L'année 2017 démarre sur les chapeaux de roues. Si au Liban la dynamique positive se précise avec la première réunion effective hier du Conseil des ministres, dans la région, le bain de sang se poursuit. Une dizaine d'attaques terroristes ont secoué la Turquie, l'Irak, la Syrie et le Yémen le 1er janvier et rien n'indique que la violence est sur le point d'être circonscrite. La victoire stratégique enregistrée à Alep par le régime syrien et ses alliés, avec à leur tête la Russie, n'a pas favorisé une trêve militaire, ni en Syrie ni ailleurs. En dépit du cessez-le feu décrété par Moscou et Ankara en Syrie, les combats se poursuivent donc dans certaines régions et la Turquie continue à tenter d'avancer ses pions dans la ville frontalière d'al-Bab pour couper en deux la zone géographique kurde dans le nord de la Syrie.
Selon une source diplomatique occidentale, il est clair que la reprise du contrôle d'Alep par les forces du régime et leurs alliés a certainement modifié le rapport de force en Syrie, rendant pratiquement impossible à l'heure actuelle le renversement du président Bachar el-Assad. Les négociations politiques pourraient ainsi reprendre dans le courant de l'année avec le chef de l'État syrien comme interlocuteur privilégié. Mais, selon la même source, cela ne signifie nullement que le camp adverse a baissé les bras. Pour cette source, la période actuelle est marquée par l'attente de l'entrée en fonctions du président américain Donald Trump, à partir du 20 janvier. S'il est certain que le président russe Vladimir Poutine a voulu faire vite avec la libération d'Alep des forces rebelles pour justement créer un fait accompli et éviter de coincer le nouveau président américain, d'autres problèmes vont se poser dès que ce dernier se sera installé à la Maison-Blanche.
D'après les nominations annoncées à travers les médias américains, les principales figures choisies par Donald Trump ont deux caractéristiques : d'abord, elles sont généralement proches du pouvoir russe et ensuite, elles sont radicalement hostiles à l'Iran. Ce qui laisse supposer, estime la source diplomatique précitée, que le prochain bras de fer dans la région devrait opposer l'Iran et les États-Unis et peut-être l'Iran et la Russie. Déjà, les rapports diplomatiques occidentaux font état de profondes divergences entre les Iraniens et les Russes sur le sol syrien, qu'il s'agisse des priorités militaires, des tactiques ou même des processus politiques.
Peut-on d'ores et déjà en déduire qu'un accord russo-américain en Syrie est en vue, qui permettrait d'isoler l'Iran et de lui faire perdre les acquis enregistrés depuis la conclusion de l'accord sur le dossier nucléaire en juillet 2015 ? La source diplomatique précitée estime qu'il est encore trop tôt pour le dire, mais elle considère que sur le plan des relations entre la Russie, l'Iran et les États-Unis, rien n'est vraiment réglé. La nouvelle administration américaine devrait donc s'employer à susciter des conflits entre les Iraniens et les Russes dans le dossier syrien, misant aussi sur une certaine tension entre le régime de Damas et les Iraniens sur fond de rivalités entre Perses et Arabes.
La première concrétisation de cette nouvelle tendance américaine s'est traduite par la reprise par Daech de la ville de Palmyre dans le centre de la Syrie, presque en même temps que la reprise d'Alep par les forces du régime. Pour reprendre Palmyre, les troupes de Daech ont dû traverser des dizaines de kilomètres en plein désert et l'on peut aisément se demander comment elles ont pu le faire sans être découvertes par les nombreux satellites américains qui surveillent en permanence la Syrie. Certes, la reprise par Daech de Palmyre n'est pas de nature à contrebalancer la reprise d'Alep par les forces de Damas et leurs alliés sur le plan stratégique, mais elle constitue, selon la même source diplomatique, un message clair adressé par les Américains aux Russes, selon lequel rien n'est encore définitivement acquis pour eux. En d'autres termes, il s'agit de dire aux Russes que s'ils ont enregistré une grande victoire à Alep, les Américains continuent à avoir leur mot à dire et surtout à avoir des cartes à jouer sur le terrain syrien.
Selon des rapports diplomatiques occidentaux secrets, les États-Unis envisageraient même de créer de nouvelles forces en Syrie, en mesure de contrebalancer le poids pris par les forces chiites. Il s'agirait bien sûr des Kurdes, mais aussi de forces chrétiennes ou même alaouites qui ne seraient pas nécessairement hostiles aux Russes ou même au régime, mais œuvreraient à isoler les chiites en Syrie, qu'ils soient syriens, libanais ou iraniens. Selon ces rapports, la nouvelle administration américaine, qui a déjà adressé de nombreux signaux positifs à la Russie, chercherait à obtenir l'appui du Kremlin dans ce projet en misant sur les tensions latentes entre les Russes et les Iraniens en Syrie. S'il se concrétise, ce projet est aussi de nature à séduire les Arabes du Golfe qui se considèrent comme les principaux perdants de la victoire du régime et de ses alliés à Alep et qui seraient probablement prêts à accepter le maintien du régime syrien pour une période déterminée, moyennant la neutralisation de l'influence iranienne. Ce projet et ces spéculations sont-ils réalistes ? Les prochains mois le diront, mais ils font déjà la joie de certains analystes et en tout cas, ils montrent qu'en Syrie, les bras de fer régionaux et internationaux ne sont pas encore terminés.
Pour mémoire
La bataille d’Alep et le réveil « des cellules dormantes »
Ni « tuteur » ni « défaiseur de nœuds », les priorités du Hezbollah sont ailleurs
commentaires (5)
Plutôt ou bien, les "spéCulations" des Mongols russifiés et des Per(s)cés Gnomes, Nabots.... et NAINS !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
13 h 45, le 06 janvier 2017