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Culture - Exposition

Un Coran géant dédié à Tamerlan, en vedette à Washington

En plein débat sur la montée de l'islamophobie, la calligraphie coranique – en provenance du monde arabe, de la Turquie, de l'Iran et de l'Afghanistan – s'invite dans toute sa splendeur et toute sa grandeur sur d'illustres cimaises de la capitale fédérale.

Un autre style chirazien, un siècle plus tard (1580).

Redoutable guerrier, mais aussi protecteur des arts, Tamerlan n'avait pas été impressionné par le délicat et patient travail d'un calligraphe de sa cour qui, au XVe siècle, avait retranscrit le Coran sur un sceau. Ce calligraphe, nommé Omar Akta, avait alors décidé de passer de l'infiniment petit à l'infiniment grand. Choisissant un format de pages de

2 x 1,50 mètres, il s'est remis à l'ouvrage, réécrivant le livre saint en lettres d'or, de 20 à 22 centimètres de haut, sur cet immense espace. Et, une fois sa tâche terminée, il a dû mettre ce Coran, d'un volume jamais vu auparavant, sur une brouette pour le faire parvenir au célèbre conquérant de l'Asie. Ce dernier, qui aimait tout ce qui était grand, avait largement récompensé le calligraphe.

Aujourd'hui, deux feuilles de cette œuvre phénoménale constituent l'un des points forts d'une exposition de la Sackler Gallery à Washington intitulée L'Art du Coran : trésor du musée des arts turcs et islamiques d'Istanbul. La curatrice en chef de la galerie, également curatrice du département d'art islamique, Massumeh Farhad, évoque le processus de cet ouvrage sacré sorti des normes conventionnelles : « Il n'était certes pas inhabituel que des Corans se retrouvent en pièces détachées. Cependant, il n'est pas clair que les feuilles de cette version géante aient été reliées à l'origine. Aussi, cette version devait être composée de milliers de pages, mais la plupart ont été perdues. Il ne reste qu'une dizaine dont les deux en vue ici, qui ont été trouvées au XIXe siècle par un voyageur britannique, dans un mausolée de l'est de l'Iran. »

 

(Lire aussi : À Rome, l'art islamique combat l'islamisme)

 

Aux côtés d'un millénaire d'esthétique religieuse
Selon Simon Rettig, le curateur adjoint de l'exposition, les inscriptions qu'on peut lire sont tirées du chapitre du Coran qui explique « que les signes de Dieu et l'évidence de Sa bonté sont partout ». Sont aussi mentionnés la réfutation du matérialisme, une mise en garde à ceux qui ne suivent pas le droit chemin et un encouragement à toujours pardonner. Il cite également ce passage : « Si quelqu'un fait une bonne action, ce serait au profit de son âme, s'il choisit le mal, son âme en pâtirait. »

Sur ces mêmes cimaises ont été réunis plus de 60 des plus anciens et des plus rares Corans manuscrits en provenance du monde arabe, de la Turquie, de l'Iran et de l'Afghanistan. De véritables œuvres d'art, riches en somptueuses enluminures, délicats entrelacs calligraphiques et divers styles d'ornement très élaborés. Elles composent l'un des trésors du musée d'art turc et islamique d'Istanbul, et dont la bâtisse est l'ancien palais d'Ibrahim Pacha, grand vizir du sultan Soliman le Magnifique. Ces spécimens, de toute beauté, ont leurs histoires à raconter qui s'étalent du VIIIe siècle (juste après la révélation par le prophète Mohammad) au XVIIe siècle. Un millénaire d'esthétique religieuse jamais atteinte, d'autant que la plupart du temps, la présentation des textes divins était destinée aux grands de l'époque : les dirigeants et les membres de l'élite islamique. Leur réalisation ouvre une fenêtre sur l'histoire de l'islam et des pays où ils ont fait florès.

À noter que cette exposition, qui dévoile les plus recherchés des Corans et dont certains n'avaient jamais quitté la Turquie auparavant, fait partie d'une série d'accrochages à la Sackler Gallery, sur le thème des Arts du monde islamique. Leurs titres, Montagnes de turquoise : artistes transformant l'Afghanistan et Bleu : couleur des céramiques du monde musulman, braquent les feux sur l'essence de l'islam, générant de la belle ouvrage. Pour estomper ces sombres interprétations qui prévalent aujourd'hui...

 

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