et si ces réfugiés étaient répartis entre l’Irak, la Jordanie et la Turquie ?...)

 

S’agissant par ailleurs des Palestiniens affluant de Syrie, le ministre Bou Faour a reconnu « la sensibilité de la question pour certains Libanais », c’est pourquoi « il a été convenu que ce dossier soit pris en charge par l’Unrwa (l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) et qu’une caisse spéciale, dont les fonds proviennent des aides dont bénéficie l’État libanais pour l’ensemble des réfugiés, soit affectée aux Palestiniens déplacés ». Le ministre a rappelé enfin « les promesses que le gouvernement libanais a pu obtenir des bailleurs de fonds et qui devraient assurer en début d’année pour le Liban les moyens minimum d’apporter l’assistance nécessaire aux réfugiés ».

Bassil exige que les Palestiniens « paient leur électricité... »
Pourtant, le ministre de l’Énergie Gebran Bassil a adopté une position qui se situe aux antipodes de cet appel. « Les réfugiés syriens prennent la place des Libanais », a-t-il martelé. « Nous conserverons chaque parcelle de notre terre », a-t-il ajouté. « Nous devons mettre nos actes en conformité avec nos paroles et refuser de céder notre travail et notre vie sociale aux réfugiés qui, par leur présence, leur travail et leur vie sur notre territoire, menacent notre présence », a encore affirmé le ministre Bassil, qui s’exprimait lors d’une cérémonie organisée par l’association Batrouniyat à Batroun. « Comment peut-on accepter que l’enseignement dans certaines écoles se base sur le programme scolaire syrien ? Où en est notre souveraineté ? Les camps des Palestiniens déjà établis au Liban ne sont-ils pas une menace suffisante ? » s’est-il indigné, rejetant en même temps le caractère raciste de ses propos. « Ce n’est pas une réflexion raciste, mais patriotique, dont nous sommes fiers », a-t-il précisé, appelant le gouvernement à « examiner sérieusement les moyens d’expulser les réfugiés et de les renvoyer à leur territoire ». « Que ceux qui veulent nous assister financièrement paient avant tout les dommages causés par les agressions israéliennes, ou que l’Unrwa paie la facture d’électricité des camps palestiniens, dont la valeur cumulée s’élève à plus d’un milliard », et de conclure :« Les pays voisins ont assez d’espaces pour que les réfugiés aillent en Turquie, à Chypre, en Jordanie ou Irak ».

 

(Pour mémoire : Mikati : Impossible de fermer les frontières avec la Syrie)

Sakr et « l’extrémisme du ministre-gendre... »
Ce discours a été fermement stigmatisé par le député du bloc du Futur Okab Sakr. « Le délire a atteint l’un des ministres de Michel Aoun (CPL), au point de le conduire à assimiler les réfugiés syriens et palestiniens au mal et à vouloir les expulser, rappelant ainsi les anciens extrémistes de l’apartheid en Afrique du Sud. » Le jeune député chiite s’est surtout attardé sur l’indignation exprimée par le ministre Bassil contre l’adoption de programmes syriens par certains établissements scolaires au Liban. « Le génie de ce ministre-gendre (du général Aoun) lui a fait oublier qu’il a été lui-même étudiant à l’Université américaine de Beyrouth où ce n’est pas le programme libanais qui est enseigné », a-t-il déclaré, insistant sur le fait que « la pluralité et l’enchevêtrement des cultures est le propre des sociétés ouvertes à la culture ». « Il existe certainement au Liban, a-t-il ajouté, des êtres humains qui compatissent avec les enfants égorgés, les veuves, les orphelins et les handicapés, victimes des machines à tuer, qu’elles soient israéliennes ou assadiennes. Le danger dans la logique du ministre Bassil est qu’elle sous-tend un discours destiné à satisfaire les chrétiens à la veille des élections, quand bien même ce discours porte la plus grande atteinte aux valeurs chrétiennes. »

Le spectre de la naturalisation ....
Tout aussi sceptique que le ministre Bassil, mais moins radical, le ministre d’État druze Marwan Kheireddine a estimé que « la crise des réfugiés est le test le plus difficile que connaît le pays depuis l’indépendance, le Liban ne pouvant pas assimiler ce grand nombre de réfugiés ». « L’embarras est clair face à cette situation délicate, puisque la solution n’est pas aisée », a-t-il fait remarquer. Il a en même temps estimé que « les frontières ne peuvent plus rester sans contrôle et ouvertes à tous ceux qui veulent entrer dans le pays ».
Pour les Mourabitoun, en la personne de Moustafa Hamdane, le leader du Front de lutte nationale, le député Walid Joumblatt, se sent avantagé par la présence des réfugiés syriens au Liban, « dont il exploite la situation humanitaire au profit des opérations de fraude et de détournement de fonds qu’il pratique dans le cadre d’une soi-disant assistance aux réfugiés ».
Adoptant une position médiane, le Parti démocrate a appelé à « accueillir les réfugiés affluant de Syrie », tout en mettant en garde contre « une résurgence du projet de naturalisation ».

 

 

Reportage :

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