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Liban - Communautés

Raï, à Moukhtara, plaide pour un meilleur soutien au retour des déplacés

Recevant le patriarche maronite au terme de la tournée effectuée par ce dernier au Chouf, Walid Joumblatt souligne la nécessité de refermer la plaie de Brih.

Le chef du PSP accueillant le patriarche Raï au palais de Moukhtara, hier. Photo Ramzi Moucharrafieh

Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a clôturé hier une tournée de deux jours dans le Chouf par une visite au palais de Moukhtara, où l’attendait le chef du PSP, Walid Joumblatt.
La visite s’est déroulée en présence de plusieurs personnalités politiques et religieuses, notamment les ministres joumblattistes et l’ensemble des députés de la région.
Placée sous le signe du « parachèvement de la réconciliation de la Montagne », conclue par son prédécesseur, Nasrallah Sfeir, en 2001, aux côtés de M. Joumblatt, la tournée a englobé plusieurs bourgades et villages de la région. Partout, Mgr Raï s’est fait l’avocat de la coexistence et de l’unité de la Montagne et du Liban, mais aussi le porte-voix du nécessaire soutien « matériel, moral et social » au retour des populations déplacées, ce retour restant, selon lui, une « affaire délicate et prudente ».
À Moukhtara, le patriarche maronite a exprimé dans une allocution son estime à l’égard de M. Joumblatt pour l’œuvre de réconciliation qu’il avait accomplie aux côtés du patriarche Sfeir et pour ses « efforts continus en vue du retour de toutes les personnes déplacées dans leurs villages et la récupération de leurs biens et de leurs terres ».
Mgr Raï a également salué la « volonté sincère » de M. Joumblatt de « consolider la coexistence dans la région du Chouf, notamment entre chrétiens et druzes ».

Le collier de perles
Le patriarche a saisi l’occasion pour relater un fait remontant à l’année 1954. Une cérémonie avait eu lieu cette année-là dans le Chouf, lors d’un transfert d’une statue de la Vierge Marie. Le leader druze, Kamal Joumblatt, père de Walid, s’avance vers la statue tenant dans sa main un collier de perles ayant appartenu à sa mère, Nazira. Il dépose le collier et écrit ces mots sur le registre officiel de la cérémonie : « J’offre ce collier du cou de ma mère humaine à celui de Notre Vierge mère. »
« Cette initiative, a dit Mgr Raï, il faut la regarder à la lumière de notre réalité présente. Il nous faut considérer le collier de perles comme une incitation à un nouveau contrat national et social ( « collier » et « contrat » se traduisent par le même mot en arabe : « aaqd » ) fondé sur notre pacte national et sur la formule libanaise et de nature à résorber les séquelles du passé et instituer un avenir fait de davantage de cohésion et de concorde. »
« Ma visite, a-t-il ajouté, vise à poursuivre et activer le processus de réconciliation entre les maronites et les druzes, mais aussi entre toutes les composantes de la Montagne, quels que soient leur confession, leur parti et leur appartenance. »
Car, selon lui, « le retour, après la tragédie de l’exode, reste une affaire extrêmement délicate et prudente. C’est pourquoi il faut accorder à ce processus le soutien qu’il mérite matériellement, moralement et socialement. Cela vaut d’autant plus que la Montagne n’assume pas seulement sa propre responsabilité, elle assume celle de toute la nation, dans la mesure où elle est le noyau auquel sont rattachées l’ensemble des régions libanaises ».
« La coexistence et la relation historique entre chrétiens et musulmans sont le fondement de la réconciliation et sa garantie. Le pacte du vivre- ensemble préserve la spécificité de chaque communauté et de chaque groupe, il les protège de la dissolution dans des ensembles plus vastes et de l’hégémonie et leur donne tout leur rôle dans la pérennité de l’entité libanaise et dans la participation au pouvoir, à la gestion, à la coopération et à la solidarité sociale », a poursuivi le patriarche.
Et d’ajouter : « Mais il y a aussi un autre fondement à la réconciliation dans la Montagne : il réside dans le fait que le Mont-Liban a été le modèle d’une réalité indépendantiste que les druzes et les maronites ont préservée avec un sens national (...) depuis l’ère des émirs Maan. »
« Nous souhaitons aujourd’hui parachever ensemble le processus de réconciliation et nous voulons que cet effort s’étende sur tout le territoire libanais et l’ensemble des composantes de notre société. Tout le monde devrait se rassembler au sein d’une unité de coalition reflétant le visage composite du Liban et nourrissant ce pluralisme. Mais pour réaliser la réconciliation, il faut que le droit au retour englobe tous ceux qui ont été déplacés et il faut leur assurer une vie digne sur leur terre dans le cadre d’un plan de relance économique et sociale », a-t-il dit.

La neutralité du Liban
Le patriarche a ajouté : « En tant que chrétiens, nous œuvrons pour l’unité intérieure dans le cadre d’un État civil et démocratique, séparant totalement la religion de l’État, préservant la foi en Dieu et respectant toutes les religions et leurs coutumes. Nous œuvrons aussi pour renforcer la liberté dans tous ses aspects, les droits et les devoirs de la citoyenneté, l’allégeance absolue à la patrie et le respect de ses institutions et l’égalité entre tous. »
« Nous sommes attachés au maintien des liens entre le Liban et les deux communautés arabe et internationale (...) et à la consécration du Liban en oasis de rencontre des civilisations et des religions. Il faudrait donc le proclamer État neutre qui s’abstient d’intégrer des alliances et des axes militaires régionaux ou internationaux », a lancé Mgr Raï, saluant par ailleurs « les efforts de nos frères druzes pour préserver leur spécificité face à toute domination, hégémonie ou tentative de dissolution ».
Sur la loi électorale, le patriarche s’en est tenu à une formule consensuelle générale, se disant pour une législation « garantissant le droit des citoyens résidents et émigrés à choisir leurs représentants » et de façon à ce que ces derniers « ne leur soient imposés ni par l’hégémonie politique ou numérique ni par l’argent ou les armes ».
« Les Libanais s’apprêtent à recevoir le pape Benoît XVI. Sa visite est historique. C’est une occasion qui montre au monde l’importance du Liban en tant que terre de paix, de rencontre et de dialogue entre les religions et les cultures et qui souligne son rôle dans son environnement moyen-oriental en tant que facteur constructif et créateur au niveau du développement global et de la diffusion des valeurs de la modernité et de la mondialisation », a-t-il dit.
« Notre vœu en tant que Libanais est de vivre en coopération et solidarité continuelles, chrétiens et musulmans, dans l’égalité et le respect mutuel, et d’être des messagers de paix, de dialogue et de développement en vue d’un véritable printemps arabe satisfaisant les aspirations et les besoins des peuples de la région », a-t-il conclu.
De son côté, M. Joumblatt, qui avait pris la parole en premier, a salué, lui aussi, les efforts du patriarche en vue de « consolider la coexistence, le pluralisme et le respect de la variété ». « Nous lui souhaitons le succès, du Akkar (où le patriarche a récemment effectué une tournée similaire) au Chouf et à partout ailleurs », a-t-il dit.
« Nous avions conclu avec son prédécesseur, Nasrallah Sfeir, la réconciliation de la Montagne. Il nous reste à souhaiter de refermer ensemble, si les circonstances le permettent, une plaie qui continue de saigner, celle de Brih », l’un des rares villages de la Montagne où la réconciliation druzo-chrétienne n’a pas encoe eu lieu du fait de litiges, notamment fonciers.
« Nous devons, au sujet de cette localité, nous entendre sur une chose, c’est qu’un certain nombre de ceux qui reviennent (chrétiens) et de ceux qui y sont (druzes) ont mis des entraves face à la réconciliation. La réconciliation des humains est plus importante que la pierre. Les maisons qui ont été construites sur les terrains d’autrui doivent disparaître », a lancé le chef du PSP.
M. Joumblatt a en outre souligné l’importance de la visite du pape au Liban et appelé les druzes à participer en masse à l’accueil du souverain pontife.
Auparavant dans la journée, le patriarche maronite avait poursuivi son périple dans la région du Chouf, où il a célébré une messe dans le village de Fouara.
Au cours de l’office qui a eu lieu en l’église Saint-Antoine-le-Grand, il a affirmé que « les chrétiens ne peuvent oublier leur identité (...). Ils sont porteurs d’un message au Liban et au Moyen-Orient ». Selon lui, la visite du pape renforcera ce « message de paix » dans la région.
Samedi, le patriarche avait entamé sa tournée dans le Chouf, au milieu de cortèges et de foules chrétiennes et druzes, par le village de Kneissé. Il s’est également rendu à Ammiq, Kfar Nabrakh, Fraydis, Barouk, Aïn Zhalta, Bmehray (caza de Aley), puis Beiteddine.
À Barouk, bourgade à majorité druze, Mgr Raï s’est rendu au devant du mausolée de cheikh Abou Hassan Aref Halawi, autorité spirituelle druze, décédé il y a quelque temps. Entouré de religieux chrétiens et druzes, le patriarche a récité une prière en mémoire du défunt et prononcé un hommage.
La tournée aurait dû inclure le village, à majorité maronite, de Kfar Qatra, mais un litige de préséance entre l’actuelle présidente du conseil municipal, Aline Nassar, et son prédécesseur, Wajih Nassar, a abouti à l’annulation pure et simple de l’étape, alors même que la localité avait été décorée pour l’accueil.
Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a clôturé hier une tournée de deux jours dans le Chouf par une visite au palais de Moukhtara, où l’attendait le chef du PSP, Walid Joumblatt.La visite s’est déroulée en présence de plusieurs personnalités politiques et religieuses, notamment les ministres joumblattistes et l’ensemble des députés de la région. Placée sous le signe du...

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