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Liban - Droits de l’homme

Faudrait-il créer une branche armée aux parents des détenus libanais en Syrie ? ...

Les parents des détenus libanais en Syrie dénoncent la léthargie du gouvernement et se demandent s’ils devraient constituer « une branche armée » pour que les responsables accordent plus d’importance à leur cause.

Dans le jardin Gebran Khalil Gebran au centre-ville de Beyrouth, des parents de détenus libanais en Syrie posent pour la énième fois devant des journalistes venus les rencontrer à l’occasion de la Journée mondiale des disparus (30 août).Photo tirée du groupe Facebook des familles des disparus libanais en Syrie

« Pourquoi ne pas créer une branche armée du comité des parents des détenus libanais en Syrie ? Peut-être que les responsables finiront à ce moment-là par nous accorder de l’importance ! »


Dans le jardin Gebran Khalil Gebran, place Riad el-Solh, au centre-ville de Beyrouth, Samia Abdallah sirote son café dans un gobelet en plastique, sous un soleil de plomb. Entourée de quelques mères, des compagnes dans le combat que les familles des Libanais détenus dans les geôles syriennes mènent depuis des décennies, elle lance d’un ton badin, qui cache une grande détresse et amertume, que « les parents » ont décidé d’avoir « leur branche armée, peut-être que cela nous permettra de faire avancer nos revendications ».


Samia Abdallah, dont le frère Imad est enlevé depuis 1984 alors qu’il avait 20 ans, ne cache pas sa colère. « Nous devons agir pour que notre gouvernement sorte de sa léthargie et accorde à notre cause l’attention qu’elle mérite, s’insurge-t-elle. Devons-nous, nous aussi, nous mettre à enlever des gens pour qu’on se décide à s’occuper de notre dossier ? Nous ne pouvons pas le faire ! Nous ne pouvons pas faire endurer à d’autres familles la souffrance que nous vivons depuis près de trois décennies. Il n’est pas dans nos habitudes de priver des personnes de leur liberté ni de descendre dans les rues et de déstabiliser la paix civile. C’est inconcevable. Nous voulons maintenir le caractère pacifique de notre mouvement. Malheureusement, le gouvernement conçoit cela comme étant une faiblesse. Nos responsables ne comprennent pas que nous ne recherchons que la vérité. Aujourd’hui, ils ne s’intéressent qu’à l’affaire des onze pèlerins (dix après la libération de Hussein Omar, le 25 août dernier), parce que les agissements de leurs familles les inquiètent. Nous aurions pu agir de la même sorte. Nous aurions pu couper les routes, mettre le feu aux pneus et enlever les gens. Nous ne l’avons pas fait parce que nous respectons notre gouvernement, qui, malheureusement, ne nous rend pas la pareille. »


Même son de cloche chez Halimé Jamal, plus connue sous le nom d’Oum Rachid. Cette femme attend des nouvelles de son fils, Rachid, depuis plus de 35 ans. Il avait 15 ans lorsqu’il avait été enlevé à Tripoli. « Aux yeux de notre État, nous ne sommes pas considérés comme des êtres humains », constate-t-elle. Elle reprend, d’une voix lasse : « Nous sommes ici tous les jours depuis plus de sept ans (les familles des détenus libanais en Syrie ont entamé leur sit-in permanent au jardin Gebran Khalil Gebran le 11 avril 2005, NDLR). Personne ne s’intéresse à nous. Je viens tous les jours de Tripoli. Parfois, je m’endette pour payer mes transports. Je continuerai à le faire jusqu’au dernier jour de ma vie parce que je veux mon fils. Je prie le bon Dieu pour qu’il me le rende sain et sauf. J’espère le tenir une dernière fois dans mes bras avant que je ne quitte ce monde. Mais qui se soucie de ma détresse ? Malheureusement, nos responsables sont aux abonnés absents. »


Adèle Saïd el-Hajj, dont le fils Ali a été enlevé en 1989 à l’âge de 22 ans, renchérit : « Nous ne faisons pas partie des familles qui enlèvent les enfants des autres pour faire entendre leur voix, mais apparemment, c’est le seul moyen qui pourrait aboutir à une solution, comme le prouve d’ailleurs l’affaire des onze pèlerins, puisque aujourd’hui seul leur dossier est en train d’être négocié. Nos responsables ne se soucient pas de leur peuple. Ils ne pensent qu’à assurer leur réélection. Depuis que nous sommes ici, ils ne nous ont accordé de l’importance qu’à la veille des législatives. D’ailleurs, ils n’offrent leurs services qu’à cette période. Une fois leur siège au Parlement assuré, ils nous oublient... jusqu’aux prochaines élections. »

Un nouvel espoir ...
Les discours politiques récents semblent confirmer les convictions des familles. Depuis quelques jours en fait, le dossier des détenus libanais en Syrie est remis sur le tapis par certaines parties politiques. « Depuis le début de notre sit-in, nous appelons à la formation d’une commission nationale chargée du dossier pour que celui-ci ne soit plus au cœur des tiraillements politiques, explique à L’Orient-Le Jour Ghazi Aad, porte-parole de Solide (Soutien aux Libanais en détention et en exil). Toutes les parties politiques, sans exception, ont fait partie des gouvernements qui se sont succédé. Elles n’ont jamais pris des mesures sérieuses pour résoudre le dossier. La preuve est que notre sit-in se poursuit depuis plus de sept ans. Malheureusement, ce dossier sert aux surenchères politiques. »
Et Ghazi Aad de poursuivre : « La libération de Yaacoub Chamoun prouve que notre cause est juste et que des Libanais disparus depuis plusieurs décennies pourraient encore être vivants. D’ailleurs, les familles osent espérer de nouveau. J’espère que les responsables politiques prendront des mesures sérieuses pour que ce dossier soit résolu définitivement. »


Pour Ghazi Aad, ce qui se passe aujourd’hui sur la scène libanaise « est condamnable ». « Le 7 août dernier, Solide a mis en garde dans un communiqué contre un éventuel retour aux opérations d’enlèvements, rappelle-t-il. Près d’une semaine plus tard, ceux-ci ont repris. Selon la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, ces kidnappings sont un crime contre l’humanité. Mais c’est le gouvernement qui est responsable de cette situation, en raison de sa négligence du dossier des pèlerins, comme cela a été le cas avec notre dossier. Peut-être que dans l’apparence, les responsables semblent accorder un quelconque intérêt à l’affaire des pèlerins, mais dans la pratique, le résultat est le même : le dossier n’est toujours pas résolu. D’ailleurs, le ras-le-bol des familles des otages qui ont investi les rues et ont agi suivant des considérations personnelles est une preuve brûlante de la négligence de l’État. Toutefois, l’insécurité qui s’est ensuivie est condamnable pour un gouvernement qui prétend que les systèmes de sécurité fonctionnent d’une manière optimale. »


Ghazi Aad déplore en outre « le silence de la communauté internationale qui, jusqu’à présent, n’a pas encore condamné l’enlèvement des pèlerins ni les kidnappings au Liban, comme si on cherchait à instaurer un climat d’insécurité ». « Mais la communauté internationale ne peut pas condamner des agissements commis par la partie qu’elle appuie, à savoir l’opposition syrienne, même si ceux-ci sont semblables aux pratiques du régime syrien, ajoute-t-il. Si Solide voulait suivre la tendance en vogue actuellement au Liban, on pourrait créer une branche armée et procéder à des enlèvements. Mais nous rejetons cette logique. Nous poursuivrons notre campagne et continuerons à mener des pressions sur l’État jusqu’à ce qu’il se décide à assumer ses responsabilités vis-à-vis du dossier. »

 

 

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commentaires (4)

Pauvres mères de ces Libanais disparus, c'est à dire enlevés par la tutelle de la dictature syrienne criminelle ! Bien sûr qu'elles devraient faire comme les autres voyous dans la République des voyous, pour que le gouvernement fasse quelque chose pour leur cause.

Halim Abou Chacra

05 h 41, le 03 septembre 2012

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Commentaires (4)

  • Pauvres mères de ces Libanais disparus, c'est à dire enlevés par la tutelle de la dictature syrienne criminelle ! Bien sûr qu'elles devraient faire comme les autres voyous dans la République des voyous, pour que le gouvernement fasse quelque chose pour leur cause.

    Halim Abou Chacra

    05 h 41, le 03 septembre 2012

  • Chaque famille Libanaise va créer une branche armée, une autre logistique, une autre pour enlèvements... et missions impossibles etc... tant que les familles, clans et bandes armées et aux cagoules se font honorer tous les jours sur les fenêtres des TV et autres Médias. 3AYB ! WAYNIL DAOULÉ ?

    SAKR LEBNAN

    02 h 35, le 03 septembre 2012

  • Il ne faudrait pas oublier Christine et Richard, les enfants de Odette Salem, fauchée par une voiture et décédée sans savoir le destin de ses enfants...

    Nayla Tahan Attié

    01 h 58, le 03 septembre 2012

  • Surtout une bonne couverture sociale et une assurance maladie ,c'est parents ont l'air vieux et fatigués ,faut dire que les désespoir ça use ... sauf.. chez les politiciens qui ne sont jamais désespéré de faire une bonne affaire...

    M.V.

    19 h 03, le 02 septembre 2012

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