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À La Une - Crise

Syrie : Pour une fois d’accord, opposition et presse officielle soulignent l’échec de la réunion de Genève

Divergences d’interprétation entre les membres du Groupe d’action eux-mêmes ; réunion aujourd’hui pour deux jours des rebelles au Caire ; au moins 77 morts hier.

À Zamalka, à 10 kms de Damas, la mort et la désolation après que des bombes du régime de Damas eurent interrompu des funérailles. Photo Youtube/AFP

Pour une fois qu’ils sont d’accord : la presse officielle syrienne et des opposants ont qualifié hier d’échec l’accord sur une transition politique décidé à Genève par le Groupe d’action sur la Syrie et la poursuite des violences semble le rendre difficilement applicable.


Dans ce contexte tendu, une réunion de deux jours de l’opposition syrienne doit s’ouvrir aujourd’hui au Caire. Des ministres de pays arabes devraient y participer.
Sur sa page Facebook, Bourhan Ghalioun, ancien chef du Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l’opposition, a qualifié de « farce » l’accord qui prévoit un gouvernement de transition pouvant inclure des membres du régime actuel. Il a ironisé sur le fait que les Syriens devaient négocier avec « leur bourreau, qui n’a pas cessé de tuer, torturer (...) ou violer des femmes » depuis le début de la révolte en mars 2011.
Dans un communiqué, le CNS a d’ailleurs indiqué que « le peuple syrien espérait que la communauté internationale adopterait des mesures plus sérieuses et efficaces face à ce régime » au « comportement sanguinaire », en soulignant que l’accord ne prévoyait pas de « mécanisme clair ni de calendrier. Aucune initiative ne sera acceptée par le peuple syrien sans qu’elle appelle clairement au départ de Bachar el-Assad et des tyrans qui l’entourent », a-t-il ajouté. Quant aux comités locaux de coordination (LCC), qui organisent la mobilisation sur le terrain, ils ont estimé pour leur part que les « tournures obscures » employées dans l’accord permettaient au régime « de jouer avec le temps » pour continuer « les massacres ».


Les autorités syriennes n’ont pas commenté cet accord, mais la presse officielle parlait elle aussi d’échec. « Aucun règlement de la crise n’aboutira s’il n’est pas basé sur l’avis du peuple syrien, source de la légalité. Les Syriens sont capables d’engager un dialogue national où il n’y a pas de place pour les pays voisins et les autres pays plus lointains, en particulier ceux qui incitent à tuer les Syriens », selon le journal du parti au pouvoir, al-Baas. Le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, Hussein Amir-Abdollahian, a également estimé que la réunion n’avait « pas été un succès », essentiellement parce que la Syrie et « des nations (comme l’Iran) ayant une influence sur les événements dans ce pays » n’avaient pas été invitées.

Fabius a dit
Les membres du Groupe d’action eux-mêmes ont divergé sur l’interprétation de l’accord, les États-Unis estimant qu’il ouvrait la voie à l’ère « post-Assad » tandis que la Russie et la Chine, alliées du président Assad, réaffirmaient qu’il revenait aux Syriens de choisir leur avenir. La réaction la plus forte est venue de Paris. L’accord du Groupe d’action sur la Syrie conclu samedi à Genève requiert implicitement le départ de Bachar el-Assad du pouvoir, a ainsi déclaré hier le chef de la diplomatie française. « Le texte dit précisément qu’il y aura un gouvernement de transition qui aura tous les pouvoirs, donc ce ne sera pas Bachar el-Assad », a dit Laurent Fabius sur TF1. « Il est dit que ce seront des personnes qui feront l’objet d’un consentement mutuel. Jamais l’opposition ne va accepter Bachar el-Assad. Donc, ça signifie implicitement que Bachar el-Assad doit partir. Bachar el-Assad, à terme, c’est fini », a souligné le ministre des Affaires étrangères. Quant à son homologue allemand, Guido Westerwelle, il est resté très flou, se contentant d’affirmer, également hier, que la rencontre de Genève était une « démonstration claire » de la volonté d’aboutir au niveau international à une solution politique au conflit.


Pour sa part, l’Iran a estimé que la réunion de Genève « n’a pas été un succès », du fait notamment de l’absence de Téhéran. « Il y a eu de fortes tensions entre la Russie et les États-Unis lors des réunions d’experts (...) et la réunion de Genève, comme les précédentes, n’a pas été un succès en raison de l’absence de la Syrie (gouvernement, NDLR) et des nations ayant une influence sur les événements dans ce pays », a ainsi jugé Hossein Amir-Abdollahian, vice-ministre des Affaires étrangères, à la télévision d’État, estimant, comme les Russes et les Chinois, que « toute décision imposée de l’extérieur sans la présence du gouvernement et du peuple syriens et sans un dialogue national ne donnera aucun résultat ».


Il a de nouveau dénoncé « les actions de certains pays étrangers qui envoient des armes en Syrie », en affirmant que cela « met en danger non seulement la sécurité de la Syrie, mais aussi celle du Proche-Orient et du monde ».
Rappelons que samedi à Genève, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité (États-Unis, Chine, Russie, France et Grande-Bretagne) mais aussi la Turquie et des pays représentant la Ligue arabe se sont accordés sur les principes d’une transition en Syrie, où la révolte contre M. Assad tourne au conflit armé. L’accord prévoit un gouvernement de transition qui « pourra inclure des membres du gouvernement actuel et de l’opposition et d’autres groupes, et doit être formé sur la base d’un consentement mutuel », a expliqué l’émissaire international Kofi Annan, architecte de la réunion, en précisant que l’avenir de M. Assad serait l’affaire des « parties syriennes ».
Le Conseil de sécurité devrait être saisi pour donner plus de poids au texte, qui prévoit ensuite l’application du cessez-le-feu officiellement en vigueur depuis le 12 avril, ainsi que la nomination de représentants du gouvernement et de l’opposition pour préparer la transition.

Place des Abbassides
Au total, les violences ont fait plus de 120 morts à travers le pays samedi, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), qui a déploré pour la journée d’hier la mort d’au moins 77 personnes, dont 51 civils, 19 soldats et deux rebelles, précisant que l’armée bombardait des localités à la périphérie de Damas et un quartier de Homs.
À Damas, des bruits d’explosions résonnaient un peu partout hier, les forces du régime du président Bachar el-Assad continuant de bombarder des localités à la périphérie de la capitale, selon des militants.
L’armée a visé avec des canons et des chars des localités de la Ghouta orientale, près de la capitale, ont indiqué l’OSDH et les LCC. Quatre civils ont été tués par des obus de mortier tombés sur Daraya, et un civil et un combattant rebelle ont péri lors de combats à Tal et à Douma, dans la province de Damas.
Dans la province de Hama, cinq civils dont deux femmes ont été tués par les tirs des forces armées postées autour de Hilfaya, et deux personnes ont été tuées, dont un rebelle mort dans des combats à Deir ez-Zor, une ville dont l’armée régulière tente de reprendre le contrôle, selon l’OSDH.


Dans la province de Deraa (Sud), deux enfants ont été tués par des bombardements à Khirbet Ghazalé et un civil a été tué par un tireur embusqué dans la ville même de Deraa. Dans le nord du pays, l’armée bombardait la ville d’Atareb, et un combattant rebelle a été tué lors de combats à Daret Azza.
À Homs, plusieurs quartiers de la ville étaient bombardés, et un homme a péri dans le quartier de Jouret al-Chiyah, où des témoins ont fait état d’immeubles écroulés avec des victimes sous les décombres, selon l’OSDH. Dans le caza, la ville de Qousseir a été violemment pilonnée. Enfin, à Idleb, trois civils ont été tués par des bombardements et des tirs dans la localité de Dana et à Maaret al-Naaman.


Tard dans la nuit, la chaîne de télévision al-Jazira évoquait des combats lourds entre soldats loyalistes et Armée syrienne libre (ASL) dans le quartier Jawbar à Damas. Quant à el-Arabiya, elle a fait état, peu après 23h00, de combats intensifs place des Abbassides, toujours dans la capitale.
L’OSDH a lancé un appel à l’aide pour Douma, à l’est de Damas, où des dizaines de personnes ont été tuées et des centaines d’autres blessées dans des bombardements incessants ces derniers jours et où la situation humanitaire est « catastrophique à tous les niveaux ».

Lire aussi, nos reportage au Liban : 

Les réfugiés syriens, de la souffrance physique à la souffrance psychique

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