La culture du carottage

« Le bonjour amène la conversation et la conversation amène la carotte. » – Driss Chraïbi

Cultiver, c'est tout un art. Il y en a, comme les Allemands, qui cultivent la terre pour y faire pousser des carottes. Un enfant de cinq ans pourrait appeler cela du carottage. D'autres, comme les Français, cultivent leurs relations conjugales ou extraconjugales pour tenter d'éviter l'inévitable rupture après des années de mariage, des enfants déjà grands et une routine trop bien installée. D'autres encore, comme les Américains, cultivent leur physique ou leur plastique, en parallèle avec une incessante quête de l'élixir de jouvence qui leur donnera jeunesse éternelle. Tout cela, me direz-vous, n'est que préjugés mal placés ou stéréotypes bien visés. Cependant, il y a une culture qui est inculquée de façon très minutieuse par certains pays et tout particulièrement celui où je vis.
C'est avec colère que j'affirme qu'au Liban, mon cher pays, est enseignée, dès le plus jeune âge, la culture de l'arnaque primant sur les valeurs et les principes de base de la vie. D'ailleurs, où trouver un pays, à part celui du Cèdre, où l'art de l'escroquerie est à un tel apogée ? Voici encore un domaine où le Libanais obtient un prix d'excellence. D'ailleurs, à peine foulé le sol libanais, le voyageur novice, autochtone ou étranger, en fait l'expérience – ou plus exactement les frais. Il se fait essorer jusqu'au moindre sou s'il a le malheur de prendre un taxi pour atteindre la destination de son séjour. Au Liban, on respire comme on arnaque, de façon bruyante, en ouvrant bien grands narines et poches. Arnaque et corruption sont devenues les ennemis publics numéro 1 de certains Libanais, dans une guerre intestine contre ce gouvernement qui ne fait rien pour soulager son peuple et qui fait l'impasse sur solutions aux problèmes existentiels. Eh oui, vous l'avez compris, beaucoup de Libanais pratiquent la culture de l'entourloupe, de la tromperie, du vol, c'est-à-dire du carottage version adulte. Tout le monde arnaque tout le monde. Plus tu arnaques, mieux tu te portes. Après tout, la solution au terrorisme, c'est peut-être le Liban !
Appâtons les Daech sur nos terres : ils se feront plumer en moins de deux, et ainsi, les Libanais pourront, pour la première fois, être fiers de leur côté arnaqueur qui aura solutionné ce grand fléau.