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L’euthanasie, crime ou droit de mourir dans la dignité ?

Celui qui commet « l’impossible » doit-il être condamné comme un assassin ?

Me Hady Rached : « Une loi légalisant l’euthanasie sera extrêmement difficile à contrôler. »

« Au regard du droit libanais et en l’absence de loi spécifique – le mot euthanasie n’étant évoqué dans aucun article du code pénal –, la mort douce est qualifiée de meurtre », estime Me Hady Rached, membre de la commission parlementaire de Rénovation des lois et enseignant universitaire.
La loi pénalise l’euthanasie active constitutive d’infractions pénales (crime, empoisonnement...). Le fait de donner volontairement la mort à autrui constitue un meurtre, indépendamment du mobile. Peu importe que l’acte ait été provoqué en vue de soulager les souffrances d’une personne ou pour lui nuire. Il s’agit, conformément à l’article 552 du code pénal, d’une pratique tout à fait illégale passible d’une détention pouvant aller jusqu’à dix ans de prison, même si le passage à l’acte a été fait sur demande expresse de la personne et suite à un élan de compassion, précise le même article.
« Tout individu qui contribue à sa réalisation sera poursuivi comme coauteur ou complice, et encourra les mêmes sanctions pénales, ajoute Me Rached. Par ailleurs, le nouveau projet de loi visant l’amendement du code de déontologie médicale réitère sa condamnation de l’acharnement thérapeutique et précise que le rôle du médecin doit se limiter à alléger les souffrances autant que possible, le médecin n’ayant pas le droit de provoquer la mort (article 27 du code de déontologie). »

Faut-il légaliser l’euthanasie ?
« Je suis fatiguée de me taire, se révolte Zeina. Ceux qui croient que ça n’arrive qu’aux autres s’octroient le droit de juger, au mépris de la plus élémentaire compassion. J’ai demandé l’injection à ma mère d’un produit létal, pour lui épargner l’étouffement, et abréger son agonie. J’ai respecté sa volonté. Je ne regrette rien ! Il est temps de changer, d’avouer, de sortir de l’hypocrisie et de combattre pour une nouvelle loi d’exception face à des situations exceptionnelles. »
À ce cri de colère, Me Rached répond qu’en ce qui concerne la légalisation de l’euthanasie, « la réflexion des juristes ne semble pas pour l’instant avoir beaucoup avancé, mais de nombreux militants se sont au contraire prononcés ». « Ils considèrent que le choix de la vie est un droit inhérent à la liberté de la personne humaine, au même titre que la liberté de croyance ou d’expression, poursuit-il. Toutefois, en dépénalisant l’euthanasie, peut-on oublier de nombreux cas sordides, ceux des familles ou des proches qui viennent demander l’euthanasie du patient pour des raisons non avouables ? Raisons qui vont de l’intérêt pour l’héritage à l’inconfort occasionné par la présence du patient, en passant par les pressions financières sur un malade pauvre. Ou encore celles d’équipes soignantes qui, pour des raisons économiques, choisissent parfois d’interrompre la vie lorsqu’elles sont pressées de libérer un lit ? La légalisation de l’euthanasie ne viendrait-elle pas légitimer les dérives et banaliser de tels actes abusifs ? Ce faisant, serait-on réellement en train de servir l’humanité souffrante ? »
Me Rached considère que « la loi n’a pas besoin de prévoir de nouvelles exceptions à l’interdiction de tuer son prochain ». Et de poursuivre : « Il suffit de se montrer humain et compréhensif devant les situations personnelles et dramatiques. D’ailleurs, même si elle pose la plus sévère des restrictions, une loi légalisant l’euthanasie sera extrêmement difficile à contrôler. Le médecin face à son patient est toujours dans un rapport de personne à personne. Sa relation avec le patient relève donc de l’intime et la loi ne peut s’immiscer efficacement dans une telle relation. D’où la grande difficulté pour une loi de pouvoir toucher à une mort donnée en coulisse. »
« Mieux vaut des procès qu’une loi couvrant de manière anticipée toute personne qui se prévaudrait d’une “exception” d’euthanasie avec ses éventuels abus », conclut Me Rached.
« L’euthanasie est une question qui préoccupe plus les bien-portants que les malades », dit-on. Force est de constater que les enjeux sont hors proportions.
Les choses sont toujours plus compliquées qu’elles n’en ont l’air, et nul ne peut réellement prévoir ce que sera sa réaction au moment précis où on lui proposera « une mort douce » pour ce qui le concerne, ou ce qui concerne l’un de ses proches dont la fin est imminente...
Il serait souhaitable qu’on n’en reste pas à un pur échange d’arguments et que ceux qui perçoivent les dangers d’un développement des pratiques euthanasiques reconnaissent ce qui pousse à un tel développement, notamment l’indéniable difficulté de vivre dans la durée la proximité avec la mort.
La demande d’une mort accélérée est évidemment celle du malade. Mais n’est-elle pas aussi le fruit de l’influence de son environnement culturel, familial et social ?
« Au regard du droit libanais et en l’absence de loi spécifique – le mot euthanasie n’étant évoqué dans aucun article du code pénal –, la mort douce est qualifiée de meurtre », estime Me Hady Rached, membre de la commission parlementaire de Rénovation des lois et enseignant universitaire.La loi pénalise l’euthanasie active constitutive d’infractions pénales (crime,...