L’affaire Jamal Khashoggi a considérablement terni l’image de l’Arabie saoudite sur la scène internationale et surtout celle de son prince héritier Mohammad ben Salmane soupçonné d’être derrière l’assassinat du journaliste saoudien dans le consulat de son pays à Istanbul le 2 octobre dernier. Certains ont tablé sur une perte d’influence, voire même une mise à l’écart de MBS, face aux pressions internationales qu’il subit. D’autres ont parié sur un recul du soutien populaire au jeune prince, surtout parmi la jeunesse saoudienne. Alors qu’une enquête indépendante internationale sur la mort de Khashoggi a débuté lundi à Istanbul, dix-huit personnes ont déjà été arrêtées par l’Arabie saoudite dans le cadre de l’enquête saoudienne. Les autorités ont traduit en justice 21 Saoudiens, dont cinq risquent la peine capitale. Dans un entretien avec L’Orient-Le Jour, le juge Issa Alghaith, membre de l’Assemblée de la Choura, un organe consultatif dont les membres sont nommés par le souverain en Arabie saoudite, assure que la jeunesse saoudienne soutient le prince héritier en raison de son ambitieux programme de modernisation et de libéralisation culturelle et sociale.
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Comment percevez-vous les attaques et les pressions contre Mohammad ben Salmane ?
Les attaques contre Mohammad ben Salmane ne sont pas uniquement dirigées contre sa personne, mais contre son programme. Si le prince héritier avait poursuivi la politique qui dominait auparavant, il n’aurait pas eu tellement d’ennemis.
Mais Mohammad ben Salmane a lancé un nouveau programme avec de nouvelles idées pour consolider et renforcer l’État saoudien, les monarchies du Golfe ainsi que la sécurité des pays arabes.
Tous ceux qui sont contre une telle politique ont été contrariés par son programme. Qu’il s’agisse d’Israël, de l’Iran, de la Turquie ou d’une autre puissance internationale. Tous ceux qui profitaient de la faiblesse de l’Arabie saoudite et du monde arabe vont donc œuvrer contre Mohammad ben Salmane.
Ces ennemis sont donc ceux qui ont des agendas hostiles, comme c’est le cas de la Turquie qui aspire à recréer le califat ottoman. Ou aussi l’Iran et ses ambitions hégémoniques sur la région. Sans oublier le cas du régime corrompu du Qatar qui profite de l’instabilité dans les pays arabes comme la Syrie, la Libye ou l’Égypte. Doha et les Frères musulmans sont une cinquième colonne dans le monde arabe pour l’affaiblir.
Une situation qu’aucun Saoudien ou aucun homme libre ne peut accepter. Si tous les pays arabes célèbrent en grande pompe leur indépendance des colonisateurs britanniques et français, ils n’accepteront en aucun cas une nouvelle occupation sous la forme nostalgique de l’Empire ottoman, ou perse, ou autre.
Croyez-vous que MBS a perdu de sa popularité ?
L’infortune de Mohammad ben Salmane est qu’il essaye de résoudre des problèmes qui se sont accumulés depuis des décennies. Comme c’est le cas du Yémen ou du Qatar ou d’autres obstacles qui ont été mis à jour.
Aujourd’hui, une majorité de Saoudiens sont des jeunes de moins de trente ans, et ils voient tous dans la personne du prince héritier celui qui va réaliser leurs ambitions et leurs espoirs.
Les Saoudiens et les Arabes sont donc partisans de la politique initiée par le prince héritier parce qu’ils estiment que ce dernier œuvre pour l’intérêt général. Les Saoudiens sont avec Mohammad ben Salmane et le défendent parce qu’ils défendent leur espoir et les rêves qu’ils aspirent à réaliser depuis des années. Le peuple saoudien et même les Arabes dans leur ensemble sont fiers d’un leader qui peut les rendre plus forts.
Mohammad ben Salmane est un message, un programme que tout le monde cherche à protéger parce qu’il permet aux Saoudiens de rêver d’un avenir meilleur.
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commentaires (7)
Propos logiques pour un homme du système, mais au regard des faits, ils ne font aucun sens et sont contredits chaque jour. Alors si cette interview permet de se rappeler le discours officiel du régime saoudien, il serait bon de donner aussi la parole à un contradicteur dans une interview croisée. Les limites de l'argumentations de ce personnage n'en seraient que plus visibles.
Charles Robert
12 h 00, le 31 janvier 2019