Rechercher
Rechercher

Liban - Télécommunications illégales

Poursuites judiciaires contre Michel Gabriel Murr et Abdel Menhem Youssef

« Je ne protège personne », affirme Boutros Harb.

Le procureur financier, Ali Ibrahim, a engagé hier des poursuites contre Michel Gabriel Murr, le PDG de la société de production Studio Vision et de la chaîne locale MTV, dans l'affaire des télécommunications illégales. Il a également demandé l'autorisation du ministre des Télécoms, Boutros Harb, de poursuivre en justice le directeur d'Ogero, Abdel Menhem Youssef, dans le dossier des télécommunications et des réseaux Internet illégaux.

À l'issue d'une réunion de la commission parlementaire à laquelle assistait le ministre de la Santé, Waël Bou Faour, le président de cette commission, Hassan Fadlallah, a indiqué que « le procureur général financier a demandé que des poursuites soient engagées à l'encontre du directeur d'Ogero. Il a en même temps engagé une procédure à l'encontre du directeur de la société Studio Vision et de la chaîne locale MTV ».
Confirmant cette demande pour ce qui est de Abdel Menhem Youssef seulement, M. Bou Faour a déclaré : « Je ne pense pas que le ministre des Télécoms (Boutros Harb) la rejettera. » « La corde se resserre autour du cou des personnes impliquées », a-t-il ajouté.
« Je ne protégerai personne », s'est dépêché de répondre M. Harb lors d'un point de presse.
Selon M. Bou Faour, « d'autres personnes seront poursuivies et nous allons suivre l'affaire jusqu'à ce que les fonds publics dilapidés reviennent dans les caisses de l'État et que les coupables soient jugés ». Une promesse faite à plusieurs reprises déjà par des membres de la commission et son président, le député Fadlallah.

Studio Vision est accusée d'avoir vendu des lignes de type E1 à des sociétés privées, a précisé M. Fadlallah, occasionnant près de 60 millions de dollars de manque à gagner pour l'État.
La ligne E1 est une ligne d'accès interurbain au réseau téléphonique du ministère des Télécoms/Ogero. C'est une connexion numérique rapide reliant le PABX, le commutateur du client, à celui du ministère, avec une vitesse de 2 Mo/s (megaoctets par seconde).
« Il s'agit de poursuites financières », a tenu à souligner le président de la commission lors d'un point de presse, précisant que dans cette double affaire de fraude, « l'État aura perdu un total de 100 millions de dollars ».

En mai dernier, une polémique avait opposé le ministre des Télécoms à M. Murr, le premier affirmant que l'un des relais Internet illégaux, situé dans le secteur « de Zaarour, dans le Metn, appartenait au PDG de la MTV ». Ces réseaux, dont certains sont présumés liés à Israël et qui distribuaient entre autres leurs services à des administrations publiques libanaises, notamment des services de sécurité, avaient été découverts il y a quelques mois. Quatre relais Internet illégaux avaient été repérés à Zaarour, ainsi que dans les secteurs du jurd de Denniyé, au Liban-Nord, de Ouyoun el-Simane et de Faqra, dans le Kesrouan. Michel Gabriel Murr a été innocenté par la justice dans l'affaire des relais Internet, mais n'a pu échapper aux poursuites judiciaires dans le dossier des télécommunications illégales.

De la poudre aux yeux ?
« Nous avons le droit de former une commission d'enquête parlementaire pour que nous puissions aboutir à une plainte contre les accusés dans l'affaire de l'Internet illégal, mais nous allons laisser l'affaire entre les mains de la justice », a encore dit M. Fadlallah.

Le député a assuré que « toutes les personnes impliquées dans l'affaire de l'Internet illégal seront déférées devant la justice » et que la commission se chargera de faire le suivi. Une partie du dossier de l'Internet illégal est aux mains de la justice miliaire et une autre partie aux mains du procureur financier, a-t-il précisé. La justice militaire est chargée du volet relatif à la sécurité de l'État, notamment au lendemain de la publication d'informations selon lesquelles les réseaux Internet illégaux « pourraient être liés à Israël ».
M. Harb a de son côté assuré au siège du Parlement qu'il ne « protège personne dans l'affaire de l'Internet illégal ». « Ce dossier ne sera pas clos avant qu'on n'aboutisse à un résultat », a-t-il affirmé.

Dans un entretien à L'Orient-Le Jour, une source proche de la commission a toutefois exprimé ses doutes quant à l'aboutissement de ce dossier.
« L'annonce des poursuites engagées contre M. Murr n'est que de la poudre aux yeux pour tenter de dissimuler l'autre grand scandale, celui des réseaux Internet illégaux et les sociétés qui en bénéficiaient à travers Abdel Menhem Youssef », a indiqué la source qui croit savoir que ce dernier pourrait, une fois de plus, se tirer d'affaire, « dans la mesure où il bénéficie d'une protection politique ». « Comment, sinon, a-t-il pu échapper à ce jour aux filets de la justice, sachant qu'il a déjà fait l'objet de près de 40 poursuites engagées contre lui par les différents ministres qui se sont succédé ? »
La source a résumé la situation comme suit : « En définitive, nous sommes en présence d'un système mafieux régi par des codes spécifiques qu'il faut rechercher dans certains cercles judiciaires, voire même médiatiques, le tout bénéficiant de couvertures politiques. »

C'est toutefois un avis plus nuancé qu'a exprimé le député Hassan Fadlallah à L'Orient-Le Jour, affirmant que « c'est la première fois que les membres de la commission tentent une expérience similaire loin des calculs politiciens ». « Nous assumerons nos responsabilités jusqu' au bout. Mais nous ne pouvons pas intervenir dans le travail de la justice qui doit dire le dernier mot », a ajouté le député.
Selon lui, les poursuites engagées contre Michel Gabriel Murr constituent une « première » dans une affaire à scandale. « C'est déjà un acquis », estime le parlementaire.

Il reste à voir si le ministre des Télécommunications, qui s'est engagé à suivre l'affaire jusqu'au bout, accordera dans les jours qui viennent l'autorisation d'engager des poursuites contre le directeur d'Ogero. Selon une source informée, le procureur près la Cour de cassation, Samir Hammoud, peut toutefois ordonner au juge financier de se saisir de l'affaire si le ministre refuse de donner le feu vert à ce dernier pour l'autoriser à engager la procédure.

 

 

Pour mémoire

La commission des Télécoms presse la justice d'agir 

Boutros Harb fait part des réalisations de son ministère

Le procureur financier, Ali Ibrahim, a engagé hier des poursuites contre Michel Gabriel Murr, le PDG de la société de production Studio Vision et de la chaîne locale MTV, dans l'affaire des télécommunications illégales. Il a également demandé l'autorisation du ministre des Télécoms, Boutros Harb, de poursuivre en justice le directeur d'Ogero, Abdel Menhem Youssef, dans le dossier des...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut