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Liban - Législatives 2018

Békaa-Ouest-Rachaya : La mise à l’écart d’Antoine Saad pourrait-elle se retourner contre Ghattas Khoury ?

Un climat de tension régnait durant le week-end entre Walid Joumblatt et les milieux haririens.

Waël Bou Faour et les cheikhs druzes au domicile d’Antoine Saad, en signe de soutien. Photo ANI

La circonscription de la Békaa-Ouest-Rachaya (environ 140 800 inscrits et 6 sièges à pourvoir : deux sunnites, un maronite, un grec-orthodoxe, un druze, un chiite) a fait naître des divergences entre le courant du Futur et le Parti socialiste progressiste (PSP) autour du choix du candidat au siège grec-orthodoxe, que le premier a fini par trancher au détriment du député sortant Antoine Saad, laissant deviner une volonté tacite de favoriser par défaut le candidat sur la liste rivale, l’ancien vice-président de la Chambre, Élie Ferzli, soutenu par le Courant patriotique libre (CPL), auquel M. Saad aurait été le seul à pouvoir tenir tête.

Le député Walid Joumblatt est monté au créneau en fin de semaine dernière, dénonçant des efforts concertés du leader du Futur, Saad Hariri, et du chef du CPL, Gebran Bassil, de l’isoler politiquement. Il a même été jusqu’à évoquer des tentatives de leur part d’empêcher la reconduction de Nabih Berry à la présidence de la Chambre après le 6 mai.

Très vite, Saad Hariri a tenté de calmer le jeu. En tournée dans la Békaa-Ouest samedi dernier où il a annoncé sa liste, le chef du courant du Futur a tenu des propos hostiles au retour des figures pro-Damas. « La Békaa n’a pas de place pour les préposés de la tutelle de Anjar », a-t-il dit. Et d’ajouter que « notre décision de sauvegarder la stabilité (le compromis de la présidentielle, NDLR) ne veut pas dire un renoncement à nos constantes, du Tribunal spécial pour le Liban au monopole des armes ». Il a en même temps contacté par téléphone M. Berry afin de démentir les allégations de Walid Joumblatt. Et d’ajouter, sur la chaîne MTV : « Je ne sais pas quelle est l’origine des appréhensions exprimées par Walid Joumblatt, avec lequel nous sommes historiquement liés. »

C’est le député Ghazi Aridi qui s’est chargé de répondre hier au Premier ministre à travers les médias, jugeant « insuffisants les propos rassurants de Saad Hariri à l’égard de Walid Joumblatt ».


(Lire aussi : Bakr Hojeiri, de l’Union soviétique au Courant du Futur…)


Le fond du problème reste le manquement du courant du Futur à son accord électoral avec Walid Joumblatt, dont le noyau est le Chouf-Aley, mais dont l’un des embranchements est la Békaa-Ouest-Rachaya. Dans cette circonscription, deux listes partisanes croiseront le fer le 6 mai, en plus d’une troisième liste issue de la société civile. La première est le fruit d’une alliance entre le PSP et le courant du Futur, dont les Forces libanaises ont fini par être écartées (leur candidat au siège maronite n’a plus été retenu par le courant du Futur, en dépit des insistances du PSP). La seconde, incomplète, réunit des figures associées au régime de Damas (d’ailleurs imposées par ce dernier), notamment Abdel Rahim Mrad (le seul sunnite de la liste, le second siège étant resté vacant) et l’ancien vice-président de la Chambre, Élie Ferzli. Elle est soutenue par le mouvement Amal à travers le candidat chiite et le candidat maronite (dont Nabih Berry a refusé de concéder le choix au CPL). Le courant aouniste a fini par se joindre in extremis à cette liste, au lendemain de son dépôt auprès du ministère de l’Intérieur, le ministre Gebran Bassil annonçant récemment son appui à Élie Ferzli, lors d’une conférence de presse conjointe à l’issue de la réunion du bloc du Changement et de la Réforme.

Le litige Futur-PSP a pour origine l’attachement du premier à la candidature au siège grec-orthodoxe de Ghassan Skaff, médecin exerçant à Beyrouth, dont le PSP doute sérieusement de la capacité à faire contrepoids à Élie Ferzli.
De sources concordantes, il semble qu’une proximité personnelle et professionnelle de Ghassan Skaff avec Ghattas Khoury soit le motif direct de l’appui du courant du Futur à sa candidature… La question demeure toutefois de savoir pourquoi le risque a été pris, « en connaissance de cause ou par bêtise » (selon un acteur du terrain), de favoriser par défaut l’élection d’Élie Ferzli, c’est-à-dire de « s’interposer pour réhabiliter le régime syrien », selon les termes de Walid Joumblatt à L’Orient-Le Jour le 20 mars dernier, au moment des négociations PSP-Futur autour du siège en question. Celles-ci avaient abouti in extremis lundi dernier (le jour de la fermeture du dépôt des candidatures) sur une entente sur la candidature du député sortant Antoine Saad, avant que le courant du Futur ne se rétracte « quelques heures plus tard » et sans préavis, en faveur de Ghassan Skaff, selon une source proche du PSP. Le lendemain, comme rassuré par le choix du courant du Futur, le CPL annonçait son appui à Élie Ferzli, « révélant le jeu Bassil-Hariri » , a laissé entendre samedi Antoine Saad.

Certes, le courant haririen a une primauté dans le choix des candidats, l’électorat sunnite étant le plus pesant dans cette circonscription (48 % des voix). Mais là où l’électorat druze est le plus large, à savoir le Chouf, Walid Joumblatt a concédé au courant du Futur la candidature de Ghattas Khoury à l’un des sièges maronites, en dépit d’une tradition qui veut accorder ce siège à un candidat du littoral (le député sortant de ce siège est Élie Aoun, originaire de Damour et membre du bloc joumblattiste).

La candidature de Ghassan Skaff à Rachaya risquera-t-elle dès lors de se retourner contre Ghattas Khoury au Chouf, par le jeu d’une redistribution des votes qui réduiraient les chances de ce dernier d’être élu ? C’est en tout cas une forme de mise en garde dans ce sens que le PSP semble adresser au courant du Futur. 

« Il y a dans les esprits malsains une volonté de limiter Walid Joumblatt dans le choix des candidats et dans le scrutin. Ceux-là verront bientôt qu’ils se font des illusions », a déclaré le député Waël Bou Faour, candidat au siège druze de la Békaa-Ouest-Rachaya, lors d’une visite symbolique qu’il a rendue, au nom de Walid Joumblatt, au domicile du député sortant Antoine Saad à Rachaya.


(Lire aussi : Législatives : Nous voulons montrer l'importance du soutien dont bénéficie le Hezbollah, affirme Kassem)


Les listes en présence dans la Békaa-Ouest-Rachaya

« Le Futur pour la Békaa-Ouest et Rachaya » : courant du Futur et PSP
Amine Wehbé (chiite, courant du Futur), Ghassan Skaff (grec-orthodoxe, mouvance courant du Futur), Henri Chedid (maronite), Mohammad Karaaoui (sunnite, courant du Futur), Waël Bou Faour (druze, Parti socialiste progressiste), Ziad Kadri (sunnite, courant du Futur).

 « Le meilleur avenir »
Abdel Rahim Mrad (sunnite), Élie Ferzli (grec-orthodoxe, mouvance Courant patriotique libre), Fayçal Daoud (druze), Mohammad Nasrallah (chiite, Amal), Nagi Ghanem (maronite, soutenu par Amal).

 « La société civile »
Alaëddine Chemali (sunnite), Ali Sobh (chiite), Fayçal Rahal (sunnite), Joseph Ayoub (grec-orthodoxe), Maguy Aoun (maronite).



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