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Liban

La justice en marche

Le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) a enfin vu le jour hier à La Haye, un peu plus de quatre ans après l'assassinat de Rafic Hariri. Une cérémonie a eu lieu à cette occasion dans les locaux du TSL, où l'accent a été mis sur la marche de la justice et l'indépendance du tribunal.

Le vieux gymnase qui sera aménagé dans les prochains mois en prétoire pour le Tribunal spécial pour le Liban, dans un bâtiment de Leidschendam, dans la banlieue de La Haye, a été le lieu choisi hier pour la cérémonie marquant le début des travaux du tribunal qui doit juger les coupables de l'assassinat de Rafic Hariri et des autres attentats terroristes.
Le mardi 24, une conférence de presse s'était tenue dans cette même salle, animée par Robin Vincent, le greffier en chef du TSL.
Hier, dimanche, M. Vincent était le maître de cérémonie qui a présenté successivement, après un bref préambule, Patricia O'Brien, assistante du secrétaire général de l'ONU pour les affaires juridiques et conseillère juridique de l'ONU, Zeidan el-Saghir, ambassadeur du Liban aux Pays-Bas, Rob Zaagman, chargé des organisations internationales au ministère néerlandais des Affaires étrangères, et Daniel Bellemare, procureur général du TSL, venu de Beyrouth pour prendre en charge ses fonctions au siège de cette instance.
Au premier rang, devant les représentants de la presse, avaient pris place des diplomates représentant des pays amis du Liban et donateurs qui ont permis de créer ce que l'on peut considérer comme étant le premier tribunal international statuant en matière de terrorisme.
Au terme de ces allocutions, M. Bellemare et les autres personnalités du panel ont répondu aux questions des journalistes, sous la direction de la responsable de la communication, Suzan Khan.
Après les préliminaires et une minute de silence observée à la mémoire des victimes des attentats du Liban, l'emblème du TSL a été présenté à l'assistance. Il est formé d'un cèdre, d'une balance et de deux branches de lauriers superposées, emblème de l'ONU.

Une « transparence totale »
« Nous ne sommes pas ici pour les Nations unies ni pour la communauté internationale, mais pour le Liban », a déclaré M. Vincent. « Nous ne sommes pas ici pour les tueurs, mais pour les victimes. »
Mme O'Brien a commencé par définir le Tribunal spécial pour le Liban comme étant « un jalon sur la voie de l'action de la communauté internationale en vue de mettre fin à l'impunité au Liban pour les crimes terribles qui ont tragiquement coûté la vie à l'ancien premier ministre Rafic Hariri et d'autres personnes lors de l'attaque du 14 février 2005 ainsi que pour les autres attentats commis ultérieurement ».
La secrétaire générale adjointe de l'ONU a souligné ensuite les spécificités du TSL, notamment en matières procédurale et structurelle, rappelant l'importance du travail effectué depuis les premiers moments de la création de cette instance internationale par son prédécesseur, Nicolas Michel, qui a travaillé en étroite coopération avec les autorités libanaises durant ces deux dernières années.
Elle a insisté sur l'indépendance du tribunal qui, a-t-elle dit, est « une institution impartiale » dont le statut assure « une transparence totale », notamment dans la méthode suivie pour la nomination des magistrats libanais et étrangers et des procureurs et aussi en matière de droits des accusés.
Parmi les autres caractéristiques et spécificités du TSL, Mme O'Brien a indiqué la provenance des fonds requis pour son fonctionnement, fonds assurés, comme on le sait par le Liban dans une proportion de 49 pour cent, le reste étant assuré par des pays amis donateurs volontaires.
Le fait que le siège du tribunal soit La Haye, a ajouté l'assistante du secrétaire général, assure un environnement plus sain et accorde des garanties considérables en matière d'indépendance, de transparence et de garantie des droits des accusés et des témoins ainsi qu'une meilleure protection de tous les acteurs de ce gigantesque procès. Elle a fait l'éloge des Pays-Bas et de leur longue tradition en matière de justice et d'indépendance.
Elle a enfin insisté sur le fait qu'il faut que la justice rendue soit visible et a mis en relief le rôle des médias à cet égard, notamment en rendant compte des travaux du tribunal d'une manière régulière pour que l'opinion publique libanaise en soit informée en premier lieu et pour que les Libanais reprennent confiance après les terribles secousses auxquelles ils ont été soumis.
Prenant la parole à son tour, l'ambassadeur du Liban a estimé qu'en créant ce tribunal, les Nations unies et la communauté internationale répondent à l'appel du Liban qui demande que justice soit faite pour un crime odieux qui a secoué le monde.
« Seule une telle instance internationale rétablira la confiance dans les cœurs et les esprits des Libanais », a ajouté l'ambassadeur qui a estimé que grâce au TSL, les Libanais se sentiront à nouveau en sécurité et les criminels sauront qu'ils ne pourront plus échapper au châtiment qu'ils méritent.
« Nous ne demandons que la justice », a conclu M. Saghir qui a indiqué que le Liban ne saurait se relever et se reconstruire si les Libanais ne se sentent pas à nouveau en sécurité et si la stabilité n'est pas rétablie dans leur pays.
Prenant la parole au nom du pays hôte, M. Zaagman a rappelé la longue tradition de son pays en matière de promotion du droit et de la justice, précisant que la communauté internationale a confié, au fil du temps, à La Haye la charge d'accueillir trente-deux organisations internationales, dont les plus prestigieux tribunaux internationaux.
Il a ajouté : « Les Pays-Bas n'interviennent nullement dans les procédures et notre rôle se limite à accueillir le tribunal et à lui permettre de fonctionner avec souplesse et efficacité. » « Cela signifie que nous devons pourvoir à ses besoins (locaux, sécurité) et accorder privilèges et immunités à son personnel. Nous devons également faciliter l'entrée sur le territoire des prévenus et des témoins », a-t-il ajouté.
« Comme pour les autres instances, cours et tribunaux internationaux aux Pays-Bas, il a été clairement convenu que les condamnés purgeraient leur peine hors de notre pays, de même que les personnes acquittées et les témoins protégés seraient hébergés dans un autre État. Notre contribution consiste à mettre à disposition le bâtiment dans lequel nous nous trouvons et à assurer la sécurité externe », a-t-il conclu.

« Vous nous avez donné l'espoir »
De son côté, M Bellemare a commencé son discours en citant les propos d'un officier libanais qui lui a dit il y a deux jours au moment où il s'apprêtait à quitter définitivement Beyrouth : « Monsieur le procureur, nous vous avons donné la sécurité, vous nous avez donné l'espoir »...
« Si c'est à la fois un honneur et un privilège d'être associé au tribunal spécial pour le Liban, c'est aussi une expérience d'humilité qui porte en elle-même une très lourde responsabilité », a ajouté M. Bellemare.
« Conscient de ce fait, nous ne pouvons toutefois pas nous détourner de notre mandat. Nous devons rester concentrés sur la recherche juste et impartiale de la vérité, quelle que soit cette vérité et où qu'elle se trouve », a-t-il dit. Il a ensuite martelé : « Je le répète, je ne vais pas déposer un acte d'accusation de complaisance... L'exercice du pouvoir discrétionnaire des poursuites judiciaires est une très lourde responsabilité. Les résultats peuvent affecter la vie d'êtres humains. L'exercice du pouvoir discrétionnaire des poursuites judiciaires ne peut être traité à la légère. Il doit être exercé de manière responsable, sur la base de preuves solides. Les actes d'accusation ne seront déposés que lorsque je serai convaincu que je dispose de suffisamment de preuves pour rencontrer mes critères de poursuite judiciaire. »
Et de poursuivre : « Demain 2 mars, nous sommes de retour au travail. En tant que procureur, je vais poursuivre mon enquête. Je vais maintenant mener l'enquête avec l'assistance des autorités judiciaires libanaises. En tant que procureur, je veillerai à ce que l'enquête se poursuive selon les normes de la justice internationale et selon les règles de procédure et de preuves du TSL, lesquelles seront bientôt adoptées. »
« Nous continuerons à avoir besoin du soutien du peuple libanais qui nous a confié cette quête de vérité et de justice », a-t-il conclu.
À l'heure des questions-réponses, c'est encore M. Bellemare qui a été à l'avant-garde. Il s'est montré très circonspect sur des questions telles que les délais qu'il lui faudra pour terminer son enquête et passer au stade suivant. Il n'a cessé de dire qu'il a besoin de temps et qu'il fera tout avec précision et en prenant le temps qu'il faudra.
Il a renvoyé au tribunal lui-même les grandes décisions se rapportant aux accusés, témoins et aux autres éléments relatifs aux étapes de l'accusation, des procédures et de l'exécution des mandats de quelque nature que ce soit.
Il a répété, comme lors de son exposé, qu'il fera tout avec méticulosité, dans un esprit d'indépendance et qu'il ne se soumettra à aucune sorte de pression.
L'ambassadeur Saghir a répondu à un journaliste qui lui demandait si, en cette période trouble qui règne dans le pays, le Liban peut « payer le prix » du TSL. « Le Liban a déjà payé un lourd tribut, maintenant il demande que justice soit faite », a dit l'ambassadeur.
Le vieux gymnase qui sera aménagé dans les prochains mois en prétoire pour le Tribunal spécial pour le Liban, dans un bâtiment de Leidschendam, dans la banlieue de La Haye, a été le lieu choisi hier pour la cérémonie marquant le début des travaux du tribunal qui doit juger les coupables de l'assassinat de Rafic Hariri et des...

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