Rechercher
Rechercher

Culture - Musique

Variations autour d’une Béatrice dont le Dante est un piano

Béatrice Rana: révélation, à vingt ans, du prestigieux concours Van Cliburn. Médaille d'argent en 2013, son art du clavier s'est affirmé avec éclat sur toutes les scènes du monde. Hier, elle a ouvert la saison musicale à l'Université antonine (Baabda) en interprétant, exclusivement, une œuvre-monde de J.-S. Bach : Les variations Goldberg.
Les cheveux noirs d'ébène tirés en queue-de-cheval, la stature menue et frêle, le teint clair, les grands yeux noirs ourlés de longs cils recourbés, Béatrice Rana est toute douceur, intelligence et simplicité. Quel joli prénom que celui de Béatrice. « Oui, dit-elle joyeusement, ma mère lisait durant sa grossesse Dante Alighieri. Résultat : mon prénom ! »
Malgré ses multiples voyages et pérégrinations – sollicitée pour plus de 90 concerts aux quatre points cardinaux en une année au lendemain de sa victoire à la compétition Van Cliburn –, c'est la première fois qu'elle foule la terre du pays du Cèdre. Emballement et enthousiasme: «C'est magnifique pour le peu que j'ai déjà vu. De l'avion, Beyrouth est si grand. Et puis il y a une atmosphère si agréable et les gens sont si chaleureux, et on m'a dit que la gastronomie libanaise est fabuleuse... Et puis il y a ici un air d'Italie puisque j'ai joué hier soir sur un Fazioli, le piano qui inaugure la salle restaurée de la chapelle Notre-Dame des Semences...»
Pourquoi tout le concert est-il dédié à cette œuvre majeure du cantor? Comment explique-t-elle son engouement pour cet opus (aux richesses extraordinaires de formes, d'harmonies, de rythmes, d'expressions techniques contrapuntiques) qui a fasciné Glenn Gould, Karl Richter, Wilhem Kempf, Andras Schiff et tant d'autres ?
«J'ai une affinité pour Bach, explique la jeune pianiste. Je pense que c'est une œuvre que tout musicien doit affronter dans une vie. C'est un défi devant cette très grande architecture musicale. Il y a une foule de détails qui ne dérangent jamais l'écriture. Ainsi, l'aria du début et celle de la fin possèdent un même thème qu'on retrouve sous des aspects différents. À noter la grande spiritualité de la fin... » Et d'enchaîner : « Oui, je suis pieuse... mais pas trop ! Après tout, je suis catholique. On doit avoir de la spiritualité pour jouer Les variations Goldberg. Dans le jeu, c'est un monologue avec une personne. Il y a de toute évidence une certaine spiritualité qui flotte là. Il paraît que cette "montagne dorée" (traduction de Goldberg ) était pour endormir un baron insomniaque. Oui, mais on ne dort jamais ici (petits rires étouffés). La musique n'est pas relaxante pour moi : elle prend toute mon énergie. Pourquoi pas de bis ? Après cette musique, cette spiritualité, plus rien ne peut prendre le relais. Je me contente des dernières notes de Bach dont les échos, l'emprise et la force restent longtemps en salle, dans les oreilles, l'esprit et le cœur... »
Férue de Martha Argueritch, lisant Dostoïevski (son livre de chevet actuellement est L'idiot ), appréciant les cantabiles de Rubinstein et Arrau, amoureuse des toiles du Caravage, savourant les voyages, passionnée des concertos de Schumann, aimant faire de longues brassées en natation, Béatrice Rana, née à Lecce aux Pouilles (c'est la Florence du Sud, souligne-t-elle), est une jeune fille loin des discos, du vacarme et des bruits qui dérangent.
«Je suis très sérieuse, confesse-t-elle avec un sourire désarmant. Ce que j'aime par-dessus tout, c'est être avec ma famille, mes amis, les gens que j'aime. Mon rêve ? Je veux toujours la même chose : faire ce que j'aime avec les gens que j'aime...»
Un dernier souhait ? Un vœu pieux ? « Que ma musique dise des choses au public venu m'écouter.... Car de par mes multiples déplacements, je sais que les notions et les perceptions des publics varient selon les horizons. J'espère que le public libanais a eu un moment agréable... »

Béatrice Rana: révélation, à vingt ans, du prestigieux concours Van Cliburn. Médaille d'argent en 2013, son art du clavier s'est affirmé avec éclat sur toutes les scènes du monde. Hier, elle a ouvert la saison musicale à l'Université antonine (Baabda) en interprétant, exclusivement, une œuvre-monde de J.-S. Bach : Les variations Goldberg.Les cheveux noirs d'ébène tirés en...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut