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Liban - Liban-Nord III / Reportage

Dans un Bécharré FL, Marada, CPL et société civile tentent de se frayer un chemin

Samir Geagea arrivant au bureau de vote à Bécharré, dimanche, peu avant 14h.

Dans la circonscription du Liban-Nord III (Bécharré-Koura-Zghorta-Batroun), une liste soutenue par le courant Marada et le Parti syrien national social a croisé le fer principalement avec deux listes, celle du Courant patriotique libre (CPL) et de ses alliés, et celle du binôme Forces libanaises (FL)-Kataëb et de leurs colistiers. Une quatrième liste, celle de la société civile, Koullouna Watani, a aussi tenté sa chance dans la circonscription, mais ne semble pas séduire un électorat habitué aux figures politiques classiques et aux familles qui se transmettent le siège parlementaire comme un héritage familial.


La journée électorale s’est déroulée dans une ambiance particulièrement calme à Bécharré, où les forces de l’ordre ainsi que les éléments du service de sécurité des FL ont semblé sur la même longueur d’onde. Pas de discours provocateurs, des jeunes activistes travaillant côte à côte et un déroulement presque parfait du scrutin sur la base d’une nouvelle loi électorale. Avec un taux de participation de près de 45,62 % au Liban-Nord III et Bécharré (44,5 %), chiffre proche de celui de 2009, quelque 11 000 électeurs ont affiché leur réticence vis-à-vis de ce nouveau système qui les a, selon certains, privé de leur jeu « de construction des listes personnalisées ». Tôt le matin, les habitants du village de Bécharré se sont mobilisés afin de distribuer leurs voix entre deux listes principales, celle des FL ou celle des Marada, sur laquelle figure le fils de l’ancien député Gebran Tok. Boudée par des partisans pourtant farouches à la base, la liste FL présidée par Sethrida Geagea a été sérieusement concurrencée par celle du parti de Sleiman Frangié, adoptée par des Bécharriotes reprochant aux FL une politique de mise à l’écart des anciens combattants et une mise en sourdine de tout avis contraire à celui du directoire au sein du bureau politique FL.

Des files interminables d’électeurs se sont formées devant les bureaux de vote dans l’ensemble du caza, avec un temps moyen de dix minutes nécessaire à chaque citoyen pour voter selon le nouveau système. Une grande feuille sur laquelle sont imprimées en couleur les quatre listes est distribuée au votant qui se contente de cocher la liste convenable derrière un isoloir qui n’en est pas un lorsque la pièce est exiguë, ce qui était le cas dans les petits bureaux de vote. Le grand absent cette année étaient les listes distribuées à l’entrée des bureaux de vote par les délégués des différents candidats, ce qui avait allongé la procédure, une fois le citoyen dans l’isoloir.


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« Je vote pour le passé, mais aussi pour l’avenir... »
L’ambiance a été très enthousiaste et même par endroits festive à Bécharré. La concurrence entre les listes est restée loin des tensions jusqu’à la fin de la journée. Pour Melhem Gebran Tok, candidat sur la liste des Marada, « les temps ont changé et les FL ne bénéficient plus de l’exclusivité au niveau de la localité comme c’était le cas depuis plusieurs années ». Le père Hani Tok, venu participer à l’opération électorale avant de célébrer la messe du dimanche, a insisté sur le fait que voter est un droit que tout le monde doit exercer afin d’assurer la démocratie du scrutin. « Je veux que les choses bougent dans ce pays et la seule façon de faire bouger les choses d’une façon civilisée, c’est à travers les élections », a-t-il ajouté. Il a exprimé sa confiance dans la politique adoptée par les responsables de la région avec tous les travaux d’infrastructure effectués et les projets en suspens, notamment ceux préparés par les FL.
Rabih Tok, 41 ans, vote à Bécharré. « Il ne m’a fallu que dix minutes pour voter, la procédure était bien organisée », dit-il. Il se dit néanmoins un peu frustré car il était habitué, dans le cadre des précédentes législatives, à former sa propre liste. « Il y a plusieurs candidats qui ne me disent rien et je sens qu’ils m’ont été imposés en quelque sorte avec le ou les candidats de mon choix », explique Rabih Tok, à sa sortie du bureau de vote du village accompagné de son père et de son fils venu assister en observateur au scrutin.


(Lire aussi : Les lenteurs du vote ont-elles fait ombrage à la liberté des législatives ?)



En raison de la nouvelle loi en vigueur, les électeurs doivent voter pour des listes fermées. Les opérations de panachage ne sont plus possibles. Élie Tok, 28 ans, vient de voter pour les FL, à Bécharré. « Je vote pour les FL, parce que c’est dans notre sang. Je vote pour le passé, mais aussi pour l’avenir. » Ahmad Hazim, responsable au sein du bureau de vote de la localité, se plaint du fait que certaines personnes insistent à accompagner les électeurs âgés jusque dans l’isoloir. « Les personnes âgées ne peuvent être accompagnées que si elles sont lourdement handicapées », insiste-t-il.


À Hasroun, village du candidat Joseph Ishak, candidat FL, la famille Aouad s’est déplacée hier afin de pouvoir participer au scrutin. Elle ne trouve pas d’inconvénient à attendre dans la longue file un dimanche matin avant de pouvoir voter. « Nous venons choisir ceux qui ont œuvré pour la région et qui représentent un espoir, ils méritent d’être au Parlement et nous gardons espoir en notre pays », affirment avec enthousiasme des membres de cette famille. D’autres habitants semblaient non concernés par le jeu électoral et ne comprenaient pas « cette fièvre soudaine malgré une situation économico-sociale de plus en plus désolante ».

À Torza, le paysage était très calme et les bureaux de vote timidement visités, dans la mesure où une grande partie des habitants vivent à l’étranger. Certains habitants guettaient de loin le déroulement des élections, préférant aller voter plus tard dans la journée « lorsque le succès des candidats favoris deviendrait de plus en plus évident ». Youssef Amine, ingénieur, s’est dit pourtant confiant dans le procédé électoral et s’est dirigé d’un pas assuré vers le bureau de vote avant de rejoindre sa famille pour le déjeuner.
Aucun incident majeur n’a été enregistré dans le caza, qui n’est pas censé s’attendre à de grandes surprises au niveau des résultats, en dépit de la présence de nouvelles figures, nouveauté rendue possible grâce à la nouvelle loi électorale.


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