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Liban - La situation

Michel Aoun face à l’impératif de légitimité

Michel Aoun.

Le palais de Baabda s'est dépoussiéré. La logistique est prête pour accueillir le prochain président de la République, qui sera vraisemblablement – à moins d'une surprise de dernière minute – le général Michel Aoun.
De source informée, ce dernier envisagerait de prononcer son discours d'investiture sitôt que serait annoncée son élection lundi prochain, de sorte à gagner ses nouveaux appartements le jour même. L'accélération du protocole sera comme la marque de l'entrée en fonctions de M. Aoun. La cérémonie de port du cordon présidentiel, que remet traditionnellement le président sortant à son successeur, se fera cette fois encore en l'absence du premier, comme en 2008. Le rituel des félicitations au palais de Baabda censé suivre ne devrait pas avoir lieu non plus, le nouveau président ayant prévu d'entamer dès mercredi prochain les consultations parlementaires préalables à la désignation du nouveau Premier ministre.

Des manifestations populaires et prolongées devront néanmoins rompre ce minimalisme officiel du protocole. Une circulaire a été diffusée hier en soirée par le Courant patriotique libre, informant ses partisans du cérémonial postélectoral. Lundi soir dès neuf heures, le centre-ville de Beyrouth, l'espace de la Marina-Dbayé et un troisième lieu qui sera fixé ultérieurement seront le terrain de festivités populaires ouvertes au public, animées par « des feux d'artifices impressionnants et de grandes figures de la chanson libanaise », selon la circulaire, qui interdit expressément les tirs de joie. Les partisans et sympathisants présents dans les régions excentrées sont invités à organiser des festivités locales pour l'occasion.
Le premier dimanche qui suivra l'élection (le 6 novembre) doit unifier les sympathisants dans une « longue procession vers la maison du peuple menée par des foules de toutes les régions », selon la circulaire, qui prescrit « le port du seul drapeau libanais » et promet une « journée qui sera retenue par l'histoire ».

Pour le camp aouniste, qui s'est toujours targué d'être le plus représentatif des chrétiens, il y a comme un impératif qui devrait sous-tendre le mandat Aoun : entretenir coûte que coûte l'image de foules en liesse pour perpétuer la légitimité du pouvoir, fût-ce de façon illusoire.
Et cet impératif s'imposerait d'ores et déjà au nouveau locataire de Baabda. Même si la majorité des voix au Parlement lui sera acquise, celle-ci suffira à l'élire, non à le consacrer comme président fort d'un large consensus comme il l'entendait.

 

(Lire aussi : Berry ne modifierait pas sa position concernant l'élection de Aoun)

 

 

La polémique suscitée par le président de la Chambre autour de la majorité des voix requises pour l'élection du président s'est avérée n'être qu'un moyen de lui rappeler qu'il ne sera pas élu à la majorité des deux tiers, mais à la seule majorité absolue. D'ailleurs, la polémique a été « tranchée » hier dans le sens escompté par le président de la Chambre : la séance électorale du 31 octobre prochain s'ouvrira sur un (nouveau) premier tour, exigeant une élection aux deux tiers des votes, faute de quoi s'ouvriront les tours de scrutin suivants, où la majorité absolue serait suffisante. Un autre paramètre qui fragilise d'entrée l'investiture de Michel Aoun : aucun des deux autres candidats en lice, ni le député Henri Hélou ni le député Sleiman Frangié, ne se sont pour l'instant retirés de la course en sa faveur.

Le premier représente en quelque sorte l'opposition à l'option Aoun par des parlementaires qui continuent de prêter allégeance au 14 Mars 2005. Dans un communiqué détaillé, M. Hélou a ainsi réaffirmé le maintien de sa candidature, laquelle ne serait retirée que si « l'intérêt du pays l'exigeait ». Cet intérêt se mesure à l'échelle des valeurs inculquées par son père, Pierre Hélou, et de son grand-père, Michel Chiha, « père de la Constitution », a-t-il dit. Comprendre a contrario – et indépendamment de la consigne de vote officielle que Walid Joumblatt donnerait à ses députés – que l'élection de Michel Aoun ne serait pas compatible avec les textes fondateurs qui font l'entité libanaise. Elle serait une rupture fondamentale avec toute la dynamique souverainiste contre la tutelle syrienne, puis contre la mainmise iranienne, dont Michel Aoun a balisé le terrain depuis son document d'entente avec le Hezbollah en février 2006.

Quant à la candidature de Sleiman Frangié, elle vient rappeler que même dans le giron du Hezbollah, la légitimité de Michel Aoun n'est pas entière. Continuant de faire acte de présence, M. Frangié a été reçu hier chaleureusement par le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï. Sur le perron de Dimane, le leader des Marada a déclaré qu'il maintenait sa candidature et que son entretien avec le patriarche était chose « naturelle » à la veille de la séance électorale. Priés de préciser la portée de cette visite, des milieux du courant Marada affirment à L'Orient-Le Jour que « Sleiman Frangié entretient une relation stable avec Bkerké, basée sur la confiance mutuelle, dont atteste la régularité des concertations bilatérales ».

L'on sait que le patriarche maronite est mû par le vif souci de combler la vacance présidentielle, indépendamment de la personne du candidat. La visite de M. Frangié viendrait confirmer ainsi la neutralité de Bkerké, tout en soulignant l'envergure propre du chef des Marada en tant que leader chrétien. Un autre élément qui devrait jouer en sa faveur : le nombre de votes important en sa faveur (on apprenait d'ailleurs que les députés du PSNS et du Baas entendent toujours voter pour M. Frangié). L'intérêt de ces votes serait double : il ne s'agit pas seulement de priver M. Aoun d'une majorité confortable, c'est-à-dire d'un atout important pour son mandat. Il s'agit aussi de valoriser face à lui activement le contrepoids Sleiman Frangié, dans un cadre qui dépasse l'échéance ponctuelle de la présidentielle.

La situation du pays est à lire en dépassement du rendez-vous du 31 octobre. Parce que le scrutin attendu n'est pas l'objet d'un compromis national qui ferait suite à un début de résolution des conflits irano-saoudiens dans la région. L'heure n'est pas aux solutions dans la région, et encore moins au Liban. Si l'Iran a entendu rompre sa politique du vide, c'est parce que l'élection de Michel Aoun lui profiterait autant, sinon plus, que le vide. C'est ainsi que l'entendent certains médias saoudiens, qui publient depuis deux jours des articles virulents sur la situation au Liban. Selon un article de la gazette al-Jazira al-Saoudiya, Michel « Aoun, et avec lui Saad Hariri, s'il préside le cabinet, seront à l'image de Haider el-Abadi à Bagdad ».

Conscients du « risque » que Saad Hariri prend en endossant l'option Aoun, des milieux du courant du Futur appellent les diplomates inquiets des retombées de son élection à « formuler fermement leurs craintes », de sorte à prévenir d'éventuels « dérapages » du futur président. Ces milieux se disent confiants que Michel Aoun « se tient personnellement responsable de la réussite du cabinet Hariri et de la relance institutionnelle ». Comprendre que toute tentative du 8 Mars de paralyser Saad Hariri se répercutera sur Michel Aoun, selon ces milieux, lesquels disent, enfin, ne s'en tenir qu'à la position officielle de l'Arabie, « qui a donné aux Libanais l'entière liberté de gérer leurs affaires ».

 

 

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Le palais de Baabda s'est dépoussiéré. La logistique est prête pour accueillir le prochain président de la République, qui sera vraisemblablement – à moins d'une surprise de dernière minute – le général Michel Aoun.De source informée, ce dernier envisagerait de prononcer son discours d'investiture sitôt que serait annoncée son élection lundi prochain, de sorte à gagner ses...

commentaires (6)

On ne comprend plus ce qui se passe chez nous ???que Dieu nous preserve...

Soeur Yvette

16 h 51, le 27 octobre 2016

Tous les commentaires

Commentaires (6)

  • On ne comprend plus ce qui se passe chez nous ???que Dieu nous preserve...

    Soeur Yvette

    16 h 51, le 27 octobre 2016

  • ON DIRAIT JOHN WAYNE AVEC SES DEUX REVOLVERS...

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 15, le 27 octobre 2016

  • On constatera cette capacité de boa en matière de mauvaise foi . Pour l'international , l'entente obtenue au Liban sur la candidature du Phare Aoun au poste vacant de président de la République, était à la fois signe de victoire pour l’Iran et de défaite pour les bansaouds. Le principal obstacle au processus de nomination du nouveau président libanais était, jusqu’à présent, l’opposition du (pro-Riyad), saad Hariri, à la candidature de Michel Aoun, soutenu par le Hezb résitant et ses alliés. Mais saad a finalement annoncé cette semaine qu’il soutiendrait la candidature du Phare Aoun. C'est un signe d'une supériorité de l'alliance CPL/HEZB soutenu par l’Iran» et d'une faiblesse des bensouds, en ajoutant que l’événement, bien qu’il mette fin à l’un des principaux problèmes politiques du Liban, peut aussi se révéler source de nouvelles tensions sur la constitution du gouvernement qui serait peut-être dirigé par saad . Le CPL/HEZB semble invincible. Le dossier libanais perd désormais sa priorité pour les dirigeants bensaouds, qui préfèrent se concentrer désormais sur leur rivalité avec l’Iran ailleurs: au Yémen, à Bahreïn ou en Syrie où le Hezb résistant continue de se battre aux côtés du héros Bashar al-Assad.

    FRIK-A-FRAK

    11 h 45, le 27 octobre 2016

  • LA LEGITIMITE S,OCTROIE... NE SE PREND PAS ET NE S,IMPOSE PAS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 39, le 27 octobre 2016

  • Michel Aoun a la légitimité du peuple et des confessions surtout chose rare qui ne s'est plus produite depuis 1943.

    Sabbagha Antoine

    07 h 39, le 27 octobre 2016

  • Vous dites que "le nouveau président ayant prévu d'entamer dès mercredi prochain les consultations parlementaires préalables à la désignation du nouveau Premier ministre." C'est une blague n'est-ce-pas? Puisque l'on sait bien que se sera Saad Hariri, alors pourquoi cette mascarade? Enfin, tout ce processus n'est qu'une mascarade et une fumisterie!

    IMB a SPO

    04 h 14, le 27 octobre 2016

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