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Liban - Aoun de retour à Baabda

Une centaine de pas pour exorciser 26 ans de séparation

Le président de la République élu a été décoré de l'écharpe de l'ordre du Mérite libanais et du grand collier de l'ordre national du Cèdre.

M. Aoun passant en revue une unité de la garde républicaine.

Lundi 31 octobre 2016. Il est 15h15. Vingt et un coups de canon sont tirés, les bateaux font retentir leurs sirènes et la fontaine est à nouveau activée : le Liban a un nouveau chef de l'État. Mieux encore : Michel Aoun est de retour au palais présidentiel de Baabda. Cette fois, il n'est plus commandant en chef de l'armée, mais le 13e président de la République depuis l'indépendance.

Élu président de la République à une majorité de 83 voix près d'une heure auparavant, c'est un Michel Aoun très ému qui est accueilli au palais présidentiel. Lors de son entrée à son « domicile » pour les six prochaines années, ses petits pas sur le tapis rouge ne sont que la concrétisation de 26 longues années d'attente passées en exil, d'une part, et au sein des institutions militaire et politique, d'autre part. Ils rappellent aussi des souvenirs lointains qu'évoque le retour – quoique voulu et longtemps rêvé – à un lieu qui a témoigné de dures épreuves vécues par le fondateur du Courant patriotique libre.

 

(Lire aussi : Aoun président, mais l'incertitude reste de mise)

 

Quelques minutes avant l'arrivée du président élu, ce sont les membres de sa famille, notamment ses filles Claudine Roukoz, Mireille Hachem et Chantal Bassil et leurs familles respectives qui se rendent au palais de Baabda pour participer à la cérémonie d'accueil du président de la République.
Alors que l'armée libanaise joue l'hymne national et l'air de vénération, le nouveau président de la République (trahi à plusieurs reprises par ses larmes, à l'instar du chef du Courant patriotique libre et ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil) passe en revue une unité de la garde républicaine avant de serrer la main des hauts fonctionnaires du palais de Baabda, à savoir Élie Assaf (directeur de la présidence de la République), Antoine Choucair, directeur général du palais de Baabda, Rafic Chlala, chef du bureau de presse, et Wadih Ghafari, commandant de la garde républicaine.

 

(Lire aussi : 1988 - 2016 : Michel Aoun en 16 "petites phrases")

 

Avec la fin de la cérémonie d'accueil protocolaire, c'est un moment familial par excellence que partagent le président de la République, la Première dame Nadia Aoun et leur famille, plus d'un quart de siècle après le départ forcé de ce même endroit, sous les bombardements syriens lors de la bataille du 13 octobre 1990. L'occasion pour les nouveaux locataires du palais présidentiel de graver le souvenir de ces moments tant attendus par des photos où l'on peut voir le nouveau président de la République décoré de l'écharpe de l'ordre du Mérite libanais (classe exceptionnelle), ainsi que du grand collier de l'ordre national du Cèdre. Ces derniers lui ont été remis par Lahoud Lahoud, directeur du service du protocole présidentiel, en raison de la longue et coûteuse vacance présidentielle de plus de deux ans et demi. Dans les circonstances normales, c'est au président sortant de la République de les remettre à son successeur, pour marquer le début d'un nouveau mandat présidentiel.

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« Mieux vaut tard que jamais »
Si Michel Aoun est aujourd'hui le nouveau président de la République, sur base d'ententes politiques conclues avec le leader des Forces libanaises Samir Geagea puis le chef du courant du Futur Saad Hariri, cela n'écarte aucunement les grandes batailles politiques et militaires qu'il a menées dans plusieurs phases de l'histoire moderne du Liban. « Il mérite donc d'être hissé à la tête de l'État, en sa qualité de "meilleur" représentant des chrétiens. »

Tel est le sentiment exprimé hier après-midi par des membres du bloc du Changement et de la Réforme (qu'a présidé M. Aoun depuis 2005). Après la levée de la séance parlementaire, les députés aounistes se sont rendus au palais de Baabda pour célébrer cette « victoire » aux côtés du « vainqueur ». « Mieux vaut tard que jamais » semble être le nouveau maître-mot des aounistes optimistes quant à la formation rapide du nouveau cabinet de Saad Hariri, et fiers de voir leur leader retourner à Baabda en vertu d'une « élection démocratique » marquée par une opposition significative qui ne semble pas inquiéter le nouveau mandat présidentiel.


(Lire aussi : Présidentielle : les acteurs économiques espèrent le changement et les réformes)

 

C'est avec un sourire incarnant la fierté que Nagi Gharios, député de Baabda, résume à L'Orient-Le Jour la journée d'hier : « C'est le début de la concrétisation du pacte national et du véritable partenariat, même si cela a coûté 26 ans d'attente. Mieux vaut tard que jamais. » De son côté, Nabil Nicolas, député aouniste du Metn, ne cache pas sa joie : « Nous sommes sûrement contents de voir le général Aoun président de la République », dit-il à L'OLJ, avant de poursuivre : « Nous remercions Samy Gemayel (chef du parti Kataëb) et tous ceux qui n'ont pas voté Michel Aoun. C'est la démocratie. Nous avons assisté à une élection présidentielle démocratique et non à un simple vote, preuve en est les résultats de l'élection. » Selon M. Nicolas, « un avenir commun nous joindra aux Kataëb et au reste des formations encore hostiles à M. Aoun ». Commentant les résultats de la séance électorale, lors d'une conversation à bâtons rompus avec les journalistes, le député Alain Aoun a estimé que les quatre tours de vote ne peuvent être placés que dans le cadre du « parasitage » à l'encontre du mandat de Michel Aoun.

 

(Biographie : De l'armée à la présidence de la République, le parcours de Michel Aoun en images)

 

Enfin, sur le plan strictement constitutionnel, et « conformément à l'article 69 de la Constitution ("considérer le gouvernement démissionnaire"), notamment la clause d, et comme un nouveau mandat a débuté, le président de la République a remercié le Premier ministre et les ministres », peut-on lire dans un communiqué publié hier par la direction générale de la présidence de la République. « Il a demandé au gouvernement d'expédier les affaires courantes jusqu'à la formation du nouveau cabinet », ajoute le texte.

Concernant les conseillers du nouveau chef de l'État, des sources aounistes ont indiqué à l'agence al-Markaziya que l'équipe de travail de Michel Aoun comprend Gebran Bassil, les anciens ministres Sélim Jreissati et Karim Pakradouni, ainsi que l'ancien vice-président de la Chambre Élie Ferzli. De leur côté, Jean Aziz (rédacteur en chef de la OTV) présidera le bureau de presse et le colonel Sélim Féghali commandera la garde républicaine.

 

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