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Économie - Splendeurs et misères économiques

Les keynésiens aiment Trump !

Né à Beyrouth, Michel Santi est un macroéconomiste franco-suisse qui conseille des banques centrales et des fonds souverains. Il est notamment l’auteur de « Misère et opulence » et de « Pour un capitalisme entre adultes consentants ».

Comment comprendre la sérénité – l'euphorie ? – des marchés suite à l'élection de Donald Trump ? Assurément, pas de crise économique ni de récession ne sont envisagées dans un contexte où la domination des républicains au Sénat, à la Chambre des représentants et à la Maison-Blanche stimuleront les prises de décision relativement rapides car consensuelles, et la mise en place d'une partie importante du programme du candidat Trump. Il est néanmoins un marché – l'obligataire – qui nous envoie un tout autre message depuis cette élection présidentielle américaine. Ses valorisations se dégradent en effet brutalement, signe que les marchés anticipent une hausse des taux d'intérêt US car la future administration Trump s'est engagée à intensifier les dépenses publiques au bénéfice de la construction et de la rénovation des infrastructures du pays. Combinées aux réductions massives d'impôts également promises, ces mesures déclinent une politique publique keynésienne pour relancer l'économie.
De fait, les dépenses publiques sont pratiquement toujours supérieures lorsque les États-Unis sont présidés par un républicain. Un président issu de ce parti a effectivement dépensé un quart de point de PIB par an de plus que son alter ego démocrate si l'on étudie les administrations qui se sont succédé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. À cet égard, la chute ininterrompue et assez spectaculaire du marché obligataire depuis l'élection de Trump révèle que les intervenants économiques et financiers considèrent que ce nouveau président persévérera dans la logique keynésienne de ses prédécesseurs républicains, et qu'il se départira donc de la politique rigoriste des démocrates ayant très souvent à cœur de renflouer les déficits et même de maintenir des excédents publics.
Du coup, les marchés et les acteurs économiques anticipent un regain des pressions inflationnistes (reflétées par une baisse du marché obligataire lequel évolue en sens inverse) : inflation bienvenue et seule susceptible d'opérer cet allumage de la fusée économique au sein de nos économies occidentales empêtrées dans une stagnation séculaire.
Certes, la Réserve fédérale – qui s'est dépensée et qui a dépensé sans compter pour relancer son économie – aurait pu, elle aussi, contribuer à une certaine relance de l'inflation en affichant clairement son intention de ne pas remonter les taux d'intérêt américains, voire en introduisant un nouveau programme de baisses de taux quantitatives (création monétaire). Cependant, les membres du directoire de cette Banque centrale ont très clairement des réticences intellectuelles qui les empêchent de maintenir les taux à leur niveau actuel proche du zéro alors que l'économie est proche du plein emploi.
Comme les dépenses d'infrastructures substantielles de l'administration Trump (ponctionnées sur le budget fédéral) se traduiront par une hausse du taux d'intérêt réel de l'économie, la Fed sera donc en mesure de remontrer très progressivement ses propres taux directeurs, tout en maintenant ceux-ci en dessous du taux d'intérêt réel de l'activité économique afin de ne pas casser la reprise. Cette alliance objective entre la Fed (dirigée par une démocrate) et l'administration Trump constituerait donc une combinaison keynésienne idéale à laquelle applaudissent déjà les marchés.
Voilà de longues années que la Fed tente – à la faveur d'une politique monétaire énergique et hétérodoxe – d'agir pour remontrer le taux d'équilibre réel de l'économie américaine au-dessus de son propre taux d'intérêt nominal. Il n'a pourtant suffi que de quelques jours pour que ce taux d'intérêt réel de l'économie US passe désormais allègrement au-dessus du taux directeur défini par la Fed : en quelques jours, Donald Trump a pu accomplir ce que la toute puissante Réserve fédérale tentait quasi désespérément de mettre en place depuis 2008 !
Preuve que le politique prime sur l'économique. Preuve que détermination et volonté conditionnent confiance et croissance.

Comment comprendre la sérénité – l'euphorie ? – des marchés suite à l'élection de Donald Trump ? Assurément, pas de crise économique ni de récession ne sont envisagées dans un contexte où la domination des républicains au Sénat, à la Chambre des représentants et à la Maison-Blanche stimuleront les prises de décision relativement rapides car consensuelles, et la mise en place...

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