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Économie - Liban - Finances publiques

Un an après, la « nécessité » économique réveille à nouveau les députés

La séance législative d'hier a vu l'adoption, dans l'urgence, de lois devant notamment permettre au pays de se conformer aux normes internationales sur la transparence fiscale ou d'autoriser des engagements financiers de l'État en l'absence de budget.

Les députés ont notamment voté hier l’octroi d’environ 510 millions de dollars de crédits supplémentaires à l’administration, pour couvrir certaines dépenses jusqu’à la fin de l’année. Photo Sami Ayad

Onze mois après avoir contourné une première fois les dispositions constitutionnelles – qui subordonnent l'activité législative du Parlement à l'élection préalable d'un chef de l'État – au nom de la « législation de nécessité », les députés ont usé du même procédé pour voter hier, au cours d'une séance marathon, 12 lois jugées indispensables pour l'économie du pays et sa réputation à l'international.

Pour rappel, lors des séances du 12 et 13 novembre 2015, le Parlement avait ainsi adopté une trentaine de lois permettant notamment d'éviter au pays de perdre plusieurs centaines de millions de dollars en prêts internationaux ou de mettre en conformité la législation libanaise avec les normes fiscales ou financières internationales.

 

Échange d'informations fiscales
Comme ce fut donc le cas en novembre 2015, c'est sous la pression internationale que les parlementaires se sont décidés à interrompre exceptionnellement une paralysie législative qui, hormis cette exception, perdure depuis deux ans et demi. Il s'agissait cette fois de permettre au Liban de passer avec succès l'examen de son système d'échanges d'informations fiscales sur demande du Forum mondial sur la transparence fiscale (FMTF). Cette validation constitue un préalable indispensable à la mise en œuvre de la norme d'échange automatique d'informations (CRS en anglais) de l'OCDE, que le Liban s'est engagé à appliquer d'ici à septembre 2018. Si la législation libanaise est jugée non conforme par le FMTF, le pays pourrait éventuellement se retrouver sur les prochaines listes noires internationales, dont celle prévue en juillet par le G- 20. Or cette évaluation s'est achevée en septembre sans que le Liban n'ait mis à jour le dispositif introduit par la loi n° 43 de novembre dernier et qui avait été jugé insuffisant par le FMTF. Une délégation d'officiels de plusieurs ministères et de la Banque centrale s'était donc rendue à Paris pour obtenir in extremis un sursis jusqu'à novembre afin d'adapter sa législation.

La première des modifications requises par le FMTF portait sur l'élimination de restrictions à l'échange d'informations sur demande, contenues dans la loi n° 43 ; comme, par exemple, l'exigence préalable de soupçons sérieux d'évasion fiscale sur les personnes visées par les demandes. Les députés ont donc annulé cette loi pour lui en substituer une nouvelle qui redéfinit la procédure en l'expurgeant de ces conditions restrictives. En outre, cette loi autorise désormais la signature, par le ministre des Finances, puis la ratification par le gouvernement, de deux conventions de l'OCDE. Le gouvernement pourra ainsi, sans avoir à passer à nouveau par le Parlement, ratifier d'abord la Convention d'assistance administrative mutuelle en matière fiscale, qui instaure le standard d'échange d'informations sur demande avec les pays signataires (104 à ce jour selon le site de l'OCDE). Il pourra, ensuite, ratifier l'Accord multilatéral sur l'échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers (84 signataires) qui permet l'adoption de la norme CRS. « Ces dispositions correspondent à ce qui a été négocié entre le ministère des Finances et le Forum mondial ces dernières semaines », a indiqué à L'Orient-Le Jour le député Ghassan Moukheiber (bloc du Changement et de la Réforme).

À noter que les discussions autour de cette proposition de loi ont provoqué une interruption de séance de plusieurs heures, au cours de laquelle certains amendements ont été apportés par un comité restreint. « Il s'agit essentiellement de points de formulation et de dispositions renforçant la portée du texte comme l'introduction de lourdes pénalités pour les contrevenants », ont affirmé des députés.
L'introduction d'une définition de la résidence fiscale dans la loi libanaise a justement fait l'objet de l'adoption d'un autre texte, le projet de loi n° 12059, qui modifie plusieurs articles du code de procédure fiscale, dont certains dans ce but. Ce texte, déjà examiné mais non voté par les députés en novembre dernier, est le seul sur la transparence fiscale à avoir préalablement été examiné en commission. Une autre proposition de loi comprenant des modifications similaires a, elle, été rejetée.

Conformément aux exigences du FMTF, les députés ont également voté une loi supprimant intégralement les actions aux porteurs – selon des modalités soumises à un délai allant de trois mois à un an – et une autre détaillant les obligations légales des fiduciaires ( « trustees » ). Par ailleurs, les parlementaires ont aussi voté une proposition de loi amendant l'article 316 du code pénal pour élargir la définition d'actes terroristes, une définition sur laquelle s'appuient notamment les textes de lutte contre le blanchiment d'argent.

 

Dépenser sans budget
Comme l'an dernier, le vote de lois de « nécessité » ne répondait pas seulement à celle de se conformer à des engagements internationaux, mais également à la volonté de l'État de continuer à emprunter ou dépenser sans budget. Quitte à abriter cette anomalie démocratique derrière un paravent légal. Pour rappel, le dernier budget voté par les députés est celui de l'exercice 2006 et le gouvernement n'a toujours pas discuté le projet de loi de finance pour 2017 soumis fin août par le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil.

Le Parlement a ainsi adopté une proposition de loi du député Yassine Jaber (mouvement Amal, comme M. Khalil) qui autorise le gouvernement à procéder à une nouvelle émission de 3 milliards de dollars d'eurobonds en 2017. Fin août, la dette publique a atteint 74 milliards de dollars, en hausse de 7,5 % sur un an.
En dépit des nombreuses entorses juridiques lui permettant déjà de dépenser des fonds en marge de la légalité, le gouvernement avait aussi besoin d'un quitus légal pour couvrir des dépenses jusqu'à la fin de l'année 2016. Le Parlement a donc voté deux propositions de loi du député Jaber en ce sens. La première porte sur l'ouverture de 236 milliards de livres (156,1 millions de dollars) de crédits supplémentaires pour couvrir « les dépenses de plusieurs administrations ». Une autre proposition demandant cette fois l'ouverture de crédits pour un montant de 863 milliards de livres (571,4 millions de dollars) pour couvrir « les besoins de plusieurs administrations et établissements publics » a,elle, « fait l'objet d'un débat houleux, notamment en raison du manque de précisions concernant l'affectation d'une partie de ces fonds, », a indiqué le député Nabil de Freige (courant du Futur). « Les députés ont finalement convenu de se limiter à débloquer les crédits pour financer les traitements et salaires des fonctionnaires sur cette période pour un total d'environ 533 milliards de livres (353,6 millions de dollars), selon M. Jaber.

Le Parlement a par ailleurs adopté des lois diminuant de 90 %, jusqu'en février 2017, le montant des pénalités de retard liées au paiement de la taxe municipale et de la taxe mécanique. « Ce type de mesure, qui est régulièrement adopté depuis 15 ans, encourage la fraude fiscale et les retards de paiement des taxes », déplore M. de Freige. Par ailleurs, les députés ont ratifié un accord commercial avec le Koweït et un accord économique et technique avec la Chine.

 

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RIEN NE PEUT REVEILLER LES MORTS... QU,UN BON DEBARRAS GENERAL !

LA LIBRE EXPRESSION, CENSUREE PARTI PRIS/ INTERET

08 h 03, le 20 octobre 2016

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Commentaires (1)

  • RIEN NE PEUT REVEILLER LES MORTS... QU,UN BON DEBARRAS GENERAL !

    LA LIBRE EXPRESSION, CENSUREE PARTI PRIS/ INTERET

    08 h 03, le 20 octobre 2016

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