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Nos Lecteurs ont la Parole - Wissam Antoine NASRALLAH

Laïcisme d’État

« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. (...) » Art. 1 de la Constitution de 1958. Amen.
La fréquence d'emploi du mot laïcité dans le discours politique de notre curie nationale (et ce depuis un certain temps) semble en effet indiquer que ce principe s'est mué en véritable « Notre Père ». Pour les plus puritains, la laïcité est même devenue le moyen du salut d'une société dépassée par ses péchés.
Deux courants «théologiques» composent ce clergé d'un nouveau genre.
Les prosélytes du premier courant se sont récemment découvert une piété laïque afin de se prémunir contre l'inexorable montée de l'islam en France. La laïcité leur sert notamment d'anxiolytique à la psychose engendrée par toute expression visuelle ou alimentaire de la communauté musulmane (un musulman « non nocif » serait-il un musulman « couscous aux lardons » ?). S'il est indéniable que les différents sujets épineux liés à l'islam en France doivent être débattus, sans la censure du politiquement correct, cela doit se faire dans le respect et sans mélanger laïcité et intégration, laïcité et politique économique.
Quant aux thuriféraires du deuxième courant, la laïcité est devenue pour eux une véritable incantation contre les esprits maléfiques des religions, qui n'ont d'autre but que d'asservir les Français en leur estropiant toute faculté de raisonnement indépendante et en les engouffrant dans la spirale de l'intolérance. Que de pierres d'achoppement qu'il convient donc d'écarter, voire d'éliminer, de l'espace public en les restreignant aux « loisirs » d'un dimanche matin. Ce catéchisme dominant, parfumé à l'encens républicain, a la pieuse intention d'émanciper les citoyens en les soustrayant à toute appartenance, croyance, identité et autres atavismes qui ne seraient pas conformes à la pudeur de l'ordre moral tel que défini par la gauche et la droite bien-pensantes.
D'une logique inclusive, la laïcité est ainsi devenue résolument exclusive. De contenant, elle est devenue contenu. De garantie de la neutralité des institutions envers les religions, elle est devenue idéologie. Un laïcisme qui ne jure que par une prétendue tolérance. Le type de tolérance qui ne tolère pas qu'on exprime dans le débat public des opinions et des convictions qui feraient référence à une quelconque morale religieuse (tous les autres « ismes » sont bien entendu permis). En s'adjugeant donc le monopole de la parole publique sous couvert de neutralité, alors même que sur bien des sujets la neutralité n'existe pas, le laïcisme est devenu une entreprise d'uniformisation des consciences qui va à l'encontre même du principe de laïcité.
Le combat pour la laïcité a été dur. Mais il était nécessaire, à la fois pour l'État et pour tous ses citoyens. La laïcité a libéré le politique de son inféodation au religieux et le religieux de son business de légitimation des dérives du pouvoir, et Dieu sait combien sont nombreux les drames de l'histoire qui ont résulté de ce néfaste concubinage. La laïcité libère aussi les croyants de l'arbitraire du pouvoir et favorise une foi résultant d'une démarche personnelle. La défense de la laïcité, dans son sens originel, doit donc autant être le combat des religions que celui de la République, notamment contre ceux qui prétendent aujourd'hui en être les seuls dépositaires.

Wissam Antoine NASRALLAH
Diplômé de Sciences Po Paris

« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. (...) » Art. 1 de la Constitution de 1958. Amen.La fréquence d'emploi du mot laïcité dans le discours politique de notre curie nationale (et ce depuis un certain...

commentaires (1)

Merci pour cet exposé indépendant et bien présenté. N'y-a-t-il pas danger à demander aux français d'éliminer toute dimension spirituelle de leur vie? Ne voit-on pas que cela peut mener à des dérives extrêmement dangereuses? Défendons la laïcité qui libère, non celle qui enferme dans une pensée unique et tronquée de son âme. Agnès Sanders

SANDERS AGNES

12 h 48, le 16 septembre 2016

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Commentaires (1)

  • Merci pour cet exposé indépendant et bien présenté. N'y-a-t-il pas danger à demander aux français d'éliminer toute dimension spirituelle de leur vie? Ne voit-on pas que cela peut mener à des dérives extrêmement dangereuses? Défendons la laïcité qui libère, non celle qui enferme dans une pensée unique et tronquée de son âme. Agnès Sanders

    SANDERS AGNES

    12 h 48, le 16 septembre 2016

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