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Économie - Bilan

Mauvaise année pour le commerce extérieur libanais

Alors qu'il avait baissé en 2015, le déficit commercial est reparti à la hausse en 2016. En cause : la hausse des importations et la forte baisse des exportations industrielles.

Les exportations industrielles ont connu leur plus forte baisse depuis 2012. Photo C. Hd

Sur le plan politique, le commerce extérieur aura été marqué en 2016 par la reprise en mars des négociations concernant l'adhésion du Liban à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Des pourparlers qui avaient été interrompus en 2009, 10 ans après la demande du pays du Cèdre. Mais, compte tenu des divergences au sein du précédent gouvernement entre les partisans de cette adhésion – dont l'ancien ministre de l'Économie et du Commerce Alain Hakim – et ses détracteurs – avec en tête le ministre de l'Industrie, Hussein Hajj Hassan (reconduit) –, les suites de ce processus restent difficile à anticiper.

Hausse des importations d'hydrocarbures
Pour le reste, l'année aura surtout été marquée par la nouvelle dégradation de la balance commerciale qui semble se dessiner, alors que le déficit s'était réduit de 12 % en 2015. Sur les 11 premiers mois de l'année, derniers chiffres disponibles auprès des douanes, le déficit commercial a ainsi augmenté de 6,8 % en glissement annuel, à 14,4 milliards de dollars.

Une tendance qui est essentiellement due à l'augmentation des importations, de 15,4 % en volume (à 16,1 millions de tonnes) et de 5,8 % en valeur (à 17,1 milliards de dollars), malgré deux années de forte chute des prix du pétrole. Pourtant, les importations d'hydrocarbures – qui restent le premier poste d'importation (20 % de la valeur totale) – ont bien bénéficié de cette baisse des prix : elles ont connu une hausse de 41 %, à 7,1 millions de tonnes ; alors que leur valeur a seulement augmenté de 25 %, à 3,4 milliards de dollars. « Cette forte hausse des volumes importés s'explique sûrement par l'augmentation de la revente illégale de pétrole vers la Syrie », observe un économiste ayant requis l'anonymat.

Après les hydrocarbures, le Liban achète surtout des produits chimiques européens, dont la valeur a augmenté de 4,8 % en glissement annuel à 1,8 milliard de dollars, et du matériel électrique (-7,2 %, à 1,7 milliard de dollars), notamment en provenance de Chine. L'Empire du Milieu, dont les produits représentent 11 % du total des importations, maintient ainsi sa place de premier fournisseur du Liban, devant l'Italie (7 %) et les États-Unis (6 %).

L'aggravation du déficit résulte également de l'absence de redynamisation des exportations dont le volume a baissé de 16,5 %, à 1,4 million de tonnes, malgré une stabilisation de leur valeur, à 2,7 milliards de dollars (+ 0,6 %). Fait notable : la catégorie « perles, métaux et pierres précieuses » a repris sa première place et représente 29 % du total de la valeur des exportations, devant les produits alimentaires (15 %). Catégorie constituée à 85 % de lingots d'or, l'exportation des métaux précieux a quasi doublé à 780 millions de dollars, malgré une baisse de 26 % de son volume, à 56 tonnes. « Même si, globalement, l'or n'a pas gagné plus de 9 % en 2016, il a connu des hausses très fortes de près de 30 % en première partie d'année. Les commerçants libanais en ont profité pour augmenter leurs exportations début 2016 », indique à L'Orient-Le Jour un analyste des marchés financiers. À noter que l'or n'est pas produit sur place, mais importé d'Afrique de l'Ouest avant d'être exporté en grande majorité vers l'Afrique du Sud.

 

(Pour mémoire : Industriels et commerçants pressés de relancer la croissance)

 

Chute des exportations industrielles
Mais l'évolution la plus significative est la baisse spectaculaire des exportations industrielles, qui représentent 85 % du total de la valeur des exportations libanaises. Selon les derniers chiffres du ministère de l'Industrie, elles ont chuté de 15,5 % entre janvier et octobre 2016, à 2,1 milliards de dollars. Cette baisse est la plus forte enregistrée sur cette période depuis 2012. Le Golfe, qui traverse une crise économique sans précédent depuis la chute des cours du pétrole, est la principale destination des produits industriels libanais, notamment de matériel électrique comme des groupes électrogènes.

« En 2015, les exportations industrielles ont souffert du choc représenté par la fermeture des routes terrestres qui traversaient la Syrie pour aller vers le Golfe. En plus de la perte de marchés arabes que cela représente, il devient de plus en plus difficile pour les industriels d'assumer les coûts de transport », ajoute le président de l'Association des industriels du Liban, Fady Gemayel.

Afin de pallier ces difficultés, un programme de soutien a été lancé par le gouvernement en septembre 2015, piloté par l'Autorité de développement des investissements au Liban (IDAL) à hauteur de 14 millions de dollars. Prolongé jusqu'à mars 2017, il met à disposition quatre bateaux capables de transporter des camions jusqu'à la Jordanie et l'Arabie saoudite. Mais, dans les faits, ce sont les produits agricoles qui sont les principaux bénéficiaires de ce programme (à 82 %), et non les produits industriels, à valeur ajoutée plus importante.

 

(Pour mémoire : Les commerçants libanais dénoncent une « nécrose » du marché de l’emploi)

 

« Nous voulons un vrai programme de relance des exportations pour récupérer au minimum le milliard de dollars que nous avons perdu à l'export depuis 2012 », plaide Fady Gemayel. Selon lui, ce programme devrait notamment inclure des facilités de financement pour les fonds de roulement des industriels à des taux inférieurs pratiqués aujourd'hui par les banques commerciales (entre 8 et 9 %).

Le Liban devrait également activer sa diplomatie économique afin de relancer les exportations vers les partenaires traditionnels du Liban, telles la Turquie et l'Europe, mais également vers la Chine, soutient M. Gemayel. « Alors que le Liban importe en majorité des produits électriques, la Chine achète surtout de petites quantités de pièces détachées de voitures envoyées à la casse afin d'en extraire le cuivre », explique Eliana Ibrahim, présidente de l'Association pour la promotion des échanges culturels et commerciaux sino-arabes au Liban.

Mais pour doper les exportations vers la Chine, les commerçants libanais doivent s'adapter aux habitudes d'achat locales. « Les Chinois ont l'habitude d'acheter en ligne, alors que de nombreux fabricants libanais ne vendent pas sur internet. Ces derniers veulent parfois aussi négocier des contrats d'exclusivité avec leurs importateurs, mais c'est trop risqué pour la partie chinoise, car le pays est énorme », ajoute Mme Ibrahim.

 

 

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