L’inquiétude de la communauté internationale grandit à mesure que le pays s’enfonce dans la crise et que la classe politique, paralysée par ses différences et aveuglée par ses intérêts, se montre incapable de s’entendre sur la formation d’un gouvernement. Plus d’un mois après la démission de Saad Hariri, une source diplomatique estime que les Libanais ne peuvent plus s’accorder le luxe du temps et qu’ils doivent former rapidement un gouvernement crédible, capable de gérer la crise.
Cette source compare la situation du pays à celle d’un avion sur pilotage automatique. « Il ne faut pas s’attendre à un atterrissage en douceur, mais il faudrait au moins que la classe politique œuvre pour un atterrissage d’urgence », et non un crash, explique-t-elle.
Face aux atermoiements de la classe politique, qui n’a toujours pas pu s’entendre sur le nom d’un Premier ministre plus d’un mois après la démission de Saad Hariri, ce qui inquiète surtout les partenaires internationaux du Liban est qu’il n’y a « aucune gestion de la crise » au Liban, alors que les problèmes économiques et sociaux s’aggravent.
Or la communauté internationale a besoin d’un « partenaire crédible », si elle veut aider le Liban, ajoute ce diplomate, soulignant que le seul point positif est que le Liban continue de jouir d’un soutien international et que les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU ont une attitude unifiée concernant le pays, ce qui joue en sa faveur.
Le Conseil de sécurité a d’ailleurs souligné, lors de sa dernière réunion le 25 novembre consacrée à l’examen de l’application de la résolution 1701, l’importance de former rapidement « un nouveau gouvernement capable de répondre aux aspirations du peuple libanais », et appelé « tous les acteurs à mener un dialogue national intensif ».
Dans ce contexte, qu’en est-il des informations distillées dans les médias, selon lesquelles des divergences opposeraient certains États sur la forme du futur gouvernement, Washington préférant par exemple un cabinet de technocrates sans le Hezbollah, Moscou un gouvernement politique et Paris une solution entre les deux ?
La source diplomatique assure que ces informations ne sont pas fondées, qu’il n’y a pas de propositions de la part de la communauté internationale sur la forme du gouvernement et que c’est aux Libanais eux-mêmes de décider.
« La communauté internationale ne discute pas de qui doit ou ne doit pas faire partie du gouvernement », explique cette source, assurant que la formation du gouvernement est une question purement locale. Évidemment, elle reconnaît que les États-Unis, qui intensifient sur le plan régional leurs pressions contre l’Iran et ses alliés, ne seraient pas mécontents de voir un cabinet dont le parti pro-iranien ne ferait pas partie.
Mais s’il faut donner un conseil à la classe politique, c’est celui de ne pas irriter la rue en ramenant au gouvernement des figures contestées par les manifestants et de former un cabinet crédible et jouissant du soutien de la population, ajoute cette source.
(Lire aussi : Irresponsabilité criminelle, l’édito de Michel TOUMA)
Pas de concessions
Elle souligne dans ce cadre que si, faute d’accord, un gouvernement formé de figures du 8 Mars est formé, cela serait « moins attrayant » tant pour la rue que pour la communauté internationale, et qu’il serait dans ce cas plus difficile d’obtenir l’aide des partenaires internationaux du Liban.
Pour le moment, l’option n’est pas véritablement envisagée par les différents partis au pouvoir. Mais ce que déplore cette source diplomatique, c’est que les partis politiques continuent de faire prévaloir leurs intérêts avant tout et ne font pas de concessions, bloquant ainsi la formation du gouvernement. Pour la classe politique, c’est toujours « business as usual » face aux revendications de la rue, alors que le soulèvement dure depuis plus d’un mois et demi, ajoute cette source.
Dans leurs entretiens avec les responsables internationaux, les responsables libanais donnent l’impression de penser qu’ils peuvent toujours se donner le temps d’atermoyer, mais la situation devient de jour en jour plus dangereuse, prévient cette source.
Dans le même temps, elle estime que les partis au pouvoir, y compris le Hezbollah, ne veulent pas d’un effondrement généralisé, qui ne serait dans l’intérêt de personne.
Mais ces partis pourront-ils gérer la crise, surtout qu’avec l’aggravation des problèmes économiques et sociaux, une « révolution de la faim » pourrait se profiler, s’interroge cette source, qui met en garde contre un scénario semblable à celui de la Grèce.
Elle explique cependant que le Liban ne se dirige pas pour le moment vers un effondrement total et qu’il faut plusieurs mois avant d’atteindre une telle situation. La source estime cependant qu’il est préférable pour les Libanais de gérer la crise eux-mêmes, sans attendre une aggravation de la situation qui rendrait nécessaire une intervention du Fonds monétaire international ou autre, qui dicterait des mesures autrement plus dures que celles dont la population souffre en ce moment, pour sauver le Liban.
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commentaires (15)
BEN, IL Y A QUELQUE CHOSE QUI LA GERE CETTE CRISE : LE HASARD ! 3ALA ALLAH !
LA LIBRE EXPRESSION
18 h 30, le 03 décembre 2019