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À La Une - L'Orient Littéraire

Saïd Akl de A à Z

À la fois poète, orateur, théologien et linguiste, Saïd Akl, dont on vient de célébrer le centenaire au palais de l’Unesco, restera une icône. Viscéralement attaché au Liban, chantre de la Phénicie, l’homme séduit ou étonne, mais ne laisse jamais indifférent. En guise d’hommage, nous avons glané dans ses entretiens des propos qui résument bien sa pensée et confirment à quel point ce personnage est inimitable.

Photo L'Orient Littéraire. D.R.

Alphabet
 
« L’alphabet libanais que j’ai créé comporte trente-six lettres (dont huit voyelles) rendant les phonèmes existant dans toutes les langues du monde. J’ai choisi les caractères latins à cause de leur universalité. Mon alphabet a un but : simplifier, permettre la clarté, ce qui n’exclut ni l’élégance ni la précision. Mon souhait est d’officialiser le libanais et de le substituer à l’arabe dans tout le pays. » 
 
Arabe
 
« Lorsqu’une langue n’est plus vraiment parlée, elle se sclérose très vite, ce qui entraîne chez ceux qui continuent à l’écrire une véritable sclérose de l’esprit. Les peuples attachés à la langue arabe sont atteints d’aphasie. Depuis six cents ans, ils sont emportés vers l’abîme. Au Moyen-Orient, les dialectes – l’égyptien, l’irakien, le saoudien, le libanais… – ont pris la relève de l’arabe écrit, lequel est maintenu artificiellement. La langue parlée, moins rigide, plus évolutive, plus malléable, a évincé la langue écrite. À terme, la langue arabe est condamnée à devenir une langue morte. Et si je suis devenu l’un des plus grands poètes arabophones, c’est justement afin d’acquérir la légitimité nécessaire pour affirmer cette idée. »
 
Beauté
 
« Dostoïevski affirmait que “la beauté sauvera le monde”. La beauté est l’harmonie suprême ; elle est Dieu. »
 
Culture
 
« Il n’y pas de création sans culture. Pour créer une œuvre brillante, il faut nécessairement être cultivé. La culture dissipe la peur et l’hésitation : la main de l’artiste ne tremble plus. »
 
Dieu
 
« Pour moi, un seul mot définit parfaitement Dieu : Dieu est qualité. »
 
Europe
 
« L’Europe, qui doit son nom à la fille d’Agénor, roi de Tyr, déborde la géographie de l’Europe actuelle. Qui peut parler d’Europe sans Byzance, Tarse, le Liban, Bethléem, les deux Alexandrie, Cyrène, Carthage ou Tagaste ? »
 
France 
 
« À l’époque de la monarchie, le rayonnement de la France était incomparable. C’était le cœur de l’Europe, la fille aînée de l’Église. Avec la Révolution qui s’est dévorée elle-même, le déclin de la France a commencé. »
 
Liban
 
« Ce que je souhaite, c’est donner une âme à mon pays. La vocation du Liban est d’empêcher que la civilisation ne recule, car il est à la fois témoignage et témoin. »
 
Négatif 
 
« Oscar Wilde nous conseille d’éliminer tout ce qui est négatif. Il ne faut garder que ce qui est positif. Il faudrait créer Qamous el-sama, un Dictionnaire du Ciel, ne comportant que des termes positifs (l’amour, la candeur…), à l’exclusion de tout vocable négatif. »
 
Patrie
 
« J’ai trois patries : le Liban, le monde et l’univers. »
 
Poème
 
« Le plus petit des poèmes peut contenir l’univers et embrasser l’éternité. Le poème est le voyage d’une âme enténébrée vers l’éblouissement des sphères astrales où Dieu seul est la fin. » 
 
Poète
 
« Il faut que le poète reste en constant état de grâce, à la fois conscient de son pouvoir sur les mots et sur la pensée qu’il exprime, et inconscient des moyens qui lui permettent de parvenir, par le truchement d’une extase comparable à celle de l’amour, à la création… C’est cette extase que le poète transmet à celui qui l’écoute et qui, en l’écoutant, oublie son moi particulier pour communier étroitement avec le poème. »
 
Religion
 
« S’il fallait corriger les religions, il faudrait en refouler le Dieu qui foudroie, qui tue, qui envoie en enfer, pour introniser le Dieu qui comprend et fait vivre. »
 
Saint
 
« Le premier saint est le larron crucifié en même temps que Jésus. Il fut sanctifié par le Christ lui-même ! »
 
Science
 
« Derrière tout chef-d’œuvre, il y a la science. La science est le summum du savoir. Même la poésie est fille de la science. »
 
Temps
 
« Si l’homme ne produisait pas, le temps n’existerait pas. Si l’homme produit, le temps devient espoir. Il faut, autrement dit, que chaque instant soit producteur de son temps. »
 
Union
 
« Dire que “l’union fait la force” est une aberration. L’union peut parfois se faire autour de l’erreur. Il serait plus exact de dire : la force est dans l’union autour de la vérité. La vérité assure la majorité contre les millions qui l’ignorent. Qui possède la vérité ne craint rien. »
 
Zahlé
 
« Enfant, quand j’écoutais la rivière Bardawni qui coule au milieu de Zahlé, je me promettais de composer plus tard des vers épousant son rythme ! » 
 
 
 
 
 
 
 
Saïd Akl in haka (Si Saïd Akl m’était conté), dont la seconde édition augmentée vient de paraître en arabe aux éditions Dergham, retrace l’itinéraire du grand poète libanais. L’auteur, Henri Zogheib, connaît bien son sujet puisqu’il a toujours été très proche de lui. Le lecteur suit avec intérêt le parcours de l’écrivain, depuis sa naissance à Zahlé à nos jours, découvre ses passions pour les lettres et les sciences, ses rencontres avec Senghor et Nazim Hikmet, son engagement politique, son rêve d’un alphabet libanais, ses rapports avec le théâtre et les Rahbani, ainsi que plusieurs poèmes en français, publiés en annexe. Un livre de référence, émaillé de photos rares et de citations édifiantes.
 
 
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« L’alphabet libanais que j’ai créé comporte trente-six lettres (dont huit voyelles) rendant les phonèmes existant dans toutes les langues du monde. J’ai choisi les caractères latins à cause de leur universalité. Mon alphabet a un but : simplifier, permettre la clarté, ce qui n’exclut ni l’élégance ni la précision. Mon souhait est d’officialiser le libanais...

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