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Liban - Pour préserver l’espoir

« J’étais parti rapporter du thé du supermarché, je ne suis jamais rentré »

Pour que la cause des personnes disparues au Liban ne tombe pas dans l'oubli, l'ONG Act for the Disappeared a lancé le projet « Fus'hat amal »*. Dans ce cadre, nous publions une série de témoignages fictifs qu'auraient apportés des Libanais arrachés à leur milieu familial et social.

Kamel Hassoun a disparu en janvier 1976.

Mon nom est Kamel.
J'avais 28 ans et j'étais en charge de la maintenance chez Singer. Je travaillais beaucoup. Je voulais offrir une bonne éducation à mes quatre enfants et m'assurer qu'ils ne manquaient de rien. À chaque fête, j'avais l'habitude de leur rapporter de beaux habits qu'ils mettaient pour l'occasion. J'adorais voir leur visage souriant, lorsqu'ils découvraient leurs paquets.
Ma vie et celle de mes enfants a soudainement basculé en janvier 1976. Après le travail, je me suis rendu avec l'une de mes filles au supermarché – situé à proximité de notre maison à Sabtiyé – acheter quelques produits qui manquaient. De retour à la maison, je me suis rendu compte que j'avais oublié le thé. Je suis reparti seul au magasin pour en rapporter. C'était la dernière fois que mes quatre enfants m'ont vu. Nada avait 5 ans, Sonia en avait 4, Faten était âgée d'un an et Fadi n'avait que 15 jours.
Après ma disparition, ma famille a été obligée de quitter la maison dans laquelle nous vivions car, sans mon salaire, ma femme ne pouvait plus payer le loyer. Ils ont déménagé et ma femme a dû trouver plusieurs emplois pour pouvoir subvenir à leurs besoins.
Lorsque la situation s'est détériorée au Liban, elle a décidé de quitter le pays pour garder les enfants à l'abri du danger. Toutefois, lorsqu'elle a présenté des demandes pour les passeports, les autorités ont les rejetées, expliquant que le père devait être présent. Elle a essayé de leur expliquer que j'étais porté disparu et que par conséquent, il était impossible que je vienne. Ils ne voulaient rien entendre. Ils lui ont expliqué que la seule solution consistait à me déclarer mort.
À la souffrance psychologique due à l'incertitude quant à mon sort, s'ajoutaient les difficultés économiques et la rigidité du système administratif et légal. Il a fallu beaucoup de courage à ma femme pour affronter cette situation et continuer à élever seule nos quatre enfants.
Beaucoup d'autres épouses et mères de famille ont dû faire face aux mêmes difficultés. Tout en se battant pour obtenir des réponses sur le sort de leur mari, elles devaient subvenir aux besoins financiers de leur famille et assurer – dans la mesure du possible, vu la situation – à leur progéniture une enfance ordinaire. Elles sont, elles aussi, les victimes oubliées de cette guerre.
Mon nom est Kamel Hassoun. Ne laissez pas mon histoire s'interrompre ici.

 

* « Fus'hat amal » est une plateforme numérique qui rassemble les histoires des personnes disparues au Liban. Le projet est financé par le Comité international de la Croix-Rouge, l'Union européenne, le National Endowment for Democracy et la Fondation Robert Bosch.
Des histoires d'autres personnes ayant disparu durant la guerre sont disponibles sur le site Web de Fus'hat amal à l'adresse: www.fushatamal.org
Si vous êtes un proche d'une personne disparue, vous pouvez partager son histoire sur le site du projet ou contacter Act for the Disappeared aux 01/443104, 76/933306.

 

Tous les témoignages dans notre dossier

Disparus de la guerre civile : S'ils pouvaient témoigner...

Mon nom est Kamel.J'avais 28 ans et j'étais en charge de la maintenance chez Singer. Je travaillais beaucoup. Je voulais offrir une bonne éducation à mes quatre enfants et m'assurer qu'ils ne manquaient de rien. À chaque fête, j'avais l'habitude de leur rapporter de beaux habits qu'ils mettaient pour l'occasion. J'adorais voir leur visage souriant, lorsqu'ils découvraient leurs paquets.Ma...

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Merci M. Hassoun pour votre commentaire, le prénom a été corrigé. Bien à vous

L'Orient-Le Jour

11 h 18, le 18 octobre 2016

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Commentaires (1)

  • Merci M. Hassoun pour votre commentaire, le prénom a été corrigé. Bien à vous

    L'Orient-Le Jour

    11 h 18, le 18 octobre 2016

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