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Moyen-Orient - Éclairage

Sous le regard passif de Moscou, Ankara assène une leçon à Damas

Deux avions de combat ont été détruits hier par l’artillerie turque.

À Ankara, hier, lors des funérailles d’un soldat turc tué lors de frappes du régime dans la province d’Idleb la semaine dernière. Adem Altan/AFP

En neuf ans de guerre, le régime syrien n’avait jamais eu d’adversaire pouvant répondre à ses bombardements intensifs. Il en a désormais un. Les avions de guerre syriens qui terrorisent la population à Idleb sont désormais la cible de l’artillerie turque. Pour le président turc, la mort de 34 soldats jeudi dans des raids à Idleb, attribués par la Turquie au régime de Damas mais auquel Moscou pourrait avoir participé, ne pouvait rester sans réponse. Samedi, Recep Tayyip Erdogan était apparu déterminé à se venger, sommant son homologue russe Vladimir Poutine de « s’écarter du chemin » de la Turquie en Syrie. Il a assuré que le régime de Damas allait « payer le prix » de ses attaques. Ankara ne peut pas se permettre de perdre le contrôle de cette zone voisine et stratégique à partir de laquelle risquent d’affluer encore des centaines de milliers, voire des millions de réfugiés, alors qu’il en accueille déjà 3,5 millions sur son sol, qu’il veut relocaliser dans le nord de la Syrie. Après plusieurs semaines d’une escalade entre les deux forces armées, Ankara a confirmé hier le lancement d’une offensive militaire d’envergure baptisée « bouclier de printemps ». Une occasion qui pourrait « créer une force de dissuasion bien nécessaire contre tout nouvel empiétement du régime sur Idleb et ses attaques contre les civils », estime Waël al-Zayat, ancien conseiller auprès de l’ambassadrice américaine à l’ONU, Samatha Power.

Preuve que l’opération a atteint un niveau supérieur, deux avions de combat syriens ont été abattus hier après-midi au-dessus de la province d’Idleb. Les deux pilotes ont pu s’extraire et ont été secourus, alors qu’un drone turc a été détruit par l’armée loyaliste. Les frappes turques vont « limiter la capacité de l’armée syrienne en tant que force de combat à Idleb, même de manière temporaire », estime Danny Makki, un analyste syro-britannique, contacté par L’Orient-Le Jour. « L’armée syrienne a subi de graves pertes humaines et matérielles au cours de la semaine, notamment parce qu’elle n’a pas de défense adéquate pour faire face aux attaques aériennes, mais aussi parce que ses troupes sont dispersées le long de la ligne de front, ce qui en fait des cibles faciles », explique l’analyste. En quatre jours à peine, l’armée turque aurait ainsi détruit un drone, huit hélicoptères, 103 chars, 72 obusiers, des lance-roquettes, et six systèmes de défense antiaérienne ont été pulvérisés. 2 212 soldats des forces syriennes auraient également été « neutralisés », terme généralement utilisé pour signifier tués, blessés ou capturés. Près de 90 combattants du régime et de ses alliés ont été tués vendredi et samedi, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme. Parmi eux, plusieurs hauts gradés expérimentés ayant participé à différentes offensives de Damas.



(Lire aussi : Devant l’offensive turque, le Hezbollah paie un lourd tribut à Idleb)



Laisser Ankara se défouler
Prise visiblement de court par la réaction turque, l’armée syrienne a averti hier qu’elle abattrait tout avion « ennemi » au-dessus de la région d’Idleb. Mais sans les moyens adéquats, et surtout sans couverture aérienne de son allié russe, le régime syrien ne peut résister longtemps à une offensive turque de grande ampleur.

« L’armée syrienne a été fortement tributaire de la puissance aérienne russe, qui a été le facteur décisif dans toutes ses offensives depuis 2015. Le rôle de la Russie est donc crucial pour permettre à l’armée syrienne de poursuivre l’offensive à Idleb », poursuit Danny Makki. Or, le principal soutien de Damas s’est fait extrêmement discret ces derniers jours. Moscou n’a pas activé ses missiles de défense antiaérienne, les S300, laissant le régime à la merci des raids d’Ankara. « Après la mort des militaires turcs, la Russie était prête à laisser Ankara se défouler à Idleb, de peur qu’il se montre rancunier envers le gouvernement russe », estime Timur Akhmetov, expert au Russian International Affairs Council. Les deux pays ont clairement fait comprendre qu’ils ne cherchaient pas la confrontation directe, alors qu’une rencontre entre Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan est prévue jeudi. Si la Russie a déjà bombardé des positions turques à Idleb durant les semaines précédentes, elle ne veut se risquer davantage face à ce membre de l’OTAN. Non seulement Moscou ne souhaite pas déployer massivement ses forces, mais la région d’Idleb ne représente pas pour le Kremlin un enjeu stratégique. En revanche, l’intérêt pour les Russes est de parvenir à contenir la colère d’Ankara avant l’annonce d’un nouvel accord sur Idleb jeudi. « Moscou sait qu’il y a une ligne que la Turquie ne devrait pas franchir et si elle poursuit son offensive et ses frappes contre l’armée syrienne, la Russie sera sous pression pour s’impliquer et stabiliser la situation », estime Danny Makki. À la fois acteur et arbitre, Moscou espère faire comprendre au régime de Damas, mais aussi à Téhéran, qui a également essuyé des pertes lors des récents raids turcs, qu’ils devront faire des concessions afin de calmer le jeu. « La Russie est notamment restée passive lors des raids turcs contre les forces loyalistes syriennes afin de démontrer que sans le soutien de la défense aérienne russe, l’armée syrienne peut être vulnérable aux attaques de puissances étrangères comme la Turquie ou Israël, qui utilisent occasionnellement leurs forces aériennes dans le ciel syrien », explique Timur Akhmetov.

« Moscou ne cherche pas une confrontation totale avec la Turquie, mais il n’a pas montré sa volonté ou sa capacité à maîtriser le régime syrien et l’Iran. C’est lui qui jusque-là a mené la majorité des frappes aériennes contre Idleb en leur nom », nuance toutefois Waël al-Zayat.



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En neuf ans de guerre, le régime syrien n’avait jamais eu d’adversaire pouvant répondre à ses bombardements intensifs. Il en a désormais un. Les avions de guerre syriens qui terrorisent la population à Idleb sont désormais la cible de l’artillerie turque. Pour le président turc, la mort de 34 soldats jeudi dans des raids à Idleb, attribués par la Turquie au régime de Damas mais...

commentaires (12)

Les guerres fratricides , communautaires ,de domination ou guerres militaires par personnes interposés : les jihadistes , les turcs , les kurdes , et enfin les guerres froides : sanctions économiques et guerres économiques . Et on a appris : notre ennemi est ipso facto un terroriste . OH mon Dieu , on aurait tout vu durant notre vie . ''Si dure '' .

Lecteurs OLJ 2 / BLF

15 h 19, le 03 mars 2020

Tous les commentaires

Commentaires (12)

  • Les guerres fratricides , communautaires ,de domination ou guerres militaires par personnes interposés : les jihadistes , les turcs , les kurdes , et enfin les guerres froides : sanctions économiques et guerres économiques . Et on a appris : notre ennemi est ipso facto un terroriste . OH mon Dieu , on aurait tout vu durant notre vie . ''Si dure '' .

    Lecteurs OLJ 2 / BLF

    15 h 19, le 03 mars 2020

  • Ce n'est qu'une page faisant partie d'un nouveau chapitre du long calvaire de la Syrie qui a osé répandre le sang du peuple Libanais pendant prés d'un siècle de règne du régime Nazi Syrien. Se réjouir n'est pas de mise lorsque des gens meurs atrocement, même s'ils sont vos ennemis, mais la guerre est la pour nous rappeler certaines réalités: La Russie ne lâchera pas la Syrie. Bashar? Peut être lorsqu'il deviendra gênant et inutile. La Turquie ne lâchera pas la Syrie non plus car elle s'en sert pour le front interne, mais aussi international spécialement concernant Chypre. D’où sa tentative de mêlé l'OTAN et l’Europe en Syrie afin de les neutraliser alors qu'elle a perdu leurs soutient pour le cas Chypriote. Sur le front interne Erdo va au plus mal et risque de se voir éjecté. Il table sur les problème régionaux pour améliorer son image de raté. Sur le plan international, la Turquie se rend compte que l'Europe et les USA vont commencer les pressions concernant Chypre ou il devra se retirer et se faire une raison. La France et les USA se servent de l’île comme base militaire pour la protection de leur investissements dans la région et bientôt, avec les sanctions, nous les auront aussi sur le dos pour se charger de Hezbollah l’éternel Dindon de le farce!

    Pierre Hadjigeorgiou

    13 h 34, le 03 mars 2020

  • "la Russie était prête à laisser Ankara se défouler à Idleb" ah oui? vraiment!? Donc la vie, la jeunesse et le potentiel de ces jeunes Libanais tués par les forces turques n'étaient qu'un cadeau par la Russie à la Turquie pour amadouer erdo !? Leurs mères, leurs pères et leurs familles dans tout ça!!!??? Qui séchera leurs larmes, qui trouvera l'explication réelle pour les convaincres que leurs enfants se sont fait massacrer dans un jeu de gonflés et de vantards? Quel sale jeu et quel sale façon de traiter nos compatriotes!! Allah yirhamoun wou yirham chabéboun!!

    Wlek Sanferlou

    02 h 10, le 03 mars 2020

  • Ça commence : La Russie montre ses crocs à la Turquie en envoyant des navires de guerre en Syrie

    Chucri Abboud

    16 h 08, le 02 mars 2020

  • C’est un avant-gout de ce qui attend Bachar quand les Russes commenceront à en avoir marre de protéger cet incapable face au monde entier. La Syrie est ruinée et les seules qui peuvent payer exigeront la tête du tyran pour participer a la reconstruction quitte à s’arranger avec Poutine pour le maintien des bases Russes. L’armée syrienne n’existe pas et sans l’appui massif du Hezbollah, Afghans et autre supplétifs Iraquiens il y a longtemps qu’elle serait effondré comme un château de carte. Bachar connaitra au mieux (pour lui) le sort de Omar Béchir livré au TPI ou au pire à celui de Najibullah dictateur Afghan qui s’est retrouve bien seul après le départ des Soviétique et a fini pendu a un poteau de Kaboul. Seuls les naïfs croient que Poutine ne laissera pas tomber le sous Fife local quand il en aura encaisse le prix. Pour preuve il n’y a qu’a voir la facilite avec laquelle Israéliens et Turcs sont autorisés à humilier la sois disant armée du petit tyran insignifiant qui aura en 15 ans dilapide ce que son père a mis 30 ans à construire

    Liban Libre

    15 h 32, le 02 mars 2020

  • donc 70 turcs entre blesses et tues pour 2200 syriens et suppletifs ... mazette ! belle victoire du heros Bashar LoooooL Allez, encore 2 ou 3 victoires comme ca svp LooooL

    Lebinlon

    14 h 52, le 02 mars 2020

  • Merdogan a perdu , tout perdu , il agit maintenant comme un désespéré suicidaire ! Au même moment , les forces de Bachar viennent de rentrer à Saraqeb, une ville clé d'Idleb ! Merdogan ira demain pleurer sur les épaules de Saint Vladimir à Moscou afin d'implorer un petit sursis à sa défaite cuisante ! ÉCHEC ET MAT CONTRE LA TURQUIE !

    Chucri Abboud

    14 h 20, le 02 mars 2020

  • Lorsque deux tyrans égocentriques se retrouvent nez à nez pour régler leurs problèmes le résultat peut s’avérer moche, très moche pour tous ceux qui se trouveraient sur leur chemin. Un conseil gratuit pour les autorités libanaises ou plutôt une exigence que notre pays reste en dehors de ce mig mag puisque nous n’avons rien à voir avec leurs conflits d’égo et leurs démonstrations de forces. Si le HB et HN en particulier veut se joindre à eux pour montrer sa supériorité qu’il le fasse seul comme il avait décidé de se mêler de conflits régionaux seul et maintenant il se retrouve dépassé par les événements, dos au mur. Qu’il aille superviser le déroulement des batailles à la tête de ses miliciens qui tombent comme des mouches on ne sait pour quelle cause ni pour dans quel but a part celui d’un chef planqué et bientôt déchu ne sachant où donner de la tête pour sauver la sienne.

    Sissi zayyat

    14 h 13, le 02 mars 2020

  • C'est l'exode de quasi-tous les civils de la région d'Idleb devant l'offensive russo-assadienne qui aura été l'élément faisant basculer la Turquie vers une implication militaire directe. Un tel exode de population est digne des Grandes Invasions. Il met en avant le fait que Bachar El Assad n'a rien à voir avec un chef d'État autoritaire qui réprime un peu trop son peuple, mais c'est un tyran marionnette GENOCIDAIRE au point que sa population préfère fuit son avancée comme on fuit devant une coulée de lave, sans savoir où aller. Ceci Erdogan l'a enfin compris, mais pas (encore) les oxy-dentaux ni encore moins U-Israël. Soyons clairs les motivations d'Erdogan sont loin du bien commun, il n'a aucune envie de renverser le régime assad mais veut seulement éviter à tous prix un nouvel afflux de réfugiés. Au départ le plan c'était une zone tampon frontière et que le régime reconquiert tout le reste, mais la nature génocidaire de ce dernier impose désormais une partition de la Syrie avec une Syrie du Nord sous protectorat turc et une Syrie assadienne fantoche sous protectorat russe.

    Citoyen libanais

    10 h 33, le 02 mars 2020

  • Dans les faits, nul ne fait le poids sur le terrain en Syrie à part les Russes et leur machine de guerre relativement sophistiquée. Donc ni la soit-disant résistance ni l’armée du boucher. Sans les Russes, les rebelles auraient gagné il y a belle lurette. Ces jeunes libanais se font donc envoyer à la boucherie pour les raisons stratégiques propres à la Russie. Quelle fierté pour leurs mères! C’est quand même hallucinant comment les partisans de la résistance ont le cerveau lavé et croient ces balivernes de résistance et de combat contre les terroristes (terroristes créés dans les prisons du régime syrien soit dit en passant).

    Michael

    09 h 03, le 02 mars 2020

  • Armee syrienne pulverisee par l attaque turwue...la marionnette genocide Bashar N EST RIEN sans la Russie......il doit etre terrorise...le vent tourne ....ce grand criminel aura la fin qu il merite.....

    HABIBI FRANCAIS

    01 h 53, le 02 mars 2020

  • IL FAUT METTRE UN TERME AUX AGRESSIONS DE L,APPRENTI MINI SULTAN OTTOMAN ERDO. IL FAUT QU,IL MORDE LA POUSSIERE EN SYRIE ET EN LYBIE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    00 h 29, le 02 mars 2020

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