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Liban - Exécutif

Gouvernement : le « miracle » a eu lieu, mais tout reste à faire

Le nouveau cabinet est le reflet d’un compromis qui a permis à tout le monde de sauver la face.

Nabih Berry, Michel Aoun et Saad Hariri, hier à Baabda, peu avant l’annonce de la formation du nouveau gouvernement, au bout de huit mois de gestation. Photo Dalati et Nohra

Après une série de blocages auxquels plusieurs parties ont pris part à tour de rôle, le gouvernement attendu depuis plus de huit mois est né au forceps hier. Au soir d’une journée marathonienne au cours de laquelle les touches finales devaient être apportées à la composition du nouveau cabinet de 30 ministres, les derniers nœuds résiduels – principalement la permutation de quelques portefeuilles et la désignation du ministre sunnite antiharirien – ont été levés grâce à des compromis auxquels chacun des protagonistes a dû consentir. C’est de Baabda que le Premier ministre, Saad Hariri, a annoncé la fin de sa pénible mission et la naissance d’un exécutif qui doit impérativement plancher sur des dossiers lourds et faire face à des défis de taille que seule une cohésion gouvernementale pourra relever, a-t-il martelé à plusieurs reprises.

S’exprimant en libanais dialectal et non en arabe littéraire, un comportement inusité en pareille occasion officielle, M. Hariri s’est appliqué à présenter ses excuses aux Libanais pour le retard mis à former le gouvernement : un geste tout aussi rarissime dans un pays où les responsables n’ont cure généralement de rendre compte de leur impuissance et de leurs échecs.

Théoriquement, et vu de l’extérieur, le compromis final convenu entre les principaux acteurs permet à tout le monde de sauver, un tant soit peu, la face, à quelques nuances près, selon la formule du “ni vainqueur ni vaincu”. Avec un gouvernement de trente selon une équation qui se veut équilibrée puisqu’elle rend en pratique difficile à toutes les parties, chacune de son côté, y compris au camp aouniste, de détenir de façon systématique le tiers de blocage au sein du cabinet.

Au final, c’est Saad Hariri, dont deux des ministres de sa quote-part sur un total de six sont comptés sur le crédit des ses deux alliés sunnites, Mohammad Safadi et de Nagib Mikati, qui aura fait le plus preuve de souplesse.


(Lire aussi : Les nouveaux venus au sein du gouvernement Hariri III)


Forcing du Hezbollah
Le CPL, qui a mené de bout en bout sa bataille pour obtenir 11 sièges pour sa formation et pour le compte du chef de l’État, Michel Aoun, a obtenu une satisfaction relative si l’on s’en tient uniquement au décompte des ministères récoltés. Sauf que la question principale est de savoir quel sera le positionnement politique de deux des onze ministres relevant du camp aouniste, à savoir Hassan Mrad, le sunnite du 8 mars, et Saleh Gharib, le ministre druze comptabilisé dans le camp de Talal Arslane et compris dans la quote-part du président.

Autrement dit, les ambitions du chef du CPL de garantir à son bloc un tiers de blocage au sein du gouvernement ont été revues à la baisse, puisqu’il devra compter avec deux voix en moins en faveur de son camp, même si cela peut varier d’un dossier à l’autre.

Les dernières informations qui circulaient à propos du « compromis » convenu entre le CPL et les sunnites antihaririens portaient sur une formule pour le moins schizophrène : Hassan Mrad sera compté dans le camp du président, mais ne votera que selon les desiderata du groupe de la Rencontre consultative dont il est issu, tout en assistant, occasionnellement, aux réunions du bloc aouniste du Liban fort, en tant qu’indépendant. Une équation rendue possible après une intervention décisive du Hezbollah qui aurait poussé les sunnites du 8 Mars à accepter cette formule médiane et persuadé M. Bassil de la nécessité de renoncer à son tiers de blocage. Le tandem chiite, Amal et le Hezbollah, s’en tire à bon compte et obtient six ministères, dont celui de la Santé que le Hezbollah a réussi à imposer en dépit de la réticence des États-Unis, qui le tiennent à l’œil, et attendent de voir comment il compte gérer ce département.


(Lire aussi : Les principaux défis socio-économiques du gouvernement Hariri III)


Geagea en sauveteur
La naissance de ce gouvernement, qui bloquait durant les dernières heures du fait d’un désistement demandé aux FL en faveur du camp berryste au sujet du portefeuille de la Culture, a été sauvée in extremis par un « sacrifice » consenti par cette formation chrétienne. Son chef, Samir Geagea, n’a d’ailleurs pas lésiné à retourner cette dernière « concession » en sa faveur, faisant valoir « son souci de préserver l’État », donnant ainsi l’image du sauveur de la nation.

Autre changement significatif au sein du nouveau gouvernement, le poste du ministre d’État pour les Affaires des réfugiés, naguère aux mains du courant du Futur, aujourd’hui confié à un ministre du CPL. Une désignation qui en dit long sur les modifications qui pourraient affecter ce dossier, sachant que l’orientation de M. Bassil, martelée lors du sommet arabe tenu le 20 janvier à Beyrouth, est clairement pour un retour des réfugiés syriens.

Du côté des sunnites du 8 Mars, le choix est finalement tombé sur Hassan Mrad, le fils du député de la Békaa, Abdel-Rahim Mrad, qui se voit confier le poste nouvellement créé de ministre d’État pour le Commerce extérieur. Une décision d’autant plus judicieuse que par « commerce extérieur », le CPL, le chef de l’État, mais aussi le Hezbollah, entendent notamment la redynamisation des échanges avec la Syrie avec laquelle Abdel-Rahim Mrad a d’excellentes relations. Il s’agirait également d’opérer une ouverture en direction de l’Arabie saoudite avec laquelle il entretiendrait également de bons rapports et où le député sunnite vient d’ouvrir une filiale de son université, la Lebanese International University. L’intégration de quatre femmes au gouvernement, un record dans l’histoire du pays, est sans aucun doute une valeur ajoutée dans un gouvernement qui ambitionne des réformes drastiques. Si le premier pas a été franchi avec la mise sur pied d’un cabinet dont la mission prioritaire est d’épargner au pays un effondrement économique, il n’est pas dit que le nouvel exécutif – une version revue et corrigée du gouvernement sortant que les divisions ont miné – fera mieux que son prédécesseur. D’autant que les défis n’ont fait que s’amplifier entre-temps, et que les batailles en termes de réforme et de lutte contre la corruption s’avèrent corsées, comme l’a d’ailleurs rappelé hier Saad Hariri. Le Premier ministre désigné l’a clairement relevé : à défaut de cohésion, ce gouvernement ne pourra pas s’en sortir. Or c’est précisément là où le bât blesse.


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Après une série de blocages auxquels plusieurs parties ont pris part à tour de rôle, le gouvernement attendu depuis plus de huit mois est né au forceps hier. Au soir d’une journée marathonienne au cours de laquelle les touches finales devaient être apportées à la composition du nouveau cabinet de 30 ministres, les derniers nœuds résiduels – principalement la permutation de quelques...

commentaires (14)

On a gagné on est les plus forts ....bravo ! très bien maintenant il faut bosser et remettre à flot ce pays car on ne peut « vivre d’amour et d’eau fraîche » même si quelques illuminés ont essayé de vous le faire croire ....

L’azuréen

00 h 15, le 02 février 2019

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Commentaires (14)

  • On a gagné on est les plus forts ....bravo ! très bien maintenant il faut bosser et remettre à flot ce pays car on ne peut « vivre d’amour et d’eau fraîche » même si quelques illuminés ont essayé de vous le faire croire ....

    L’azuréen

    00 h 15, le 02 février 2019

  • Comment savoir quelle prière l'a remporté: celle de Rai ou celle de HN? Pour les fanatiques de tous genres confondus, c'est un grand dilemme...

    Tina Chamoun

    16 h 05, le 01 février 2019

  • Il était temps ! La déclaration de politique générale sera la prochaine difficulté. La Résistance (à quoi ? on aimerait le savoir) ne doit pas figurer parmi les 3 équations de base, les 2 autres étant le peuple et l'armée.

    Tony BASSILA

    15 h 22, le 01 février 2019

  • 9 mois pour un mi racle... On y va maintenant pour la raclée complète

    Wlek Sanferlou

    13 h 03, le 01 février 2019

  • Pour calmer la rue on dira ni vainqueur ni vaincu, en réalité il y a eu 1 vainqueur, c'est le LIBAN NOUVEAU FORT INDÉPENDANT ET LIBRE , tout le Liban et 1 Vaincu, les FORCES du passé, basées sur le complot anti résistance, je nomme les usa, leur queue de comète européenne et leur larbin gâté l'usurpateur . Je vais me répéter, le Liban culturellement supérieur à ces pays arabes rétrogrades mais friqués n'a pas besoin de bcp d'effort pour redevenir le veritable boss du monde arabe, même si quelques complexé(e)s devant la matériel continuent à vituperer contre notre peuple ET SES DIRIGEANTS.

    FRIK-A-FRAK

    12 h 39, le 01 février 2019

  • Hier, dès l'annonce de la formation du gouvernement, le député Fayçal Karamé s'est dépêché d'envoyer un billet doux au président Michel Aoun : Nous avons "cassé" (sic) le monopole du Mustaqbal. (An-Nahar du 31/1/2019). Si la vantardise avait été proférée avant la formation du cabinet, Hassan Mrad ne serait pas aujourd'hui secrétaire d'Etat ? La fanfaronnade est superflue puisque Hassan Mrad fait partie du quota du président de la République. Où sont le calme et la pondération de feu Rachid Karamé ?

    Un Libanais

    11 h 28, le 01 février 2019

  • L,ABRUTISSEMENT S,EST RETRACTE ENFIN. VOYONS LA SUITE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 55, le 01 février 2019

  • Premier point: Il faut se faire a l’idée que le Liban ne peut former de gouvernement autrement que de voir les différentes parties se disputer les ministères comme si c’étaient des tranches de fromages. Tant que le pays aura des parties se targuant d’allégeance étrangère, il est impératif que les partis souverainistes restent au pouvoir pour la sauvegarde du pays au mieux vu les circonstance actuelle. c'est donc moins une batailles pour le fromage que celle de la préservation de l’entité, état, institutions, nation et peuple, dite Libanaise. Quand a l'allégation prétendant que les FL cherchent a se placer en sauveur de la nation, n'en déplaisent a tous ses détracteurs, les FL ont été, sont et resteront toujours les seuls et uniques sauveurs de la nation qui sont, heureusement, de plus en plus rejoint par d'autres partis et franges du pays. Le Liban ne verra de beaux jours que lorsque la constitution sera 100% implémenter et que les FL seront au pouvoir avec une majorité les soutenant au parlement... Avant cela nous allons encore souffrir pour longtemps...

    Pierre Hadjigeorgiou

    10 h 47, le 01 février 2019

  • comme le disait qq'un, faut croire en le Bon Dieu et en ses Saints !

    Gaby SIOUFI

    10 h 35, le 01 février 2019

  • Les législatives ont eu lieu le 6 mai 2018 et le gouvernement a été formé le 31 janvier 2019. Étant donné le délai c'est un non événement. Il n'y a pas de quoi être fiers. Le peuple a survécu seul, livré à lui même. Et maintenant on va où?

    Sybille S. Hneine

    09 h 37, le 01 février 2019

  • Pourquoi selon la formule du "...ni vainqueur ni vaincu...?" Pourquoi ne pas voir tout simplement la victoire de la bonne volonté de sauver le Liban qui était à deux doigts de l'effondrement ? Nous le petit peuple, on attend et on espère des jours meilleurs... Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 40, le 01 février 2019

  • L’essentiel est qu’il y ait enfin un gouvernement. Au Liban pays des miracles qui n’ont jamais lieu et des crédules qui s’en laissent compter, nul ne sait de quoi demain sera fait. Allez bon vent à la nouvelle équipe et bon débarras de la précédente quoiqu’il persiste des gens lourds dont on ne sait pas trop ce qu’ils viennent faire. Georges Tyan

    Lecteurs OLJ 3 / BLF

    08 h 18, le 01 février 2019

  • "dont celui de la Santé que le Hezbollah a réussi à imposer en dépit de la réticence des États-Unis, qui le tiennent à l’œil, et attendent de voir comment il compte gérer ce département." Et si ça ne plaît pas à Tonton Sam ce dernier lui donnera une fessée? Cela ne s'appelle-t-il pas "ingérence en toute arrogance?" Sinon c'est quoi siouplaît?

    Tina Chamoun

    08 h 00, le 01 février 2019

  • Il n'y a pas miracle; ils se sont mis d'accord pour se partager le gateau. que vont ils faire face au trou budgetaire, au déficit et ls caisses de l'état vides ? les problèmes de l'électricité, l'eau, les ordures, etc avec quel rentrée d'argent ? 8 mois de mascarade pour en arriver au partage. Le peuple libanais aura souffert et souffrira encore. Quelle honte. Sous bon controle du Hezbollah et et du Président de la République, Saad Hariri pataugera

    FAKHOURI

    05 h 53, le 01 février 2019

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