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À La Une - Turquie

Erdogan dénonce « Harim el-Sultan »

Pour le Premier ministre, la série télévisée est contraire à l’histoire et aux bonnes mœurs musulmanes.

Sur cette photo d’archives, des manifestants ont jeté des œufs sur une affiche de la série télévisée « Le siècle magnifique ».  Murad Sezer/Reuters

C’est l’une des séries les plus populaires de la télé turque mais elle n’a pas échappé aux foudres du Premier ministre. Réputé pour ses sorties tonitruantes, Recep Tayyip Erdogan s’en est pris cette fois à un feuilleton qui décrit les turpitudes de Soliman le Magnifique, le jugeant contraire à l’histoire et aux bonnes mœurs musulmanes.
L’objet de l’ire du chef du gouvernement s’appelle Le siècle magnifique ou Harim el-Sultan (au Liban). Depuis maintenant un an, cette série dépeint sans fard le règne du plus fameux sultan de l’Empire ottoman (1520-1566), entre conquêtes militaires, intrigues de palais ou rivalités de harem. Des millions de téléspectateurs s’en régalent chaque semaine, en Turquie comme dans les pays du Maghreb ou d’Europe de l’Est où elle a été vendue. Mais apparemment, cette chronique romancée et décadente, qui montre Soliman un verre d’alcool à la main ou en pleins ébats avec ses promises, n’est pas du goût du chef du gouvernement turc, qui l’a fait savoir au détour d’une pique adressée à ceux qui critiquent sa politique étrangère. « Ils demandent pourquoi nous nous occupons de ce qui se passe en Irak, en Syrie ou à Gaza. Mais nous nous intéressons à tout ce qui est lié à nos ancêtres. Ils ne connaissent nos pères et nos ancêtres que par Le siècle magnifique mais ce n’est pas le Soliman que nous connaissons », s’est exclamé M. Erdogan. « Il a passé trente ans de sa vie à dos de cheval et non dans des palais comme on nous le montre à la télé », a-t-il poursuivi. « Je maudis et condamne les réalisateurs de ces séries et les propriétaires de cette chaîne de télévision », a menacé M. Erdogan, « ceux qui jouent avec les valeurs du peuple doivent recevoir une leçon ».


Le chef du gouvernement n’est pas le premier à critiquer Le siècle magnifique. Dès ses premiers épisodes, la fiction a créé de nombreux remous, dans les milieux religieux mais également politiques. La semaine dernière encore, un des vice-Premiers ministres du gouvernement islamo-conservateur est monté au créneau lors du débat parlementaire consacré au budget de l’audiovisuel. « Ceux qui veulent humilier nos ancêtres et nos valeurs sur les écrans de télévision doivent d’une manière ou d’une autre être punis », s’est emporté Bülent Arinç. Dès le début de l’année, l’organisme de supervision de l’audiovisuel a adressé un avertissement à Star TV pour « atteinte à la vie privée du sultan » sur la base de dizaines de milliers de plaintes de simples citoyens. Les producteurs de la série se sont défendus en soulignant que leur fiction décrivait « l’une des facettes d’un sultan et la grandeur qu’il incarne ». Et ils ont rappelé que le goût de Soliman pour le vin était historiquement avéré.


Sans surprise, les critiques du Premier ministre ne sont pas passées inaperçues dans les rangs de l’opposition, qui y a vu un nouveau coup de canif contre l’héritage laïc du fondateur de la République turque, Mustafa Kemal Atatürk. « Nous ne savions pas que le Premier ministre comptait dans ses fonctions la supervision des émissions de télé », a raillé le vice-président du principal parti d’opposition (CHP), Umut Oran. « C’est un nouvel exemple de la démocratie autoritaire que prêche Erdogan pour la Turquie », a renchéri le député du CHP Aki Hamzaçebi. « Erdogan confond la réalité et la fiction », a moqué de son côté un éditorial du quotidien libéral Hürriyet. Plus ironique, le journal d’opposition Sözcü a présenté le Premier ministre en « Sultan Erdogan 1er ».


Si elle ne fait pas l’unanimité, la sortie de M. Erdogan a toutefois été largement saluée. Ainsi, le directeur de l’Institut national d’histoire (TTK) a lui aussi dénoncé une série qui « présente Soliman comme un buveur et un coureur de jupons ». « Nous sommes prêts à financer un projet basé sur des réalités historiques », a même ajouté le professeur Metin Hülagü.

 

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