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Liban - Békaa

Mobilisation des agriculteurs lésés de Ersal devant le Sérail

Le chef du gouvernement promet de défendre leur cause en Conseil des ministres.

Mariam Flitti confiant sa tragédie à la presse lors du rassemblement devant le Sérail.

Mère de famille, mariée à un agriculteur, Mariam Flitti, originaire de Ersal, a perdu son mari Hassan le jour où le couple se rendait dans leur terrain agricole, situé dans le jurd de la localité.
Accompagnée de leur fils de trente ans, Mohammad, la famille a été prise entre deux feux dans l'un des affrontements qui opposaient des combattants du Hezbollah à des éléments jihadistes (État islamique et Fateh el-Cham, ex-Front al-Nosra). Son mari a été tué sur le coup et son fils blessé aux jambes et aux poumons. Il s'en est miraculeusement sorti et Mariam continue à payer à ce jour la dette qu'elle doit à ses créanciers et à l'hôpital où son fils a été soigné.

L'histoire illustre parfaitement la tragédie que subissent, depuis plus de trois ans, les habitants de Ersal, des agriculteurs en majorité, qui font vivre plus de 7 000 familles avec les revenus de leurs récoltes.
Situés par malheur dans ce no man's land interdit d'accès par l'armée libanaise depuis que celle-ci affronte les jihadistes qui ont assiégé le jurd de Ersal, leurs terrains agricoles sont délaissés depuis et la population de ce village frontalier qui a accueilli en grand nombre des réfugiés syriens s'appauvrit.

Depuis plus de trois ans, les agriculteurs réclament une solution à l'État, mais ce dernier est resté sourd à leurs doléances. Hier, ils ont décidé de faire le trajet jusqu'au Sérail pour faire entendre leur cri. Plus de deux cents agriculteurs et propriétaires terriens ont fait le déplacement avec pour objectif de réclamer auprès des décideurs une égalité de traitement avec les cultivateurs de pommes et de blé que le gouvernement a récemment décidé de compenser à cause des difficultés à écouler leurs récoltes.

 

(Lire aussi : L’État va subventionner les cultivateurs de pommes)

 

« L'ensemble de nos terrains agricoles sont sous occupation, soit près de 4 millions d'arbres, principalement des cerisiers et des abricotiers », se lamente Samih Ezzeddine, l'un des participants à la manifestation, dans un entretien à L'Orient-Le Jour. « La plupart d'entre nous ne peuvent accéder à leurs terrains, et leurs arbres fruitiers sont probablement morts ou desséchés aujourd'hui », dit-il. Le cultivateur rappelle que les rares agriculteurs qui ont osé s'aventurer dans la zone agricole pour aller voir ce qu'il en est ont eu des déboires avec les jihadistes qui les ont menacés et leur ont réclamé un pourcentage sur leur récolte. D'autres, à l'instar de l'époux de Mariam, sont tombés sous le feu des combattants de part et d'autre.

« Les rares fois où certains agriculteurs ont réussi à faire l'aller-retour en franchissant les deux seuls barrages de Wadi Khaled et de M'sidé encore ouverts à la circulation (notamment pour les réfugiés syriens se trouvant de l'autre côté), ils n'ont pas été autorisés par l'armée, qui se méfie de tous ceux qui font la traversée, à ramener leur récolte au village pour l'écouler », témoigne M. Ezzeddine. « C'est une vraie catastrophe », commente le cultivateur.
Samih Ezzeddine, qui faisait partie de la délégation officielle qui a rencontré hier le Premier ministre Tammam Salam, ne désarme pas cependant. L'échange que la délégation a eu avec M. Salam était franc, confie-t-il, le chef du gouvernement ayant promis de soutenir leur cause lors du prochain Conseil des ministres, jeudi prochain. M. Salam n'a d'ailleurs pas hésité à saluer « la ténacité et la capacité d'endurance des habitants du village dans un contexte sécuritaire et économique des plus difficiles », rapporte Rima Flitti, vice-présidente de la municipalité de Ersal, qui a parrainé de bout en bout le mouvement de protestation.

Les membres de la délégation ont également rencontré le secrétaire général du Haut-Comité de secours, le général Mohammad Kheir, ainsi que le ministre de l'Agriculture, Akram Chehayeb, qui a estimé que leurs « demandes étaient légitimes », s'engageant à les aider « pour qu'ils puissent obtenir une partie des compensations pour les pertes subies ».
En attendant, les agriculteurs, qui prévoient une escalade s'ils n'obtiennent pas gain de cause, ont décidé de calmer le jeu jusqu'à jeudi prochain. Décidés à revenir ce jour-là, « en plus grand nombre encore pour réinvestir la place face au Sérail », ils espèrent que les promesses faites par le chef du gouvernement seront tenues.

 

 

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