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Liban - Dans les coulisses de la diplomatie

Israël exploite à fond l’explosion du dépôt de munitions à Kherbet Selm

Plongé dans les polémiques sur la proportionnelle, le tiers de blocage et le sens concret que doit revêtir la victoire électorale du 14 Mars, le Liban politique ne réalise pas suffisamment la gravité de l'explosion d'un dépôt de munitions à Kherbet Selm. Israël, toujours à la recherche d'un prétexte pour conforter ses menaces et justifier leur éventuelle concrétisation, a aussitôt saisi Ban Ki-moon. En demandant à sa déléguée à l'ONU, Gabriela Shilo, de remettre au secrétaire général une note de protestation « contre la violation flagrante et dangereuse de la 1701 » que constitue l'explosion.
Des sources diplomatiques européennes estiment, à Beyrouth, que la réaction de Tel-Aviv est hors de propos puisque l'explosion s'est produite à l'intérieur du territoire libanais, sans viser les positions frontalières israéliennes. Après la guerre de juillet 2006, des armes et des munitions dormantes du Hezbollah sont restées, comme on le voit avec cette affaire, dans la zone de la Finul. Mais Israël prétend que le parti continue d'y alimenter ses entrepôts en armes et en équipements.
Selon les sources citées, en intervenant auprès de Ban Ki-moon, Israël tente d'instiller une méfiance entre la Finul et l'armée libanaise, codéployées sur la ligne bleue. Pour l'occasion, Israël fait mine de défendre ces Casques bleus qu'il accuse pourtant régulièrement de laxisme dans l'application de la 1701. L'État hébreu affirme, depuis mardi, que des militaires libanais présents à proximité du lieu de l'explosion ont entravé les déplacements de la Finul en direction du site. Pour permettre au Hezbollah, toujours selon les Israéliens, d'effacer les indices de terrain prouvant qu'il continue ses activités dans la zone qui lui est interdite. Ces assertions sont développées dans la protestation israélienne remise à Ban Ki-moon et dont la délégation libanaise à l'ONU a pu recevoir copie.

Ordre de désobéissance civile ?
Mais il n'y a pas que le bras de fer diplomatique. Sur le terrain même, une confrontation à coups de cailloux et de bâton a opposé des Sudistes à une patrouille blindée de la Finul qui se dirigeait vers Kherbet Selm, dans le cadre d'une enquête commune avec l'armée libanaise sur l'explosion du dépôt. Le contingent français pris à partie a été soutenu par des Italiens et l'un des soldats a tiré deux balles. L'échauffourée a fait 14 blessés, selon les communiqués respectifs de l'armée et de la porte-parole de la force internationale, Yasmina Bouziane. Ces textes précisent qu'aucun des habitants impliqués n'a été atteint et que l'enquête envisagée a été, de fait, empêchée.
L'explosion de Kherbet Selm et surtout ses suites font craindre que nombre de pays participant à la Finul ne décident de s'en retirer pour protéger leurs soldats. C'est ce que confirment nombre de dépêches diplomatiques parvenues à Beyrouth de diverses capitales occidentales. Les gouvernements concernés estiment que la mission de la Finul n'est pas de se battre contre la population, mais d'appliquer la 1559 et la 1701 pour sécuriser la région. La Finul, ajoutent-ils, n'est pas une force de frappe réprimant l'un ou l'autre des protagonistes en présence, et encore moins une force de police opérant auprès de la population dite civile.
À New York, le commandement de la Finul, hautement alarmé, multiplie les concertations avec les pays contributeurs pour prendre des mesures en vue de prévenir la répétition de l'affrontement survenu au Sud ainsi que de soudaines agressions contre les Casques bleus. Selon des informations concordantes, ces précautions pourraient entraîner une modification de la carte de déploiement, et de garnison, des contingents de la Finul. Une des capitales les plus concernées par le dossier ne cache pas sa crainte qu'une reprise des incidents ne se solde par un lourd bilan de victimes et de blessés du côté des Casques bleus. Auquel cas beaucoup de contingents partiraient.
Ils ont d'ailleurs commencé, un peu, à y songer, il y a quelques mois, quand des Sudistes ont attaqué à coups de cailloux des Casques bleus parce qu'ils prenaient des photos. Puis quand des villageois ont bruyamment protesté contre l'entrée, dans leur localité, d'une patrouille de la Finul, sous prétexte qu'elle venait les intimider.
Les diplomates accrédités à Beyrouth relèvent que la tentative israélienne d'exploitation de l'explosion du dépôt d'armes à Kherbet Selm est d'autant plus marquée que, selon le chef de la Finul, le général Claudio Graziano, comme selon les rapports semestriels de Ban Ki-moon au Conseil de sécurité, la coopération entre les deux commandements est excellente.
Du côté des officiels libanais, on se préoccupe de tenter de rétablir la confiance entre la population sudiste et les Casques bleus, qui se sentent désormais pris pour cible. Des responsables recommandent que l'on organise des rencontres entre les contingents et des représentants de la population pour rétablir le climat positif qui régnait, globalement, avant l'affaire de Kherbet Selm. Ils soulignent qu'il ne faut pas faire le jeu d'Israël, qui ne cesse de violer l'espace aérien libanais et la 1701, et de jouer sur une discorde libano-onusienne.
Cela étant, les pôles locaux, englués dans les dédales ministériels, devraient se rendre compte que le Sud, de nouveau en ébullition, redevient une poudrière que nombre de contingents de la Finul risquent de fuir bientôt, ce qui rendrait la situation encore plus explosive.
Plongé dans les polémiques sur la proportionnelle, le tiers de blocage et le sens concret que doit revêtir la victoire électorale du 14 Mars, le Liban politique ne réalise pas suffisamment la gravité de l'explosion d'un dépôt de munitions à Kherbet Selm. Israël, toujours à la recherche d'un prétexte pour conforter ses...

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