Rechercher
Rechercher

Liban - Colloque

La Constitution et Taëf décortiqués pour « remédier à certaines lacunes »

Des spécialistes ont planché, au cours d'un colloque organisé par le RPR, sur les prérogatives du chef de l'État, ainsi que celles du Parlement et du gouvernement.

Si la praxis politique libanaise a longtemps été entachée d'irrégularités, nombreux sont ceux qui estiment qu'il vaudrait mieux commencer par remédier aux lacunes observées au niveau des textes constitutionnels et de ceux de l'accord de Taëf baptisé « document d'entente nationale », en vue de redresser la vie politique du pays.

C'est dans ce cadre qu'il convient de placer le colloque organisé durant le week-end par le Rassemblement de la République de l'ancien chef de l'État Michel Sleiman, à l'hôtel Hilton à Sin el-Fil, sous le thème Renforcer le document d'entente nationale et débattre des lacunes constitutionnelles. Étaient présentes de nombreuses personnalités politiques, dont le ministre sortant du Tourisme Michel Pharaon (représentant le président de la République Michel Aoun), le ministre sortant de l'Environnement, Mohammad Machnouk, représentant le Premier ministre Tammam Salam, et l'ancien chef du gouvernement Fouad Siniora, représentant le Premier ministre désigné Saad Hariri. Parmi les présents, de nombreux autres officiels, ainsi qu'un parterre de spécialistes du droit et de sciences politiques, et des figures ayant longtemps marqué la scène politique libanaise.

Lors de la séance inaugurale, Michel Sleiman a rappelé que « le RPR a pour objectif principal de renforcer les principes de l'État, loin de toute menace d'un recours à une Constituante ». « Il est crucial de renforcer le document d'entente nationale qui représente le contrat social liant les Libanais entre eux », a encore dit M. Sleiman avant d'estimer qu'« au vu de l'incapacité des parties politiques, il a fallu plancher sur les lacunes d'ordre constitutionnel qui ont causé cette paralysie politique ».

De son côté, l'ancien président Amine Gemayel a formulé quelques remarques concernant la mise en application de l'accord de Taëf. Selon lui, « les amendements que l'accord a apportés à la Constitution ont affaibli la présidence de la République et ont instauré un leadership collectif ». « Il a ainsi contribué à fragiliser et affaiblir la souveraineté de l'État », a-t-il noté, estimant par la même occasion que « Taëf a arraché au chef de l'État les prérogatives lui permettant de mettre à exécution son discours d'investiture ». Amine Gemayel a souligné aussi que « l'application de l'accord est toujours incomplète, notamment en matière de décentralisation élargie, ce qui explique le clientélisme encore observé au Liban ».

À son tour, l'ancien Premier ministre Nagib Mikati a proposé quelques réformes pour améliorer le système politique. Il a ainsi appelé les responsables à assurer l'indépendance du pouvoir judiciaire, appliquer la décentralisation administrative élargie, voter une loi électorale moderne axée sur la proportionnelle et à la mise en place d'un Sénat (qui représenterait les familles spirituelles). M. Mikati a noté toutefois que l'accord de Taëf est « un renouvellement de l'entente des Libanais autour du Liban, nation définitive de tous ».

 

« Gare au chaos »
Pour sa part, Fouad Siniora a estimé que « la discussion d'un éventuel amendement de l'accord de Taëf ou d'une possible révision de certaines clauses constitutionnelles est prématurée, dans la mesure où elle pourrait plonger le pays dans une atmosphère tendue marquée par des revendications contradictoires ». Tout en reconnaissant que certaines clauses essentielles de l'accord n'ont pas été appliquées, M. Siniora a estimé que les péripéties politiques ont prouvé que personne n'a de substitut au document d'entente nationale. « Abandonner Taëf avant d'en assurer le substitut plongera le pays dans le chaos », a-t-il averti.
Même son de cloche chez le ministre Mohammad Machnouk : « Il ne faut pas que l'esprit de Taëf soit au centre d'un procès politique, dans la mesure où il est la raison d'être du Liban. »

 

Réduction « significative »
Les participants se sont ensuite répartis en trois panels, pour discuter des rôles et prérogatives des institutions, à la lumière des textes constitutionnels en vue de proposer les modifications jugées nécessaires pour un meilleur fonctionnement du système politique.

À l'heure où plusieurs formations politiques se félicitent d'avoir mené ce qu'ils appellent « un président fort » à la tête de l'État, le débat autour du quorum de l'élection présidentielle et des prérogatives du chef de l'État après Taëf bat toujours son plein. Face à ce constat, il était tout à fait normal de voir ces deux polémiques au centre des discussions de l'un des trois panels du colloque.

Robert Ghanem, député de la Békaa et président de la commission parlementaire de la Justice et de l'Administration, a souligné que les amendements de la Constitution s'avèrent de plus en plus nécessaires pour une application effective et complète des textes. Selon lui, « la question n'est pas de savoir si le président élu est fort dans son environnement, mais plutôt s'il dispose des moyens lui permettant de gouverner comme cela se doit ». M. Ghanem a ainsi proposé des modifications à la Constitution qui s'inscriraient dans la logique du renforcement du rôle et de l'action du chef de l'État. Il s'agit notamment de l'article 56 (prolonger à deux mois le délai accordé au président pour promulguer les lois votées par la Chambre). Concernant l'article 65, le député de la Békaa a proposé de fixer un délai pour la formation du cabinet. Pour ce qui est de l'article 49 portant sur l'élection présidentielle, Robert Ghanem a préconisé le quorum des deux tiers pour élire le chef de l'État. Il a même été jusqu'à demander de considérer que les députés qui s'absentent trois fois soient dessaisis de leur droit de voter à la présidentielle.

Tel était aussi l'avis de Salim Sayegh, vice-président des Kataëb et ancien ministre des Affaires sociales. « La participation aux séances électorales est obligatoire parce que les députés ont le devoir éthique d'élire un président de la République. Depuis Taëf, les présidents n'ont pas pu exercer leurs prérogatives d'une manière adéquate, ce qui a mené au blocage de la présidence en tant que poste », a expliqué M. Sayegh, avant d'ajouter :
« Il est faux de considérer que la personnalité du président le protège. Il faut que la Constitution remplisse cette fonction. Renforcer les prérogatives du président ne signifie aucunement lui donner une quote-part en Conseil des ministres, dans la mesure où cela le rend égal aux formations politiques, alors qu'il devrait leur être supérieur. »

À son tour, Bahige Tabbara, ancien ministre de la Justice, a déclaré sans détour que l'accord de Taëf « a réduit les prérogatives présidentielles d'une manière significative ». Il a noté, en revanche, que le chef de l'État conserve toujours le droit de signer le décret de formation du gouvernement ». A contrario, Salah Honein, ancien député, a estimé que « le document d'entente nationale a gardé au président de la République une large marge de manœuvre avec d'importantes prérogatives, dont celle de négocier les traités internationaux et accréditer les ambassadeurs. Cela signifie qu'il peut tracer la politique étrangère du pays », a-t-il noté, avant de rappeler que « le chef de l'État préside le Conseil des ministres lorsqu'il le désire. Ce qui implique qu'il peut le diriger et cela est très important ».
Enfin, le juge Hassan Rifaat a pris la parole, expliquant les prérogatives présidentielles à partir de la jurisprudence du juge administratif. « Le président de la République a les moyens d'assurer le respect de la Constitution parce qu'il est le commandant en chef des forces armées et le représentant de l'État dans les grandes instances locales et internationales », a-t-il fait valoir.

 

Les recommandations

Après avoir examiné les prérogatives de toutes les institutions, les participants au colloque ont adopté une série de recommandations parmi lesquelles nous citons :
- Adopter le vote électronique à la Chambre des députés.
- Fixer l'âge de vote aux législatives à 18 ans.
- Accorder au président de la République le droit de présenter des propositions de loi.
- Accorder au président de la République le droit de dissoudre la Chambre avec l'approbation des deux tiers des ministres.
- Réduire le quorum pour l'élection du chef de l'État (opter pour la majorité absolue) ou donner au président sortant le droit de dissoudre la Chambre si le quorum des deux tiers n'est pas atteint.

 

Pour mémoire

Pour le Hezbollah, les dispositions de Taëf impliquent une gestion collective de la chose publique

Bkerké appelle les forces politiques à réactiver le « compromis politique » de Taëf

Si la praxis politique libanaise a longtemps été entachée d'irrégularités, nombreux sont ceux qui estiment qu'il vaudrait mieux commencer par remédier aux lacunes observées au niveau des textes constitutionnels et de ceux de l'accord de Taëf baptisé « document d'entente nationale », en vue de redresser la vie politique du pays.
C'est dans ce cadre qu'il convient de placer le...

commentaires (2)

UNE FOIS LE GOUVERNEMENT FORME... ON DEVRAIT S,ATTABLER A DIALOGUER AVEC LA COMMUNAUTE CHIITE DU PAYS POUR REMEDIER A TOUTE INJUSTICE A LEUR EGARD EXCLUS TRYPTIQUE ET ARMES ILLEGALES QUE LA MAJORITE ECRASANTE DES LIBANAIS REFUSE...

LA LIBRE EXPRESSION

07 h 58, le 05 décembre 2016

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • UNE FOIS LE GOUVERNEMENT FORME... ON DEVRAIT S,ATTABLER A DIALOGUER AVEC LA COMMUNAUTE CHIITE DU PAYS POUR REMEDIER A TOUTE INJUSTICE A LEUR EGARD EXCLUS TRYPTIQUE ET ARMES ILLEGALES QUE LA MAJORITE ECRASANTE DES LIBANAIS REFUSE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 58, le 05 décembre 2016

  • "l'application de l'accord est toujours incomplète", surtout en ce qui concerne un point essentiel: la dissolution des milices.

    Yves Prevost

    06 h 47, le 05 décembre 2016

Retour en haut